J’ai un peu décidé d’aller à Eze, entre entre Nice et Monaco, à côté de Beaulieu-sur-mer et Saint-jean-CapFerrat, comme d’aller au cinéma.
Je n’avais pas réalisé que c’était une si bonne idée d’y aller au lendemain de Noël…
Avec cet avantage considérable, en plus du fait que c’est abordable : il n’y a pas de touristes ! En commençant par une balade dans Eze, de nuit, là où l’été on regarde des touristes regarder des vieilles pierres. Le 26 décembre, on y respire l’air de la mer, la beauté du soir, les lumières du passé, en toute sérénité…
En continuant par la villa qu’a fait construire Béatrice de Rothschild, riche héritière au goût exquis, mais comme tant de femmes à cette époque, victime d’un mariage arrangé pour raisons d’affaires avec un russe trop joueur (Maurice Ephrussi)… mais consolée par sa fortune et sa capacité de la transformer en merveille : cette villa est peut-être un des plus beaux sites de France. Et à cette période, j’ai pu m’asseoir seule sur sa loggia, face au jardin, au soleil et à la mer. Quelques dizaines de minute, qui valent un plein de sérénité créatrice pour 2012…Dans la villa elle ne passa que quelques années, l’abandonnant en 1916.
Et on peut lui savoir gré, d’avoir, à l’instar de son père, fait profiter de sa fortune, de ses collections d’art, la France entière, puisqu’elle légua la villa ainsi que toutes ses collections à l’académie des Beaux-Arts en 1938…et si on veut faire en plus un tout petit peu de politique, on remarque, parmi ses collections, les tenues asiatiques, avec des chaussures qui montrent les affolants instruments de torture qui entravaient la liberté des femmes en empêchant leurs pieds de grandir.
Cela m’a fait penser à l’article « Question de différence »de Colette Guillaumin dans « nouvelles questions féministes », lu sur la route, qui justement en parlait, faisant l’analogie avec les talons aiguilles (même si il est vrai, ces derniers, on peut toujours les enlever comme le souligne Guillaumin), cette perpétuelle nécessité de contraindre les femmes, en commençant par leur corps, les rendant si peu nombreuses à pouvoir, comme Béatrice de Rothschild, au moins avoir cette pièce -villa- à elle, et les moyens de leur indépendance face à un mari non désiré.
Ensuite, on ne peut pas ne pas penser à « un autre genre de princesse », de celles qui peuvent nous avoir fait rêver, pas parce qu’elle fut celle de Monaco, mais pour sa présence sur le grand écran, dans les grands films d’Hitchcock, je parle bien sûr de Grace Kelly, en empruntant la grande corniche, vers Monaco-Monte Carlo-Menton, on pense aux scènes de « La main au collet ». La vue y est vertigineuse, d’un côté la mer, de l’autre les Alpes enneigées…et on arrive en plein rêve, au château de Roquebrune, au coucher du soleil. Un moment d’oubli du temps, de magie ocre…