Autour du 8 mars : l’égalité en marche, la justice en ligne de mire

Le 8 mars arrive. Le jour dit, on se bouchera les oreilles pour ne pas recevoir des fleurs…

Et même nous devrions faire la grève, comme à Toulouse, et dans le monde entier, comme l’explique le site 8 mars online...l’appel à la grève existe depuis 2000 ! A Toulouse donc, une manifestation à 14h place Jeanne d’Arc

Et on participera à la manifestation à l’appel du CNDF, à partir de 19heures…rendez-vous Bastille !

Ensuite, on pourra aller pour celles qui le souhaitent à la marche de nuit non mixte, rendez-vous 20h30. Je coupe court à tout commentaire. Non-mixte, parce que les femmes y revendiquent le droit de pouvoir circuler en sécurité la nuit. Que les hommes qui se sentent exclus se rassurent : ils peuvent nous soutenir, en relayant l’info et en applaudissant, et en organisant des actions auprès de ceux de leurs pairs qui ne nous laissent pas en paix la nuit pour les convaincre de nous laisser vivre…

Mais le 8 mars, c’est aussi beaucoup d’événements, avant et après.

Avec, le 7 mars à 18h30, cette soirée d’interpellation des candidat-e-s organisée par les 45 associations féministes réunies dans « féministes en mouvements« . Je vous en reparlerai aussi avec la sortie du manifeste « mais qu’est-ce qu’elles veulent encore », livre-résultat des rencontres féministes d’Evry en juillet dernier. L’idée est donc de placer l’égalité au coeur de la campagne, de faire pression pour que le jour venu, des moyens -au travers en premier lieu d’un ministère- soient donnés.

Juste avant, le débat public organisé par l’Assemblée des femmes de Paris à l’Hôtel de l’Industrie, 4 place Saint-Germain-des-Prés, 75006 Paris. C’est à partir de 14h, avec 3 tables rondes autour des contributeur-e-s à l’ouvrage collectif femmes-hommes enfin l’égalité ? Le programme ici : 120307_pg_assfem

Le 6 mars, un colloque est organisé par la mairie à la Bellevilloise de 10 heures à 19 heures, intitulé : « enjeux de l’égalité, enjeux du féminisme ». Il faut s’inscrire avant le 2 mars à cette adresse : 8mars.sg@paris.fr. Vous pouvez télécharger le programme ici : 120306_pg_mairieparis.

Le 6 mars également, mais dans la matinée à Sciences-po, un colloque de Presages « égalité femmes-hommes et partage du pouvoir économique ». Pour en savoir plus, sur le site du programme PRESAGES

Le 6 mars toujours -décidément- , Ciné-débat sur la prostitution à Saint-Germain-en-Laye organisé par le Mouvement du Nid autour du film « Slovenian Girl ».

Au Cinéma C2L – 25 rue Vieux Marché – 78100 Saint Germain en Laye. Le programme complet ici : 120306_mvtdunid

Bon, mais j’arrête ici mes « parisienneries », et si vous voulez les connaître toutes, rendez-vous sur le site du centre Hubertine Auclert, dont l’agenda est beaucoup plus complet.

Et je pars pour ailleurs en France…

En commençant par Lyon, avec une expo photo « on ne naît pas femme on le devient » par Marie-Hélène Le Ny. L’expo est déjà ouverte, vernissage le 1er mars et elle dure jusqu’au 10. C’est à la Bibliothèque du 1er rue Saint-Polycarpe.  Voici, par l’auteure-photographe, de quoi il s’agit : « Ce sont les représentations du féminin qui m’interrogent aujourd’hui, leur formatage agressif est souvent caricatural et réducteur. J’ai donc choisi de réaliser des portraits dépouillés de tout artifice, en noir & blanc et en studio, offrant le même espace neutre à chacune afin de focaliser l’attention sur des personnes humaine – des alter-égaux, et non sur des contextes sociaux. Elles sont près de 200, de 9 à 90 ans, de toutes origines et des cinq continents, à avoir répondu à ma proposition.« 

Si vous avez l’occasion de la voir, n’hésitez pas à me faire part de vos impressions !

A Nancy, le 8 à 18h30, l’antenne locale d’Osez le féminisme organise un flash mob et donne le programme dans la région, à consulter ici.

A Strasbourg aura lieu une conférence avec pour invitée spéciale Gisèle Halimi au Parlement européen (salle Louise Weiss) sur le thème : 100 ans de lutte pour l’égalité des sexes.

A Toulouse, le 8 mars, ce sera la grève des femmes, donc, mais il y aura aussi une projection le 7 mars au cinéma ABC du film d’Emmanuelle de Riedmatten sur Carole Roussopoulos (21h) ainsi que de « Liberté, ô mon Egypte » de Sabreen Bint Loula à 19h.

A Rennes, des manifestations pendant tout le mois de mars (programme ici) dont le 8 de 14h30 à 20h : à la rencontre des associations et partenaires rennais qui agissent en faveur des femmes. Forum organisé par la Ville de Rennes en partenariat avec le CIDFF 35. Halle Martenot – Place des Lices (métro Sainte-Anne).

Et enfin Marseille, où j’aurai l’honneur de participer à une table-ronde sur le thème la place des femmes dans l’art contemporain, dans le cadre d’une expo qui s’annonce très belle et fera la place à des créatices contemporaines marseillaises : + d’infos ici.

Et pour finir, je reviens une minute à Paris pour parler de l’inauguration, le 8 mars au matin, d’une plaque en l’honneur de Madeleine Pelletier, ( 1874-1939), militante féministe et 1ère femme diplômée en psychiatrie en France. Une Plaque à son nom sera dévoilée au 80-82 Gergovie Paris 14e. Suffragiste, pro-avortement et pratiquant elle-même des avortements, refusant la sexualisation des individus : Voici ce qu’en dit Wikipedia : « Ces actions ont été vues comme un attentat porté contre l’identité sexuelle. En écrivant de la manière dont elle s’habillait, elle a dit : « je montrerai les miens [les seins] dès que les hommes commenceront à s’habiller avec une sorte de pantalon qui montre leur …» »

Voilà, une de nos grandes figure historique, ce n’est que justice que cet hommage qui lui est rendu. Rendre la justice, ce sera aussi dans notre ligne de mire en ce mois de mars. Rendez-vous très bientôt pour dire avec nous : « Pas de justice, pas de paix »! .

 

 

Césars, Oscars, hasta la vista et Elles : des clichés au cinéma

En ce moment, le cinéma -qui m’accompagne depuis presque 30 ans, m’énerve.

J’ai vu, adoré, revu des centaines de films, certains, comportant certainement des clichés machistes et véhiculant tous les stéréotypes. Ils m’ont certainement formatée. Mais pourtant, j’y trouvais souvent des personnages de femmes qui m’ont marquée à jamais. Allez, je l’avoue, j’ai un (gros) faible pour Lauren Bacall. Vous vous souvenez, sa réplique dans « le port de l’angoisse » ?   « anybody got a light » ? pfou, Humphrey Bogart apparaît alors encore plus petit que nature…ou encore, quand elle lui dit « you know how to whistle steve ? You just put your lips together…and blow ». Difficile de ne pas rêver alors d’être dans la peau de…Bogart 😉

Bon, cela dit, il est fort probable que même ce film adoré ne passe pas le Bechdel test...mais on pourrait se dire…que c’était il y a 70 ans, bien avant ma naissance !

Eh bien pourtant, les choses n’ont guère changé. Il y a certes, beaucoup plus de films « avec des femmes héroïnes ». De là à ce qu’elles puissent se parler d’autre chose que d’hommes…

Et puis, de là à être nominés aux César ou aux Oscars… bien sûr, il y a « la couleur des sentiments ». Tout le propos du film est autour des relations entre femmes. Donc, on ne parle guère des hommes. Mais quand aux films récompensés : The Artist, on l’a déjà dit, ne passe pas le Bechdel test…Intouchables, malgré de nombreux personnes de femmes, non plus.

Quand à donner un César ou un Oscar à un film réalisé par une femme… »la guerre est déclarée » (qui est celui que personnellement, j’ai trouvé le plus intéressant de tous les nominés que j’ai pu voir), n’a rien eu. Et Polisse est considéré comme « le grand perdant » de la cérémonie.

Bon, sinon, je voulais aussi vous parler de Elles, le film avec Binoche qui fait un article sur la prostitution étudiante et rencontre des escorts. Je ne l’ai pas vu en entier, mais je voulais me faire une idée. J’ai eu un peu l’impression d’être devant un argumentaire de pro-prostitution. C’est-à-dire devant une avalanche de clichés sur la prostitution. Avec une caractéristique : le désir des femmes est absent. Mais ce ne sont pas les hommes qui sont responsables, mais la société et « leurs femmes ».

Ainsi, quelques exemples de clichés que j’ai eu le temps de voir.

-Une étudiante étrangère des pays de l’est n’a pas d’autre choix que de faire l’escort pour faire ses études. Toutes les personnes sur son chemin qui sont « méchantes » sont des femmes : sa mère, qui ne la comprend pas, les employées de l’administration qui la baladent, la journaliste bourgeoise qui l’interroge.

-Les clients, en revanche, sont juste de pauvres maris frustrés par ce qu’ils ne peuvent pas faire avec leur femme (si ça se trouve, en plus, des femmes qui veulent être indépendantes et exprimer leurs désirs ?).. Une « golden shower », par exemple…

-La prostitution estudantine, c’est pour échapper au terrible sort traumatisant de travailler quelques heures au Mac Do. Parce que c’est bien connu, les troubles post-traumatiques du travailleur de fast food sont  très dangereux.

-Enfin, et c’est après ça que je suis partie, la jeune femme en gros plan qui décrit le dégoût ressenti, à chaque fois que ? Et la réalisation nous montre la « prude bourgeoise » Binoche qui croit que c’est l’obligation de faire des pipes à n’importe qui qui lui donne envie de vomir ? Mais pas du tout, quelle sottes nous sommes de l’avoir cru. Elle parle bien sûr du travail « insoutenable » qu’elle faisait…avant de servir de d’objet sexuel à des hommes.

Le tout, sans qu’à aucun moment ne nous soit montré ce dont il s’agit vraiment : des femmes dont le désir n’a aucune importance, je dirais même plus, existence. Puisqu’il n’est jamais mentionné. Jamais questionné. Dans ce film qui pourtant est censé s’intéresser à elles.

Bon, mais je vais finir par ma plus grosse inquiétude. Un film, qui sort le 7 mars, jour de la soirée des « Féministes en mouvements » qui interpellent les candidat-e-s à la présidentielle à La Cigale.
Le film s’appelle « Hasta La Vista » : « Trois jeunes d’une vingtaine d’années aiment le vin et les femmes, mais ils sont encore vierges. Sous prétexte d’une route des vins, ils embarquent pour un voyage en Espagne dans l’espoir d’avoir leur première expérience sexuelle. Rien ne les arrêtera… Pas même leurs handicaps : l’un est aveugle, l’autre est confiné sur une chaise roulante et le troisième est complètement paralysé.  »

« aiment le vin et les femmes »…ah bon, comment ils aiment les femmes ? En clair, une tournée en Espagne pour pouvoir y acheter des femmes. Je ne l’ai pas encore vu, bien sûr, et j’espère me tromper….mais au vu de la bande-annonce je doute que le film traite en finesse de la sexualité des personnes en situation de handicap. D’ailleurs, « curieusement », ce sont trois hommes qui « partent en virée ». Il semble que la sexualité des femmes, sans parler de celles qui sont en situation de handicap, soit, là encore, inexistante…puisque déjà, les femmes n’y sont qu’un objet.

La preuve ? L’affiche !  Vous y voyez une femme, vous  ? Certains s’empresseront de dire, c’est une femme forte, en situation de cowboy, qui domine, une sorte d’Infidèles à l’envers…non, il n’y a pas de femme. Juste des jambes, des talons aiguilles. Pour avoir une tête, encore une fois, il nous faudra repasser…

La journée de « mademoiselle-la-femme », non merci (féministes tant qu’il le faudra…) !

J’espère que vous connaissez toutes et tous le site « les entrailles de mademoiselle ». Sinon, il est à découvrir. C’est justement ce site qui reprend de façon subversive le terme de mademoiselle, et qui joue avec l’appellation Lafâme, pour se moquer de l’essentialisation, objectivisation et désindividualisation des femmes dans ce terme -qui ne veut rien dire : la femme.

La femme, c’est la femelle de l’homme, nous dit le dictionnaire. Et l’homme, c’est l’être humain..

Tout cela, pour vous parler de quelques sujets « pas très importants » mais d’actualité : le sexisme ordinaire, qui laisse la porte ouverte au sexisme institutionnalisé et violent.

Ainsi, cette semaine, nous avons appris que le terme « mademoiselle » devrait être retiré progressivement des formulaires administratifs. Selon une circulaire gouvernementale. Mais que toutes ces personnes si inquiètes et qui ne cessent de nous dire : »les féministes n’ont pas plus important à faire » ? se rassurent : entre une circulaire et son application, il y a un gouffre que la résistance « ordinaire » a de grandes chances de ralentir. Ainsi, au siècle dernier, Lionel Jospin a fait passer une circulaire sur les noms de métiers, qui devaient être féminisés. Et si elle aide à ce que le changement opère, il ne faut pas être préssé-es. Pour certains postes, pas de soucis, mais quand on écrit docteure, on en étonne encore plus d’un-e.

Donc, nous entendons comme réaction principale : » les féministes n’ont donc rien de mieux à faire, l’égalité salariale par exemple ? » De la part de personnes qui n’ont jamais levé le petit doigt pour faire avancer l’égalité salariale. Evidemment, c’est ce que les féministes font, tous les jours, de se battre contre la violence et les inégalités professionnelles ! Tous les jours, elles se mobilisent pour ça, alors que leurs détracteurs ne font rien…mais moquent toutes leurs actions. Ainsi, si les seules personnes qui se battent au quotidien pour l’égalité salariale et la fin de la violence disent : cela ne peut pas faire de mal mais ce sera profitable au contraire aux femmes de changer les mentalités en adoptant quelques mesures symboliques mais ô combien révélatrices, pourquoi ne pas leur donner un tout petit peu de crédit ?

 

dessin de rebecca pour le 8 mars

Aujourd’hui, au quotidien, les féministes se battent, sur tous les fronts. Je citerai deux exemples.
Celui du viol. Réclament-elles que le crime soit jugé à la hauteur de sa gravité, qu’on leur demande de « serrer les fesses », et de s’en remettre toutes seules. Quand on ne les menace pas en retour de mort et de viol.

Celui des inégalités de salaire. Là, ça passe à peu près. Mais seulement dans les discours. Obtenir des sanctions pour les entreprises qui ne font rien, obtenir des rattrapages pour les femmes qui sont discriminées depuis leur début de carrière, ça n’est pas si simple. Et  ces hommes qui reprochent aux féministes de vouloir supprimer mademoiselle mais de ne pas se battre contre les inégalités de salaire, quand vont-ils montrer l’exemple, et réclamer un gel de leur propre salaire pour réserver les augmentations aux femmes ?

Dans ces deux cas, on dira que les féministes sont « répressives », parce que tout simplement, elles demandent l’application de la loi et du principe d’égalité entre êtres humains. Pour le viol, on découvre donc tout d’un coup que la prison ne sert à rien, que ce serait quand même pas possible de mettre tous ces violeurs en prison, qu’il vaut mieux un « suivi psychologique » des agresseurs (quand aucun suivi n’est accordé aux victimes !). Pour les inégalités de salaire, on dit que les sanctions ne seront pas efficaces, qu’il faut faire appel à la bonne volonté et au changement des mentalités…

Et donc, puisque tout le monde est d’accord qu’il faut changer les mentalités, voilà que les féministes s’attaquent aux stéréotypes sexistes  et demandent que la langue soit plus équitable. Que le masculin ne l’emporte plus, qu’on donne à la journée de la femme (c’est l’appellation officielle en France) son vrai nom : journée internationale de lutte pour les droits des femmes, qu’on mette fin au « statut qui rend mineure une femme tant qu’elle n’est pas mariée », le « mademoiselle ». Et alors, voilà que les féministes sont critiquées pour s’attaquer à des broutilles….

En résumé, « les féministes » ont bon dos pour tout. Le mot lui même semble signifier : « celles qui ont toujours tort »…il nous faut donc essayer de véhiculer, envers et contre tout backlash, une image qui correspond mieux à ce que nous sommes : comme le disait très justement Carole Roussopoulos, en parlant de la joie d’être féministe et d’avoir lutté, pour toutes les femmes, donc pour l’humanité :

« Le féminisme a été tellement caricaturé que des femmes qui le sont profondément, le rejettent aujourd’hui. Mais il faut s’entendre sur ce qu’est le féminisme. Toute femme qui bouge, qui est consciente, qui veut faire un peu évoluer les choses, est féministe. Toute femme qui décide de ne plus être un paillasson, pour moi, est une féministe. Mais combien de femmes commencent leur phrase en disant …: « Je ne suis pas féministe mais » ! Ça, c’est terrible. Pourtant, si on aborde les problèmes calmement, en général elles reconnaissent que si les choses vont mieux, c’est grâce à nous, et que ce terme ayant été tellement déprécié, caricaturé, elles ont peur de l’employer pour elles-mêmes. Elles ne sont pas toutes dans la séduction des hommes, mais elles ne veulent pas être identifiées à des femmes caricaturées qu’elles ne connaissent pas, qu’elles n’ont pas connues personnellement, dont elles n’ont pas connu l’humour et la gaieté. C’est très flagrant dans les débats qui suivent les projections de « Debout ! » C’est la première chose que disent les gens : « Je ne savais pas que les féministes étaient comme ça ! ». Je leur demande toujours : « Comment croyiez-vous que nous étions ? » Je sais ce que les gens disaient de nous, parce que j’ai lu la presse, je connais les clichés, et c’est terrible ! L’image, dans ces cas-là, est intéressante. Les vidéos montrent les yeux qui brillent encore aujourd’hui, trente ans après… L’image révèle que les féministes des années 70 étaient pleines de ce plaisir qu’elles ont connu et qui a changé leur vie. Si les jeunes femmes étaient un peu plus informées, elles ne pourraient que suivre notre exemple. Nous avons toutes à gagner de lever la tête, tout le monde, tous les opprimés de la terre. »

Merci Carole, d’avoir filmé, lutté contre les stéréotypes, et si bien analysé la situation…nous serons « féministes, tant qu’il le faudra ». Et pour cela, nous continuerons aussi à nous battre contre l’image de « lafâme » et pour réhabiliter celle « des féministes » !

S.G

Quand il n’y aura plus de violences, il n’y aura plus de victimes

Ah ! comme certaines femmes ont du mal à accepter ce terme : victimes ! Moi même, je dois dire, il n’est pas dans ma culture. Quand on se « doit » d’être forte, indépendante, féministe, égales, difficile de reconnaître la possibilité d’être un jour ou d’avoir été victime…et si cela nous arrive, on a bien du mal à accepter de faire partie des « faibles » (ce qui est faux, mais ancré profondément).  Comme si, reconnaître un état de fait était pire que de l’avoir été. Voire créait le stigmate. Cette confusion sur un terme, est à l’origine de beaucoup de nos difficultés de convaincre. Etre victime, ce n’est pas un état. On peut être victime d’une escroquerie, d’une imposture, d’un harcèlement, ou de violence et viol, ce n’est pas lié à ce que nous sommes, mais au fait que nous avons croisé un-e agresseur-e, pas à notre « nature de faible ». C’est pour cela que la « journée des victimes » de demain a un rôle. Celui de nous faire comprendre que c’est exactement l’inverse que nous voulons : reconnaître que les femmes -et les enfants, et d’autres- ont été victimes, c’est offrir -enfin- la possibilité de ne plus l’être. Si on est dans le déni, alors on sera dans l’incapacité de s’en sortir à long terme. Si en revanche, on se reconnaît comme telle, et la société nous reconnaît comme victimes, alors, on pourra laisser derrière nous ce moment qui ne nous résume pas, et passer à autre chose.

Alors, pour revenir sur mon article d’hier, en finir avec l’article de Peggy Sastre et passer à autre chose, je vous conseille de lire le commentaire de Lulu sur mon dernier article, dont je vous livre un extrait ici. Eh oui, il ne s’agit pas d’autre chose que de faire appliquer la loi. Comme pour le vol et autres délits ou crimes qui entraînent beaucoup plus de répression que l’atteinte grave à la personne qu’est le viol. Une amie et moi, nous en viendrons bien un jour à expliquer que si la société doit faire un choix : entre emprisonner les violeurs de femmes ou les voleurs de poules , on préfèrerait à tout prendre qu’elle enferme les violeurs et libère les petits voleurs…

Voilà une partie de ce que dit Lulu :

« – le mieux, lorsqu’on vous a agressé(e) pour vous voler, c’est de ne pas vous en préoccuper, de faire comme si rien ne s’était passé, de ne pas regarder cette dent que vous avez perdu sous les coups, ni cet oeil enflé et de ne pas penser à votre bras cassé. À cette seule condition vous pourrez vous sentir libre et fort(e), participant d’une société démocratique au sein de laquelle tou(te)s peuvent vivre sans crainte et qui prend soin que la loi de la jungle ne devienne pas celle de la république. Aller porter plainte et réclamer que l’on retrouve et poursuive votre agresseur ne ferait que vous obliger à entrer dans la peau d’une victime (ce que vous n’êtes en aucun cas, et ce qui serait de surcroît très très mauvais pour votre moral). De même, méprisez légèrement et conspuez quelque peu tous ces faibles et veules qui vont se plaindre qu’on leur a volé leur bagnole, qu’on les a frappé(e)s, qu’on les menace de mort, qu’on leur a détourné toutes leurs économies, qu’on s’est servi de leur numéro de carte bleue à leur insu – et condamnez grandement cette société de petits joueurs qui réclament justice face aux détournements d’argent de la société générale, de Tapie, de Woerth, des flambeurs de bagnole, des supporters saouls, etc. »

Bon, mais heureusement, il y a des associations, des femmes, des politiques, qui travaillent au quotidien d’arrache-pied pour changer la société. Malgré les multiples bâtons qui leur sont mis dans les roues, elles et ils ne renoncent pas et parviennent peu à peu à se faire entendre. Ainsi, Muriel Salmona, psychiatre et psychotraumatologue, a-t-elle été auditionnée au Sénat. Et elle a été entendue, en particulier par le sénateur Roland Courteau. Celui-ci a écouté, compris, repris le propos de Muriel Salmona. Et a fait voter une proposition de résolution pour améliorer l’application de la loi du 9 juillet 2010 sur les violences envers les femmes, violences au sein des couples et incidences sur les enfants.

Voici un extrait du discours de présentation au Sénat qu’il a fait le 13 février : Toutes les violences entraînent chez les victimes des atteintes graves à leur intégrité physique et psychique.

« Cependant, selon le docteur Muriel Salmona, les violences conjugales et les violences sexuelles font partie des violences les plus traumatisantes sur le psychisme.
Il faut que les intervenants le sachent : de 60 % à 80 % des femmes victimes de ces violences développeront des troubles psychotraumatiques chroniques, qui peuvent durer des années, des dizaines d’années, voire toute une vie et avoir un effet considérable sur la santé des victimes, celle de leurs enfants, ainsi que sur leur insertion sociale et professionnelle.
La sous-estimation de ces violences et de leurs conséquences sur la santé est, il faut le savoir, à l’origine de l’abandon des victimes à leur sort. Délaissées, celles-ci ne bénéficient pas de soins spécifiques et tentent de se réparer comme elles le peuvent. Ainsi, les stratégies de survie qu’elles développeront seront souvent un facteur d’exclusion et de vulnérabilité à de nouvelles violences ».

Vous pouvez lire sur le blog « Stop aux violences familiales, conjugales et sexuelles », un plus grand extrait du discours et avoir de plus amples informations sur les mécanismes post-traumatiques sur le blog de l’association mémoire traumatique et victimologie.

Dans un monde où certaines ont à ce point intériorisé la domination qu’elles minimisent la gravité du viol, savoir que certains responsables politiques (je pense aussi à Danielle Bousquet et Guy Geoffroy sur la prostitution), sont capables de s’ouvrir à un constat qui seul, pourra permettre d’aller vers plus de justice pour l’humanité, est somme toute rassurant…

S.G

Pas de justice, pas de paix : s’émanciper du viol, par quel coup de baguette magique ?

A en croire Peggy Sastre, qui admire en Marcela Iacub une grande intellectuelle contemporaine, le viol pourrait se passer de la justice et de condamnations pénales pour les agresseurs.

Ce qui est bien avec cet article, c’est que je ne vais pas avoir besoin d’en parler…parce que le blog « féministes radicales » l’a déjà fait  !Je parlerai juste de cette phrase qui m’a fait rire : il semblerait que Peggy Sastre « applaudit des deux fesses »…c’est joliment écrit et drôle, certes…mais…je connaissais les femmes sans têtes, mais les femmes sans mains…Ah, l’intériorisation des stéréotypes !

Je préfère vous donner donc les liens :

-http://www.feministes-radicales.org/2012/02/20/viol-lemancipation-des-femmes-se-passera-de-toute-justice/

-http://leplus.nouvelobs.com/contribution/322237-viol-l-emancipation-des-femmes-ne-passe-pas-forcement-par-la-justice.html

Et puisque je vous parle de féministes radicales, je mets le lien vers cet article qui parle très bien du faux « stigmate » à l’égard des personnes prostituées :

« Tout est légal, tout est équitable. De même, on comprend pourquoi des hommes traitent de « pute » la femme qu’ils violent ou veulent violer : si elle est à vendre comme une « prostituée », alors son viol n’est plus un crime. » 

Je suis d’accord avec l’auteure du blog : « Remember « !  N’oublions pas. « Resist. » Résistons. « Don’t comply ». Ne nous plions pas.

Pas de justice, pas de paix !

« tuent-la-vie » des femmes, la rage de vivre ne nous quittera pas de si tôt !

Parmi les 10 exigences des féministes en mouvements, dans leur lettre ouverte aux candidat-e-s à la présidentielle, il y a le remboursement total de L’IVG, l’interruption volontaire de grossesse, et son accès pour toutes, avec l’ouverture de nouvelles places.

Et parfois, encore aujourd’hui, on ne prend pas la mesure du combat qui a été gagné dans les années 1970 par les féministes. On s’en rend mieux compte quand on voit le chef d’oeuvre de Mariana Otero, « Histoire d’un secret ». Ou comment la pénalisation de l’avortement a provoqué la mort de centaines de femmes, a privé de mère des milliers d’enfants, empêché des artistes -des femmes, tout simplement de s’épanouir et de vivre leur vie d’êtres humains, au nom du très spécieux « droit à la vie d’un embryon ».

On s’en rend mieux compte quand on comprend que ce que vivent les femmes ici, c’est ce qui se passe, et se passait en France il y a un peu plus de 40 ans, quand l’avortement n’était pas justement encadré par la loi : la peur au ventre, au sens propre, d’être enceinte, d’être violée, d’être en vie. C’est le sort que tous les anti-vie-des-femmes voudraient nous réserver.

Pis, signe du mépris qu’ils et elles ont en vérité pour la vie, pour nos vies, cette manipulation des anti-liberté des femmes en Allemagne : 300 euros donnés par une caisse d’assurance maladie (en dépit de la loi), pour renoncer – à vie- à l’ivg. 300 euros pour s’occuper d’un enfant toute une vie, un enfant non désiré -qui pourra ressentir que pour une aumône minable, on a choisi de l’imposer dans ce monde ? En outre, évidemment, ces 300 euros sont donnés en échange d’une adhésion à une association pro-vie partenaire.

Alors vous le savez, moi je ne suis pas « pro-vie », je suis pour que tous les êtres humains en vie puissent avoir la chance de mener leur vie comme ils ou elles l’entendent et d’avoir une place dans notre société. Je suis pour que toutes les femmes puissent enfin être débarrassées de la peur qui en vrai les empêche de vivre. Nous continuerons à le clamer : la rage de vivre ne nous quittera pas de si tôt, nous ne vous la donnerons pas pour 300 euros ni pour 3 millions !

Sandrine GOLDSCHMIDT

Soirée de solidarité avec Pinar Selek à Paris !

Je vous avais parlé ici même de Pinar Selek, cette jeune femme turque, sociologue antimilitariste et féministe poursuivie par la justice de son pays pour un attentat imaginaire…en réalité pour sa jugée trop grande sensibilité à l’égard de la cause des kurdes (voir explications ci-dessous). Une situation tellement absurde que je parlais même d’elle comme une « Joseph K turque », en référence au caractère Kafkaïen de l’affaire.

Eh bien, un an après, ce n’est pas fini ! Car si, encore une fois, la justice a bien été obligée de reconnaître son innocence dans un non-attentat, (elle a été acquittée pour la 3ème fois en février 2011), la cour de cassation a pour la troisième fois cassé le jugement, reporté au 7 mars 2012. Du coup, elle n’est toujours pas libérée de ce cauchemar et ne peut vivre normalement.

Vendredi prochain, le 24 février, une soirée de soutien est organisée à Paris, en sa présence, avec prises de parole et un concert de Système D, sur la péniche ANAKO.

Voici le flyer et le communiqué de presse.
Soutenons Pinar Selek !

7 sur 9 des films nominés aux Oscars ne passent pas le bechdel test !

Grâce à une « tweeteuse » ce matin, j’ai pu voir cette video qui fait passer le bechdel test aux films nominés aux oscars 2011. Vous savez que je m’intéresse au « Bechdel test », ce test sur le sexisme des films. Pour qu’un film le passe, il faut :

-que deux femmes parlent dans le film, se parlent et parlent d’autre chose que d’hommes. Hier soir, je me faisais la réflexion, que le film de Stephen Frears que je revoyais, « Tamara Drewe », bien que proposant de nombreuses femmes qui parlent et étant soi disant consacré à un personnage féminin, réussissait la performance de donner de multiples scènes où des femmes se parlent -sans en laisser une où elles parlent d’autres choses que d’hommes (je me suis arrêtée au bout d’une heure, donc ne peut garantir qu’il n’y a pas une phrase dans les dernières 40 minutes).

Aux oscars donc, le résultat est : 7/9 !…ne passent pas le bechdel test  (dont 2 où une phrase pourrait presque…dans tout le film y arriver…).
Les deux seuls qui le passent sont « The descendants », et « La couleur des sentiments », qui est le seul à être « female centered » où le films est centré autour de personnages de sexe féminin.

Je vous laisse voir la video, en attirant votre attention sur la remarque à propos de Gertrude Stein dans « Midnight in Paris » de W.Allen : le réalisateur réussit la performance de dépeindre un personnage historique connu aussi pour être lesbienne, et ne trouve pas le moyen de lui faire s’adresser à une autre femme…

Et sur le fait que « The Artist » ne passe pas le test… Bref, les Oscars ne sont pas prêts d’être les OscarEs (ce que la statuette, d’ailleurs, ne viendra pas contredire cf photo).

Enjoy !

 

 

Lettre ouverte aux candidat-e-s à la présidentielle : mais qu’est-ce qu’elles veulent ?

Qu’est-ce qu’elle veulent ? C’est simple, le droit de vivre, de travailler, d’etre reconnue dans leur travail, de pouvoir sortir sans avoir peur, rentrer chez elles sans avoir peur, s’exprimer sans avoir peur. Elles veulent que la honte change de camp, pour cela il faut que la victime ne soit plus la coupable…pour cela il faut que partout, toujours, soient adoptées les politiques publiques nécessaires (pas seulement les lois, mais aussi les plans d’actions, les moyens, et la volonté politique) pour que les droits humains fondamentaux soient respecté-es pour les femmes, pour les étranger-es, dans notre pays !

Les associations féministes réunies dans « Féministes en mouvements, FEM », ont décidé d’envoyer une lettre ouverte aux candidat-e-s à la Présidence de la République en leur demandant de s’engager sur dix mesures urgentes. Le 7 mars, elles interpelleront les candidat-e-s à La Cigale. Et le 3 mars, elles publient un manifeste, tiré des rencontres d’été féministes de juillet 2011.

La voici, vous pouvez vous aussi la diffuser !

 

Envoyé spécial auprès des femmes de ménage

A Cnikel enquête, nous avons vu le reportage remarquable d’une demie heure qu’Envoyé spécial doit diffuser demain soir : « femmes de ménage, les nouveaux domestiques » et que je vous conseille de regarder.

Voici un coup de gueule de la rédaction : « femmes de ménage : le scandale ».

S.G