Plan de table : la réponse réjouissante de Christelle Raynal

Quand j’ai mis à la fin de mon article sur plan de table, film grand public où il est question des femmes sans tête, une question pour la réalisatrice (que je lui ai ensuite fait transmettre), je me disais bien que pour aborder un tel sujet, surtout si on vient de la publicité, il fallait tout de même l’avoir fait un peu exprès. Eh bien, Christelle Raynal m’a très vite répondu et suis très heureuse de sa réponse. Elle m’a fait très plaisir mérite que je la mette en avant, et que j’y re-réponde moi-même.

« HHhhhaaaaaa, c’est le plus bel article que j’ai lu sur mon film !!!! Bien sur que c’est fait exprès, mais pourquoi le dire aux gens de façon chiante à mourir, pourquoi ne pas enrober des choses fortes dans une forme légère !!! On vit dans un monde horriblement macho, mais on aime les hommes, sans eux…pas de bébés, pas de ticket pour l’éternité, ils ont besoin de nous comme nous d’eux MAIS la force musculaire en a décidé autrement donc à nous avec nos petits neurones d’y arriver l’air de rien. Derrière chaque grand homme il y a une femme… et bien si on pouvait une fois regarder ces fameuses femmes. Non ce n’est pas un hasard que je sois femme, non ce n’est pas un hasard que j’ai embarqué le scénariste dans les méandres de mon cerveau qui est une féministe convaincu mais qui a compris que” les chiennes de garde” n’était pas la solution !!! Oui, on peut montrer notre corps mais pitié qu’on n’oublie pas notre tête. Ce film cache tout ce que je pense, il faut juste s’y intéresser, c’est peut-être un défaut mais quel bonheur de voir ne serait ce qu’une personne le détecter. Donc, merci, merci, merci, je note juste que vous êtes une femme et la pire critique qu’on est faite de mon film était écrite par un homme… mais mon dieu alléluia il y a des hommes qui ont aimé PLAN DE TABLE et beaucoup de femmes l’aiment follement…comme moi ».

-Je suis vraiment ravie que de jeunes réalisatrices, qui plus est donc venant de la pub, s’emparent de la caméra pour faire passer des messages forts.

Seulement voilà. Autant je suis entièrement d’accord que plus on atteint de monde, mieux c’est, autant je crains que malheureusement, le fait que Christelle Raynal considère que c’est ici le meilleur article, montre que malheureusement, peut-être, il faut être féministe radicale pour comprendre le message au milieu d’une comédie légère…alors que d’autres, des spectatrices même, ont trouvé que les photos sans tête donnaient « un style »…

Et peut-être que le message passerait mieux auprès des Chiennes de garde, finalement…qui sont surtout desservies par l’image fausse que la société mainstream renvoie d’elle…car un peu comme celle-ci nous montre des femmes sans tête…des mortes, elle nous montre des féministes écervelées -ce qu’elles ne sont pas !

Je pourrais faire ensuite un long développement sur la question de la « force musculaire qui en a décidé autrement ». Pour celles et ceux qui me lisent, nous savons que même celle-ci est en grande partie construite. Que des millénaires de domination masculine ont encouragé un développement physique des mâles et un « containment » physique des femelles qui restent ainsi coincées : impossibilité de se défendre contre les violences masculines et nécessité d’être protégées (d’où contrainte à l’hétérosexualité, mariage, etc…)

Mais je préfère me réjouir que grâce à son film, Christelle Raynal fasse un pont entre nous et rende un dialogue possible. J’espère qu’il se poursuivra.

Enfin, je voudrais aussi m’arrêter une seconde sur cette phrase : « ce film cache tout ce que je pense, il faut juste s’y intéresser, c’est peut-être un défaut mais quel bonheur de voir ne serait-ce qu’une personne le détecter ». Cacher ce que l’on veut dire en effet risque de condamner à ne pas être entendue… à moins d’être, justement radicale et de ne plus rien cacher.
C’est une ironie qui donne à réfléchir. Pourquoi ne pas le faire ensemble, chercher ensemble comment trouver une forme plaisante et artistique, grand public, qui ferait passer un message aussi fort sur le fond sans avoir à le cacher ?
J’espère que nous aurons l’occasion d’en discuter…

J-7 je coupe le son, sauf pour de belles musiques

Pas besoin de commentaires. Entre-deux-tours mieux vaut avoir l’oreille sélective…voici ma sélection. Pour tenter de garder l’espoir…4 chansons, 4 touches de coeurs qui vibrent pour l’humanité…

D’abord, Melissmel.

Et puis, comme aujourd’hui c’est l’anniversaire de la première fois où les femmes ont eu le droit de vote, (29 avril 1945 aux municipales), un petit retour sur cette Marseillaise là…où l’on reparle des torts du sexe barbu… 😉

Ensuite le Chant des marais, chanté par Isabelle Longnus, parce que c’est une chanson d’espoir…et que l’air ne vous en sera pas inconnu !

Enfin, une éternelle, qui ne veut pas que revienne le temps du sang et de la haine…

Le crépuscule des dominants ? (DSK et autres)

En cette période, c’est l’hécatombe des dominants… qui s’enfoncent tous seuls.

Ainsi, ici même j’expliquais comment Marcela Iacub la juriste était allée tellement loin qu’elle s’était décridibilisée toute seule face à Muriel Salmona.

Ailleurs, il me semblait plutôt nécessaire de laisser le président sortant et bientôt sorti j’espère s’enfoncer de lui-même…

Enfin, il y a DSK. Qui réussit à faire son come-back entre les deux tours de l’élection présidentielle, dans un journal américain (il dira certainement qu’il ne voulait pas que cela paraisse à ce moment-là…), pour dire qu’il a été victime d’un complot. Alors que c’est son seul comportement qui est responsable de son écartement des affaires…car même s’il y avait eu complot (non pas que j’y croie), c’est bien parce qu’il l’avait rendu possible…

Je n’imagine pas qu’il croie que cela va servir la France, donc le candidat du parti dont il est issu, François Hollande, de déballer sa rancoeur. Il devrait savoir que cela ne peut faire qu’embarrasser son camp qui l’a trop soutenu trop longtemps. Il semble plutôt qu’il fasse ça « pour lui-même ». Ainsi quand le journaliste du New York Times, Jay Epstein, raconte leur entrevue, il fait part d’une interrogation : » Was it that, as a man of huge international renown used to being courted around the world, he perhaps felt he was invincible, a Master of the Universe? » « Est-ce que c’est cela, le fait qu’en tant qu’homme internationalement reconnu et habitué à être courtisé, il se sentait peut-être invincible, un maître de l’univers » ?

Il semblerait bien que oui, lui qui « ne doute pas qu’il aurait gagné l’élection présidentielle », et qui pense qu’il aurait eu de fortes chances de convaincre Merkel de sauver la Grèce…se prenne pour le maître de l’univers.

C’est clair. Un dominant ne renonce jamais. Et comme il croit que son impunité lui est dûe (cf les réactions de son ami BHL qui comprenait pas qu’on le traite comme n’importe quel prévenu), il est prêt à tout, même mettre en danger son pays, visiblement, pour conserver cette image de maître de l’Univers.

Il faut juste espérer que cela n’aura pas l’effet du pire.

S.G

Une remarque supplémentaire : un journaliste du NYT semble déterminé à suivre DSK et mettre en avant le maximum d’infos -peu probantes et interprétables- à sa décharge. Est-ce un hasard que ce soit un homme ? Une femme pourrait-elle simplement envisager de le rencontrer pour une interview ? Et quand aurons-nous une femme journaliste qui s’intéresse au sort de Nafissatou Diallo ? Et lui accordera au moins un peu d’importance ? Pour nous éviter de penser qu’encore une fois, elle n’était QUE femme, QUE noire, QUE immigrée, QUE femme de chambre ?

 

Iacub, Auschwitz et le viol

« Il y a des gens qui ont été à Auschwitz et qui ont été traumatisés et d’autres non ».

Oui, je sais, c’est choquant. Surtout quand c’est utilisé, tel le point Godwin, pour décridibiliser une femme qui lutte pour aider les victimes de viol.

Vous vous en doutez, ce n’est pas moi qui le dit. Vous savez qui l’a dit ?

C’est Marcela Iacub, la juriste.

Vous savez dans quel cadre cela a été dit ? Dans une émission d’une radio privée pour jeunes, en catimini ?

Non, dans l’émission de Finkielkraut sur France Culture.

Vous imaginez que ces propos ont fait réagir l’animateur, a priori très sensibilisé à la question ?

Non, il n’a même pas relevé.
Il faut dire que cela a été dit le plus vite possible. au détour d’une phrase, à un moment de tension dans une émission.

Ah, et aussi. Vous savez dans quelles circonstances cela a été dit ? C’était lors de l’émission, Répliques, intitulée « la domination masculine », où, pour parler du livre de Iacub « Une société de violeurs ? », Finkielkraut avait invité  en face de la juriste, Muriel Salmona, psychiatre psychotraumatologue et présidente de l’association mémoire traumatique et victimologie, avec qui je milite étroitement.

Cette phrase, a donc été dite, vers la fin de l’émission, pour essayer de discréditer le propos de Muriel Salmona, qui expliquait que la vie des victimes de viol est un terrain miné en raison des  troubles posttraumatiques. Marcela Iacub essayant de nous faire croire que Muriel Salmona « condamne les victimes » au malheur en poussant à faire reconnaître l’existence desdits troubles psychotraumatiques, à les identifier pour pouvoir les traiter.. Alors que bien sûr, c’est le crime de viol subi qui mine la vie des victimes, à moins qu’il soit pris en charge de façon appropriée. Ce qui est très exactement le combat que mène Muriel Salmona, forte de 20 ans d’expérience professionnelle et de son expertise scientifique.

Il faut dire que face aux arguments factuels et précis de Muriel, vers la fin de l’émission, Marcela Iacub n’avait plus qu’une solution : l’empêcher de finir ses phrases et, avec une méthode à l’efficacité éprouvée, faire dire systématiquement à la personne en face le contraire exact de ce qu’elle dit.

Plus c’est gros, plus ça passe ? La réalité, c’est que je crois que cela ne passe plus. Quand essayer de faire sortir de ses gonds son adversaire est le dernier argument qu’on est capable de produire, c’est qu’on est proche d’un aveu d’échec à débattre.

Ce que finalement je trouve très éclairant dans cette émission, c’est la posture de l’animateur, Alain Finkielkraut, qui cache à peine qu’il est à charge contre Muriel Salmona, reprenant une fois qu’elle a parlé à plusieurs reprises par « c’est vrai MAIS ». Dans la posture de l’homme terrorisé à l’idée de l’innocent accusé à tort, il a du mal à entendre que les victimes ne s’amusent pas à porter plainte à tout va, et essaie de ramener toujours la question aux mensonges de Nafissatou Diallo dans l’affaire DSK. Comme si ceux-ci avaient prouvé quoi que ce soit quant à la culpablité ou non de DSK.

Le viol conjugal, une violence non sexuelle ?

Enfin, il se livre, sur la question du viol conjugal, à une intervention surprenante. Je m’explique. Dans le cours du débat, Marcela Iacub affirme qu’elle ne comprend pas que le viol conjugal soit considéré comme un viol, pire, un viol aggravé (ce qui est le cas depuis une dizaine d’années, passible de 20 ans contre 15) : « je trouve absurde qu’on pénalise le viol entre époux », dit-elle. Parce qu’il faudrait certes, le pénaliser, mais pas comme de la violence sexuelle. C’est un viol, mais pas de la violence sexuelle….Sur ce, Muriel Salmona tente de lui faire expliquer comment peut ne pas être qualifiée de viol une pénétration obtenue par surprise, menace ou contrainte (définition légale du viol) sous prétexte que c’est dans le cadre du couple légal. Ce à quoi Iacub ne trouve rien à répondre.

C’est alors que l’animateur intervient :

« il peut y avoir une certaine difficulté. Les couples traversent des hauts et des bas. Des rapports consentis du bout des lèvres ou par fatigue ». Plus loin « la vie conjugale n’est pas un long fleuve tranquille ». Ce qu’il semble craindre ici, c’est que des femmes qui ont fini, par fatigue, par dire oui alors qu’elles pensaient non, qu’elles cèdent donc, et ne consentent pas, portent plainte ? Ne devrait-il pas s’interroger sur les raisons pour lesquelles un homme, fut-il un mari, s’autorise à se contenter d’un « consentement » par fatigue ? Je mets entre guillemets consentement, bien sûr, parce que même Iacub, qui place le consentement entre adultes au pinnacle, le reconnaîtrait j’espère : « céder n’est pas consentir ». Encore moins désirer.

La psychiatre qui reçoit depuis 20 ans des victimes a beau l’expliquer : les plaintes pour viol conjugal sont rarissimes, justement parce que les victimes ne réalisent pas elles-mêmes qu’il s’agit de viol, alors qu’elles ont parfois subi des sévices très importants. Il n’y a donc que très peu de risque d’abus de plainte pour un changement d’avis intempestif. En revanche, il y a tous les risques qu’une femme soit dès lors encouragée à céder, si le viol conjugal n’était plus reconnu…

Si Iacub milite comme elle le dit pour la liberté sexuelle ( selon elle « c’est la sexualité qui est dévalorisée et non pas les femmes » ), pourquoi alors ne veut-elle pas reconnaître que le viol conjugal est un viol ? Ce qui permettrait d’encourager une sexualité libre dans le désir et la valorisation réciproque, plutôt que d’encourager les femmes à céder sans désir, et les hommes à se contenter de cet abusif « consentement du bout des lèvres » dont parle Finkielkraut*.

Sandrine GOLDSCHMIDT

*on peut raisonnablement imaginer que les femmes, ayant déjà du mal à porter plainte et à dire non alors même que le viol conjugal est reconnu, le pourraient encore moins si l’on revenait en arrière de 20 ans. Et que cela  les découragerait un peu plus de faire respecter leur désir…tout en encourageant encore moins  les hommes à se poser a question de le faire…

Comme toujours, il y aurait encore énormément à dire, il y a aussi beaucoup à lire

je vous conseille la lecture

De l’explication de texte par Muriel Salmona elle-même : http://stopauxviolences.blogspot.fr/2012/04/la-domination-masculine-le-21-avril.html

de la note du blog « Féministes en tous genres » : http://feministesentousgenres.blogs.nouvelobs.com/archive/2012/04/25/le-sexe-a-l-etat-de-brut-e.html

Je remercie A.Schmitt de m’avoir signalé la citation qui fait le titre de cet article.

Et voici le lien vers l’émission, pour que vous puissiez vous faire votre propre opinion : http://www.franceculture.fr/emission-repliques-la-domination-masculine-2012-04-21#.T5JyBwBJ64h.facebook

Enfin, si cela vous intéresse, le programme des interventions de l’Association mémoire traumatique et victimologie

http://stopauxviolences.blogspot.fr/2012/04/emissions-et-debats-en-avril-et-en-mai.html

Plan de table, les femmes sans tête s’invitent au cinéma

Hier, je suis allée voir un film que je n’avais aucune raison d’aller voir : ..Plan de table, qui pouvait s’apparenter à une comédie romantique version femme, autour -évidemment- des péripéties d’un mariage. Je ne sais pas ce qui m’a poussée à y aller…mais je ne l’ai pas regretté  ! Non pour la réalisation du film…mais pour le propos, qui fait explicitement allusion à ce thème qui m’obsède…les femmes que le « complexe mode-beauté » dont parle Mona Chollet étête pour mieux vendre. Explication.

C’est un de ces films qui regarde comment un hasard (ici le plan de table à un mariage) pourrait changer les relations entre les 6 convives concernés. et nous donne 4 versions de la même histoire, de la plus imparfaite -le héros meurt d’un accident- à la plus « happy ending » : c’est le méchant (Dubosc) qui s’écrase en voiture -sans blessure. Un happy ending mérité parce que le bon choix d’un des personnages, a mis fin à la tyrannie du hasard et de la soi-disant impuissance de l’individu.

A la table, un galeriste, un photographe en quête de reconnaissance, une femme en quête d’amour. Les deux derniers se rencontrent et le premier par son regard photographique sur elle, lui rend un regard confiant sur elle-même…jusqu’à ce que le galeriste expose le photographe avec des photos de la dame qu’il a fait recadrer…sans tête ! On voit la jeune femme se découvrir déshumanisée, elle qui pour une fois se sentait une personne avec cet homme. Mais lui, n’ayant pu résister au diktat sociétal, la renvoie à l’objet qu’elle n’a jamais cessé d’être.

Alors, et le fait qu’une femme ait réalisé le film n’est peut-être pas hasard, dans une dernière version de l’histoire, celle qui autorise le happy ending, il est enjoint au photographe qui a cédé à la société, de faire un choix. Il refuse le recadrage des photos, et l’histoire peut finir en conte de fées. Car cette fois-ci ce n’est pas la mort qui triomphe, la jeune femme a désormais une tête…

La réalisatrice a-t-elle choisi consciemment cette façon de donner du sens à son histoire ? Est-ce -ici- un hasard ? A-t-elle voulu mettre un peu de politique féministe dans un film autrement très « mainstream », hétéronormé et classique ? Il y a peu de chances, d’autant que le scénario a été écrit par un homme (même si elle a semble-t-il été très impliquée et l’a fait réécrire pour que ce soit une comédie)… Est-ce que, malgré le formatage des imaginaires, des pensées et des films, la réalité de notre oppression, dès lors que c’est une femme qui réalise le film, transparaît – nécessairement- ? Ce film ferait-il du féminisme sans le savoir comme d’autres faisaient de la prose ?

« Plan de table » instillant au moins l’idée que tout n’est pas hasard et que l’individu est responsable de ses choix, je vais essayer de le demander à Christelle Raynal,  la réalisatrice, qui, et ce n’est pas sûrement un hasard, vient de la publicité…

Sandrine GOLDSCHMIDT

La fiche du film sur Allocine : http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=193908.html

Le Pen 18%, Hollande en tête : le pire est-il avenir ?

Une fois n’est pas coutume, je vais vous donner mon avis sur le premier tour de la présidentielle…je pense que le pire n’est pas forcément à venir, à condition qu’il perde le 6 mai (le pire). Et que les 18% de Le Pen n’en sont que l’expression. Avec la politique du pire, c’est un avenir sombre que le pouvoir sortant nous promet, et c’est des millions d’électeurs qu’il jette dans les bras de l’extrême droite.

Le score de Marine Le Pen  à 18%, ça ne m’étonne pas. Je ne crois pas que 18% des Français-e-s soient racistes. Je pense que la société l’est, mais pas d’une façon frontale et consciente.
En revanche, je ne crois pas que ce soit pour ses fondements nauséabonds de l’extrême droite la plus violente que la candidate a eu un tel score.
Je pense que c’est tout simplement un vote protestataire qui se porte sur une des seules candidates à parler d’un avenir pour le pays face à des gens désespérés par le nihilisme cynique du pouvoir sortant.

Et le problème, c’est que ce désespoir mène certain-e-s à ne plus avoir aucune confiance en la République dans sa composante ouverte et généreuse, et à se tourner vers un avenir qui est celui du repli sur soi, de la haine et de la France réservée à certain-e-s, en focalisant toutes les rancunes sur les autres.
Le problème, c’est que l’avenir de la France, cela doit être exactement le contraire de ça : pour que « les 30 glorieuses soient devant nous », comme le disent Karine Berger et Valérie Rabault dans leur ouvrage paru récemment, il faut une France ouverte, généreuse, qui sache investir et prendre des risques. Pour cela, il faut cesser d’entendre un discours sur : « nous sommes en crise, rentrez chez vous, détestez votre voisin et dîtes que c’est la faute au reste du monde qui agit contre nous ». Ce discours-là, c’est en premier celui du président sortant. C’est lui, sa politique, son discours et celui de ses sbires gouvernementaux qui l’ont créée (mais ils ne sont pas les seuls). LEUR politique est la première responsable du fait que beaucoup de gens soient prêts à voter pour le pire.

En ne cessant d’affirmer que le modèle français est dépassé, qu’on est en crise, il n’a fait qu’enfoncer le clou dans la tête du désespoir. Ce ne sont pas tant les faits objectifs de la crise qui comptent ici. C’est le modèle d’une société en mutation qui a du mal à prendre des décisions courageuses et ne propose aucun projet de cohésion sociale et d’amélioration de la vie quotidienne pour celles et ceux qu’on ne voit pas à la télévision gagner des concours idiots, ou obtenir beaucoup d’argent en ne faisant pas grand chose (je parle bien sûr de certain-e-s sporti-v-es, stars +/- fictives, des actrices qui gagnent des millions pour être l’égérie d’une marque). Ca pendant que la majorité essaie au prix de chômage de longue durée, boulots de plus en plus précaires, de joindre les deux bouts, avec des salaires qui ne sont décents qu’au regard de l’indécence absolue de nos mimina sociaux (je ne comprends pas personnellement pour quoi le RSA n’est pas au niveau du seuil de pauvreté…)

Ce n’est pas parce qu’il y a 18% de fascistes en France que Le Pen a eu 18%. La France a certainement une très forte part de racisme, d’antisémitisme et de sexisme en elle. Ca, c’est clair. Mais ce n’est pas ça qui se traduit dans le vote Le Pen. C’est parce qu’il y a des millions de gens qui ne savent plus où rêver leur vie, pas la vie vide de sens que nous montrent les médias, mais une vie où chacun, Français-e, étranger-e immigré-e, femme, homme,  a l’impression qu’il y a un sens à participer à l’effort collectif.

Alors je n’ai pas changé d’avis depuis que Hollande est candidat. Je pense qu’il n’est peut-être pas bien charismatique ni révolutionnaire, qu’il ne propose pas le grand soir…et qu’il faudra lui mettre la pression. Mais je pense que si la France des 5 prochaines années a cet homme, pas tout seul, et la gauche aux manettes (parce qu’il faut penser aux législatives !), il y a une toute petite chance qu’on entre sur une voie où les choses progresseront, au mieux de cesser de ne faire que se dégrader.

Ce sera dur, parce que dans les 10-15 dernières années, la confiance collective a été très fortement entamée. On ne sait pas encore, si le candidat en tête au premier tour, François Hollande est élu au second, s’il aura le courage nécessaire pour prendre, face aux partenaires internationaux, la voie annoncée. Mais ce qui est sûr, c’est que cela ne sera possible que si c’est lui qui est élu.

S.G

Aux arbres citoyennes…

Aujourd’hui, de retour du Lubéron. Je pourrais vous dire « allez voter », mais comme je n’ai pas dit votez machin, je ne vous le dirai pas : vous avez plus de 18 ans, ça vous regarde donc, si vous allez voter ou pas. Je ne vous ai pas dit « votez machin », et ne le dirai pas entre les deux tours, parce que je ne vois pas pourquoi vous auriez besoin de moi pour vous faire une idée…

Je pourrais plutôt vous parler de Muriel Salmona, psychiatre psycotraumatologue, qui travaille depuis plus de 20 ans avec des victimes de viols et les soigne, les aide à re-vivre, qui sait donc de quoi elle parle, et que Finkielkraut invite sur son plateau face à une femme dont le seul titre de gloire pour affirmer des choses aussi grave que « le viol, c’est les féministes qui le rendent grave » ou « le viol conjugal ne devrait pas être un crime », c’est d’avoir une tribune hebdomadaire dans Libération…ou »une amie qui a été victime de viol et ne le vit pas si mal ». C’est vrai, qu’une amie face à 20 ans d’expérience auprès des victimes de viol, c’est une preuve tangible…

Je pourrais enfin vous parler de toutes ces femmes sans tête que désormais je ne suis plus la seule dans la famille à voir partout…je sais que cela a manqué à certaines… et remarquer que dans une librairie à Banon, elles sont légion, surtout dans la collection « gossip girl » et « It girl ». Justement ces séries que Mona Chollet décrit dans « Beauté fatale » comme des archétypes du mal que fait aux femmes le complexe-mode-beauté…ce n’est pas un hasard. Après avoir lu Levinas et l’importance que l’humain accorde aux visages. Je pourrais vous dire que cette manière de nous représenter sans tête qui est l’apanage de ce monde de la publicité qui, comme le dit très bien Chollet, envahit l’art, qui nous étête et nous décervele…qui nous enlève notre humanité au profit d’objets futiles auxquels il nous est proposé de nous identifier…

mais comme je ne veux pas être déprimée ni vous déprimer, je vous dirai le contraire…que j’ai trouve au marché de Lourmarin (ville où Camus a fini ses jours) un livre de Michela Marzano sur la pornographie (et parle justement de la déshumanisation dans la pronographie) dont j’aurai sûrement l’occasion de reparler ici, et surtout, des mannequins pour présenter des vêtements : des femmes, aux cheveux courts, roux ou rouges, avec des têtes, et hilares ! Ah! que ça fait du bien !

Je choisis donc de vous montrer aujourd’hui toutes ces belles choses rassurantes : les femmes qui s’en-têtent, les merveilles de la nature, les chats qui se promènent dans les vieilles pierres, les marquis de triste souvenir dont le château en ruines à Lacoste surplombe un univers de beauté. Sa tête à lui, elle est là, en cage, et nous laisse le champ libre…des lieux, des arbres des souffles pour nous réapproprier nos vies…un beau programme pour aujourd’hui, non ?

S.G

Pause printanière

A dire d'elles en pause printanière...à très vite !

Abolition 2012 au divan du monde : la video !

Merci à Pascale pour les photos.
Merci à Typhaine pour son talent artistique et militant (elle a illuminé le divan)

Evidemment ici, personne ne se moque des personnes prostituées mais seulement des clients…et du système prostitueur qui veut nous faire passer des prostates pour des lanternes…

voici diaporama ET video de la conférence de presse de ce matin (pour l’instant je ne mets en video que le sketch la suite après…)

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Et donc, le sketch qui a commencé la conférence de presse

Et le sketch qui a fini la CP, avant les questions…petite leçon de plaisirs…

Abolir le système prostitueur, l’engagement qui changera la vie des femmes

Dommage. L’abolition du système prostitueur n’est pas dans les 40 propositions du candidat socialiste François Hollande dévoilées aujourd’hui à 11h, pile au moment où au Divan du monde, les abolitionnistes recevaient la presse pour leur expliquer pourquoi, cette mesure qui est dans le programme du Parti socialiste, est le signe de progrès humain, de plus de liberté et d’égalité pour toutes et tous. Et le seul moyen de rendre leur humanité aux femmes que le système chosifie par l’imposition d’une violence extrême !

Le programme d’abolition 2012 est simple :

-supprimer toute mesure répressive envers les personnes prostituées. Donc supprimer tout délit de racolage.

-cibler les personnes qui sont responsables de la prostitution : donc interdire tout achat d’un acte sexuel, et le faire appliquer en sensibilisant les clients aux violences qu’ils font subir et en les pénalisant par l’introduction d’une peine de l’ordre du délit  et de l’amende.

-proposer des alternatives à la prostitution par les soins, l’accompagnement, puis la réinsertion des personnes prostituées. Une politique ambitieuse mais qui peut très bien être inventive. Ainsi, l’Etat, s’il lutte efficacement contre le proxénétisme, pourra en récupérer une partie des profits -non pas au sien- mais à celui des personnes prostituées.

Tout cela, c’est ce que les associations signataires d’Abolition 2012 ont défendu ce matin, tout en faisant la preuve, avec humour et modernité, que c’est un combat d’avant-garde.

-avec le sketch écrit et joué par Typhaine Duch, qui met à mal tous les clichés qui ont la vie dure (visible dans quelques heures ici même)
-avec le film de la délégation de Paris du Mouvement du nid, visible ici : http://www.abolir.fr/
-avec les interventions de Femmes pour le dire, femmes pour agir, Maudy Piot qui a expliqué combien la volonté de certains d’introduire une légalisation du proxénétisme par le biais de l’exploitation de la souffrance des personnes en situation de handicap était dangereuse et n’était pas une solution en faveur de celles ci. Celle enfin de Zéromacho -des hommes qui se mobilisent pour dire qu’ils ne veulent pas violer des femmes contre argent, et de Christine Le Doaré et Jean-Claude, militants LGBT abolitionnistes.

En attendant les videos, vous pouvez lire le communiqué de presse comdepresse13 avril2012(1)

 

Sandrine GOLDSCHMIDT