Manif pour tous, abolition et manipulations tous azimuts

IMG_9980Je suis extrêmement choquée ce matin devant le titre d’un communiqué de presse de l’Inter-LGBT : « Manuel Valls défilera aux côtés de La manif pour tous dimanche ». Evidemment, le premier ministre ne va pas défiler dans les rues auprès de ce mouvement qui se développe sur des valeurs familiaristes et homophobes.

En revanche, il a accordé une interview à mon avis assez complaisante avec « la manif pour tous » en disant qu’il faut entendre les mécontentement. En revanche, ce qu’il y dit sur le fond n’est pas en soi un soutien à la manif pour tous. Et l’on assiste des deux côtés à des déformations de la réalité qui ne sont pas acceptables.

Quels sont les faits ? 

-Valls réaffirme le soutien au mariage pour tous

-Il dit -comme c’est le cas depuis un an- que pour la Procréation médicalement assistée (PMA) pour les lesbiennes, le gouvernement attend l’avis du comité national d’éthique

-Il réaffirme la volonté de la France d’interdire la GPA (grossesse pour autrui, forme de prostitution reproductive)

A aucun moment il ne dit qu’il va défiler aux côtés de la manif pour tous. Il ne dit pas non plus que la PMA restera interdite. En revanche, assimiler Valls à la LMPT, permet d’éviter un débat constructif et intelligent sur les questions fondamentales que pose la GPA. Et permet d’associer toute personne qui ne revendiquerait pas la GPA comme un droit promouvant l’égalité entre homosexuels et hétérosexuels à la Manif pour tous. Ce qui est absolument faux et scandaleux !

Le pire, c’est qu’associer les anti-GPA aux militantEs de la LMPT arrange ces derniers, puisqu’ils tentent eux-même de le faire par des procédés manipulatoires : ils utilisent les formules des abolitionnistes de la prostitution (voir photo) pour faire croire que leur combat est progressiste comme le nôtre.  Ainsi, peut-on lire « l’humain n’est pas une marchandise » (là où les féministes abolitionnistes disent « les femmes ne sont pas des marchandises ou le corps des femmes n’est pas une marchandise, soulignant le côté patriarcal central). Et « pour l’abolition universelle de la GPA. » Ce qui est évidemment calqué sur notre slogan « pour l’abolition du système prostitueur » mais n’a rien à voir. Ce qu’il faut, c’est abolir le système prostitueur, et interdire le recours à la GPA en fait partie. Utiliser nos formulations est une façon pour eux de nous associer à leur cause -alors que nous n’avons rien à y voir, et que nous défendons l’égalité de droits pour toutes les familles !

Il faut donc encore une fois redire quelle est notre position, sans les manipulations des uns ou des autres. 

-L’exploitation de la PMA médicalement peut poser des problèmes et on peut contester les conditions dans lesquelles on fait subir aux femmes -hétérosexuelles puisqu’elles seules aujourd’hui sont autorisées à recourir à la PMA en France- un « traitement lourd et difficile » pendant les « parcours PMA ». On peut dénoncer des éventuels trafics autour de la PMA, etc, comme on peut dénoncer les trafics qui entourent l’adoption… En revanche, il n’y a aucun problème sur le principe de la PMA, qui demande seulement à des hommes de fournir du sperme et permet à des femmes d’avoir des enfants.

Là où il y a problème, c’est que la loi française soit discriminatoire envers les lesbiennes. Il n’y a en effet aucune raison d’interdire aux lesbiennes d’avoir recours à la PMA si les femmes en couple hétérosexuel y ont droit. C’est alors de la pure discrimination et il faut donc qu’il y soit mis fin.

-En revanche, la GPA – qui pour moi est une forme de prostitution reproductive, est effectivement une marchandisation de l’être humain -des femmes, et des enfants. Dans un monde déséquilibré économiquement et sexuellement (les Occidentaux ont la puissance financière, les hommes ont la puissance du patriarcat), la GPA n’est pas autre chose que l’utilisation de femmes comme machines de production d’enfant qu’on exploite pour satisfaire aux « besoins » (non pas au sens irrépressible mais économique de ce que les gens veulent acheter) des personnes « en mal d’enfant ». Ainsi, des riches achètent des enfants à des femmes pauvres pour une bouchée de pain et les contraignent à, pendant 9 mois, porter leur enfant comme si c’était une voiture en cours de fabrication. Les femmes doivent éviter tout lien et attachement avec l’enfant, le lien créé par 9 mois de grossesse est totalement nié, elles sont exploitées 24h/24h et n’ont droit à rien (c’est dans les contrats qui se signent et qui peuvent être rompus si par exemple la femme a bu un verre d’alcool…). Ce qui peut constituer une forme de maltraitance envers les enfants à naître. Les enfants à naître ensuite, sont également dans ce cadre des objets marchands, qui n’ont eux-mêmes aucun droit. D’ailleurs, certains « acheteurs » n’hésitent pas à les abandonner si le « produit fini » ne leur convient pas.

Il est donc essentiel de remettre les pendules à l’heure. Manuel Valls ne défilera pas aux côtés de la manif pour tous et peut être le gouvernement manque de courage sur la PMA et est trop complaisant avec la manifestations de dimanche (ce qui est un très mauvais signe pour les personnes LGBT, je veux bien l’accorder). En revanche il ne fait que réaffirmer la politique du gouvernement  sur la GPA et il a instauré le mariage pour tous et toutes.

De la même manière, les féministes abolitionnistes n’ont rien à voir avec la manif pour tous et je trouve très choquant de laisser croire autre chose (les uns tentant de nous associer à leur combat, les autres s’arrangeant du fait que nous nous y soyons associés) et d’entretenir perpétuellement la confusion entre la PMA et la GPA pour faire passer toute personne anti-GPA pour proche de la Manif pour tous.

Au final, ce sont les pro-prostitution qui en tirent les bénéfices…

S.G

A lire sur la GPA : https://sandrine70.wordpress.com/2013/09/13/gpa-ou-lultime-forme-de-dissociation-marchande/

http://www.huffingtonpost.fr/anne-vigerie/droits-gpa_b_5925738.html

3 réflexions sur “Manif pour tous, abolition et manipulations tous azimuts

  1. Bonsoir, merci pour votre article, je voudrais cependant ajouter quelques remarques. Même s’il est vrai que les femmes sont les principales victimes du commerce des corps, il concerne l’ensemble des gens les plus pauvres, avec notamment le trafic d’organes, de tissus, de sang, etc. A ce sujet je recommande les travaux de Céline Lafontaine et son livre « Le Corps-marché ». La PMA avec dons de gamètes – spermatozoïdes ou ovules – pose également un problème bioéthique, même s’il est beaucoup moins grave que la GPA, au niveau de l’anonymat. Actuellement, des personnes nées de ces dons sont, elles aussi, privées de certains droits, l’accès à leurs origines génétiques, à une part de leur histoire, et surtout la connaissance d’éventuels problèmes médicaux héréditaires leurs sont interdits. Et cela n’a rien à voir avec le lien qu’elles ont avec les parents qui les ont élevées qu’ils s’agissent de couples lesbiens ou hétéros, et la qualité de leur éducation là n’est pas le soucis. Ces problématiques rejoignent effectivement celles de l’adoption mais sont toutes très complexes et différentes.

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