Le silence détruit ! il est politique

Pour vous annoncer la projection-débat de « Elle ne pleure, pas elle chante », un très beau film de Philippe de Pierpont d’après le roman d’Amélie Sarn, qui traite de l’inceste, au centre Wallonie-Bruxelles mercredi soir à 20h30,  j’ai envie de vous faire partager la postface qu’a écrite Sandrine Apers, présidente de l’association de luttre contre l’inceste et la pédocriminalité « Le monde à travers un regard »,  au témoignage de Melody Moore, « la force d’avancer »,

Elle montre que chaque témoignage est important, parce qu’il brise le silence, ce silence, qui détruit les victimes de toutes formes de violence et en particulier de l’inceste. Mais elle montre aussi que la mise en perspective politique de cette arme de destruction massive de l’avenir des enfants est fondamentale pour sortir du silence et faire avancer la société.

« L’inceste et le silence sont intimement liés, le silence et la mort également.

L’inceste c’est cela, le meurtre psychique d’un enfant ;

son identité s’en retrouve fracturée à jamais.

L’inceste se passe dans la famille, c’est ce qui le rend tabou.

Voilà pourquoi l’enfant se tait majoritairement.

La famille est normalement signe de sécurité et lorsqu’elle devient l’agresseur, comment l’enfant pourrait-il se construire avec des bases saines et solides, avec des repères et des limites?

Dans l’inceste, les rôles sont inversés.

Et pourtant, être victime d’une agression sexuelle dans l’enfance a des conséquences graves durant la vie entière.

Il est grand temps que notre société ouvre les yeux sur ces souffrances :

l’anorexie, la boulimie, l’alcoolisme, la toxicomanie, la prostitution, l’automutilation, les tentatives de suicide, le suicide, les troubles d’ordre sexuel, la dépression, la revictimisation, les troubles anxieux, l’état de stress posttraumatique, la maladie de Crohn, les difficultés professionnelles, les problèmes de couple, les difficultés à devenir parent, etc.

Les victimes sont trop souvent stigmatisées : on le voit à travers différents mythes entourant l’inceste, on cherche des excuses aux agresseurs. L’enfant n’aurait-il pas été séducteur ? Les victimes reproduiraient ensuite l’inceste…

Bref, on repousse ce qui dérange et tout cela sans aucun chiffre, sans aucune recherche scientifique…

En voici quelques exemples :

– Les agresseurs ont des pulsions irrésistibles : cette idée reçue a été infirmée par de nombreuses études. Les pères incestueux auraient des pulsions sexuelles normales. Il n’y a pas de pathologie propre à l’inceste.

– L’alcoolisme : l’alcool n’est pas la cause de l’inceste, il peut servir de prétexte pour excuser l’agression. De nombreux agresseurs ne sont pas alcooliques.

– L’éloignement dans le couple : plusieurs études précisent que la plupart des pères incestueux poursuivraient leur vie sexuelle avec leur conjointe et qu’aucun père n’aurait commis l’inceste parce qu’il n’avait plus de relation sexuelle avec sa conjointe.

– L’enfant menteur : les recherches rapportent plutôt la grande peur qu’ont les enfants à dévoiler qu’ils sont victimes. Dévoiler l’inceste et sortir du silence demande énormément de courage lorsquel’on sait que neuf fois sur dix, la famille tourne le dos à la victime.

Je pense régulièrement à cette phrase d’Hervé Bazin :

« C’est la parole qui est d’or, le silence est de plomb ».

Voilà pourquoi je suis admirative chaque fois que je croise le chemin d’une survivante de l’inceste.

Les victimes sont aujourd’hui des milliers (des millions?) à vouloir lever le voile de cette horreur qu’est l’inceste et que trop de gens encore refusent de regarder en face.

Voilà pourquoi nous pouvons tous remercier, victimes ou non victimes, chaque parole, chaque témoignage offert par les survivants de l’inceste, comme Melody.

Parce que c’est finalement grâce à eux que ce tabou pourra enfin un jour être levé. »

Sandrine APERS

Auteure du livre Etre parent après l’inceste.


 La bande-annonce du film

Mercredi soir, au centre Wallonie-Bruxelles, projection-débat de « elle ne pleure pas elle chante », soirée présidée par Muriel Salmona, de l’association mémoire traumatique et victimologie.

Les associations suivantes seront également présentes mercredi soir : -CRIFIP ,  –Innocence en danger , -L’Ange Bleu ,  Le Collectif Contre le Viol :,-Le Monde à travers un regard,SURVIVANTS INCESTE ANONYMES (SIA)SOS Inceste Maltraitance 

Centre Wallonie-Bruxelles, 20h30, 7, rue de Venise, Paris 4ème.

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