Césars 2020 : ce qui m’énerve le plus…n’est pas Polanski

Vous savez ce qui m’énerve le plus avec les Césars 2020 ?

Que Polanski soit nominé douze fois ? C’est odieux, certes, mais ce n’est pas ça.

Ce qui m’énerve, vraiment, c’est qu’encore une fois, il attire toute l’attention à lui. Alors qu’en même temps qu’il est nominé douze fois, un autre film, le meilleur film, en 2019 (according to me et beaucoup d’autres) est nominé dix fois, et qu’on n’en parle pas assez, alors que c’était une occasion rêvée de mettre en avant un film de femmes, et un autre regard sur les femmes.

Oui, Portrait de la jeune fille en feu est nominé dix fois. C’est le film le plus novateur, cinématographiquement et dans son propos, féministe, film qui révolutionne le regard sur les femmes au cinéma. Qui, comme l’a superbement dit Noémie Merlant (qui y fait une performance incroyable en Marianne) en recevant le prix de la meilleure actrice pour la presse internationale (voir ci-dessous), qui crée un imaginaire pour les femmes. Et pourtant, à cause de Polanski, personne n’en parle. Et c’est ça, qui m’énerve le plus.

Mon palmarès, pour rendre visible

Les féministes, ainsi que l’ensemble du cinéma français, ne devraient parler que de ça. Des nombreuses nominations pour ce film qui n’a pas eu la même promotion que les autres, ce film qui change les codes, renouvelle le cinéma.

Et au lieu de cela, c’est Polanski qui monopolise l’attention, et encore une fois, invisibilise le travail extraordinaire de femmes, de lesbiennes.

Alors, pour tenter de contrer ça (mais je me sens un peu seule), je reprends la liste des nominations aux César cette année et vous donne mon palmarès, de cinéphile autant que de féministe.

Meilleur film : Portrait de la jeune fille en feu

Meilleure réalisatrice/eur : Céline Sciamma (Portrait de la jeune fille en feu)

Meilleures actrices : Adèle Haenel et Noémie Merlant (Portrait de la jeune fille en feu) / Eva Green (Proxima)

Meilleure actrice dans un second rôle : Sara Forestier (Roubaix une lumière) qui fait une performance inouïe

Meilleur scénario original : Céline Sciamma (Portrait de la jeune fille en feu)

Meilleurs costumes : Dorothée Guiraud (Portrait de la jeune fille en feu)

Meilleure photographie : Claire Mathon (Portrait de la jeune fille en feu)

Meilleure espoir féminin : Loùana Bajrami (Portrait de la jeune fille en feu)

Meilleur premier film : Papicha

Meilleurs décors : Thomas Grizeaud

Pour le reste, je pourrais ajouter Roschdy Zem meilleur acteur dans Roubaix une lumière encore, mais comme je suis énervée, je mets l’accent sur ce palmarès encore une fois cinéphile, orienté certes féministe, mais pas plus orienté que d’autres…

Et je me prends à rêver que le soir des César, Portrait de la jeune fille en feu, Céline Sciamma, Adèle Haenel et Noémie Merlant notamment, obtiennent tous ces César là, pour qu’on ne parle plus de celui qui devrait enfin tomber dans l’oubli, et porter notre attention sur ce qui peut nous faire du bien…

A lire aussi sur le thème : Lettre à Adèle Haenel

Noémie Merlant aux Lumière 2020

Une réflexion sur “Césars 2020 : ce qui m’énerve le plus…n’est pas Polanski

  1. L’Académie des Césars est en crise comme de nombreux secteurs de la société française : fonctionnement opaque et très hiérarchisé, copinage et cooptation à tous les étages,contrôle étroit des instances dirigeantes par un petit nombre de petits chefs/chefaillons autoproclamés et indéboulonnables.Partout ou presque prévalent des structures de domination et de formatage des esprits dans la facilité de l’entre-soi.La parité entre les sexes n’est pas la panacée universelle qui résoudrait tous les problèmes comme par enchantement.LE problème est bien plus grave et profond :c’est l’absence de démocratie réelle et notamment de délibération,c’est le rétrécissement des libertés,en un mot c’est l’écrasement de tout ce qui surprend,étonne,émerveille.L’art cinématographique est évidemment la 1ère victime de cet état d’esprit,de cette logique stérilisante :la création implique une prise de risque,une certaine subversion de l’ordre établi et de la police de la pensée.

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