Pas de justice, pas de paix…aux assises de Créteil

Dans la province de l’Uttar Pradesh en Inde, quand la justice est impossible pour les opprimé-e-s et en particulier pour les femmes, d’autres femmes, par milliers, organisées par Sampat Pal prennent des bâtons et vont exiger que leurs droits soient reconnus. Qu’allons-nous donc pouvoir faire, en France, de semblable, pour qu’enfin la justice soit faite pour les femmes victimes de violences ?
En 40 ans, les féministes ont tout essayé. Elles ont réussi à faire changer les lois. Nous avons fait des campagnes qui permettent de libérer la parole.
Et pourtant, dans des affaires rien moins que de viols collectifs, l’impunité des violeurs reste quasi entière.
Alors oui, procédure de justice il y a eu, durant dix ans. Mais pour atteindre au même résultat : les charges ne seraient pas suffisantes, et la plupart des accusés relaxés. Christine Le Doaré explique tout ici sur son blog : http://christineld75.wordpress.com/2012/10/11/aux-assises-de-creteil-scandaleuse-indulgence-pour-les-violeurs/. Où la société patriarcale réaffirme que les victimes de viols sont moins importantes que les hommes qui les violent. Où les pires idées reçues criminelles sont reprises pour disculper les agresseurs. Où encore une fois, « la victime c’est la coupable ».
Un réflexion en plus de ce très bon article qui reprend les faits essentiels : la justice d’assises, à qui cela coûte cher d’organiser de tels procès, qui donne des peines de sursis de l’ordre de la correctionnelle à des violeurs, quel est donc son objectif ? Dire le droit, dire ce qui est juste, ou assurer la perpétuation du système d’impunité pour les violeurs ?Pour exiger que justice et réparation soient faites aux femmes, comme nous le faisions ici, nous continuerons à lutter.

Mais il nous faudra encore songer à radicaliser nos moyens (à la manière du Gulabi Gang), pour lever tous les obstacles que les défenseurs de cette société d’impunité mettent sur notre chemin.

Pas de justice, pas de paix !

16 réflexions sur “Pas de justice, pas de paix…aux assises de Créteil

  1. Partante aussi en soutien à toutes les victimes d’aggression et de harcèlement sexuel qui n’obtiendront jamais justice.

  2. Info supplémentaire extraite du Monde sur cette horreur : « Selon un avocat, les condamnés sont ceux qui ont reconnu avoir eu des relations sexuelles avec Nina en les présentant toutefois comme consenties. Parmi eux, le seul accusé à comparaître détenu. Il sera de nouveau jugé devant la cour d’assises du Val-de-Marne, du 2 au 6 novembre, pour l’assassinat de sa compagne et l’enlèvement et la séquestration de leur petit garçon en février 2010. » A ceux qui croiraient que la justice a été clémente parce qu’ils se sont repentis et ont changé, détrompez vous : déni et poursuite de l’horreur, c’est le seul visage que ces agresseurs ont montré à la justice. Organisons nous pour réagir. Oui, nous sommes excédées, oui, nous sommes en colère!

  3. « Mais il nous faudra encore songer à radicaliser nos moyens (à la manière du Gulabi Gang), pour lever tous les obstacles que les défenseurs de cette société d’impunité mettent sur notre chemin. »
    Aux bâtons, donc?

  4. Why not ? Certes, on ne détruit pas la maison du maître avec les armes du maître mais il arrive un moment où entre les grands principes (égalité entre les sexes) que l’on entend faire respecter aux barbares du sud et les actes et pratiques bien de chez nous (violences faites aux femmes, impunité pour le sexisme ordinaire, impunité pour les violeurs et harceleurs en tous genres, prostitution GPA que l’on va faire passer au nom de la non-discrimination entre les hétéros et les homos etc.) il va falloir trouver des moyens d’action plus radicaux que les calicots et autres banderoles

  5. Moi qui découvre à peine que je suis une personne, une personne qui a des droits,
    moi qui ne comprend pas encore les termes de dignité humaine, de droits humains fondamentaux,
    et cette justice qui embrouille tout…

    Du bruit, nous pouvons faire du bruit, la colère ça doit bien faire un peu de bruit, non?

  6. On se demandait ce que la justice française aurait fait à propos de DSK, cette justice a dépassé tout ce que l’on avait imaginé.

  7. Ironiquement, les viols collectifs sont aussi à la une en Inde aujourd’hui, avec la médiatisation d’une série de viols commis dans l’Haryana, état voisin de l’Uttar Pradesh, et de suicides commis par une victime ou par le père d’une victime.

    L’Haryana est soumis à un double système de pouvoir, le pouvoir régulier (celui de la République indienne fondée en 1948), et le pouvoir traditionnel patriarcal incarné par le système des khap-panchayat locaux qui font régulièrement l’apologie des crimes d’honneur, et préconisent de baisser l’âge du mariage pour réduire les viols…

    Le pouvoir régulier est quant à lui cynique et grevé par la corruption, et l’intervention de Sonia Gandhi ne peut faire oublier que son parti au pouvoir ne fait pas grand chose pour faire basculer la culpabilité des victimes vers les coupables lors des procès.

    http://palomasharma.wordpress.com/2012/10/11/child-marriage-a-license-to-rape/
    http://palomasharma.wordpress.com/2012/10/09/a-life-in-fear-why-does-rape-makes-the-politically-correct-cry/

  8. Et ne parlons pas de l’opération de réhabilitation de DSK qui bat son plein en ce moment.
    Exit tous ses procès !
    Si personne ne réagit, il est bientôt au ministère de l’économie et des finances et s’il viole un petit peu une stagiaire qui ne l’a pas entendu venir derrière son dos pendant qu’elle faisait la fermeture des bureaux, l’affaire sera si bien étouffée cette fois que rien ne transpirera. Il ne faut pas croire qu’ils écoutent quoi que ce soit venant des féministes.
    Ils font juste semblant.

  9. Pensez-vous réellement que la justice française ait couvert les crimes de jeunes gens pauvres issus des plus pauvres ? Pourquoi cette indulgence à l’égard de ceux qu’elle ne se gêne pas pour emprisonner même à titre préventif (souvenez-vous donc du traitement judiciaire des émeutes de 2005 )? Pouvez vous écrire sans honte que la justice française si intraitable avec les enfant de l’immigration post-coloniale les couvre en l’espèce ? elle couvrirait un tel crime alors que ces jeunes gens des cités ghettos ne sont soutenus par personne , ont une image médiatique et sociale négative et sont présentés régulièrement comme de véritables ennemis de l’intérieur .

    je pense au contraire pour que cette justice ait acquitté ces jeunes gens, le dossier devait être horriblement vide.

    Quel sont les pièces du dossier qui vous permettent de vous prononcer dans cette affaire ?

    Omar.

    1. @omar
      Effectivement, si les accusés de viol sont effectivement à 90% de milieu populaire (http://www.inegalites.fr/spip.php?article1528&id_mot=43), le taux de condamnation reste extrêmement faible, et les 1,5% mentionnés par Sandrine de taux de condamnation pour viol, semblent donc aussi épargner de manière assez évidente également les hommes des classes populaires. Pour expliciter, on peut supposer que les hommes des classes populaires sont condamnés un peu plus (puisqu’il y en a bcp) au dessus de 1,5%, et le reste des hommes privilégiés, beaucoup moins (puisqu’il y en a peu), ou échappent quasiment totalement à la justice (la moyenne des deux faisant 1,5%).
      Mais dans tous les cas, comme le rappellent de multiples commentaires, cette injustice relative entre hommes de milieux sociaux différents n’empêche en rien l’injustice de la justice à propos du viol et de ses nombreuses victimes; que ce soit à 1,7% ou 0,1%, c’est ridiculement bas (en outre condamner une justice inique comme celle-là n’empêche pas de militer pour une meilleure détection des victimes de viol et leur aide dans les milieux aisés).

  10. Je connais en effet les chiffres qui disent l’injustice qu’est la justice en France pour les femmes victimes de viol, et l’impunité générale des violeurs en France, quelle que soit leur origine géographique ou sociale, même si en effet, les « cols blancs riches » en ont peut-être une plus grande.
    Si en effet les jeunes des cités ghettos sont beaucoup trop facilement mis en prison pour rien, ici l’analyse des chiffres nous suggère un fait : de défendre la domination masculine, et de couvrir des crimes : en Quant, alors que 150.000 femmes et enfants sont violé-e-s chaque année, il y a moins de 1,5% de condamnations pour viols, on ne peut que constater que la justice n’existe pas pour les femmes.
    Autre fait important : pour les meurtres, c’est un sur deux (et surtout quand ce sont des homicides d’hommes)
    Ainsi, votre interprétation du verdict est tirée d’interprétations sur la façon dont la justice française juge des hommes, mais ne prend pas du tout en compte -comme c’est étonnant- la façon dont les femmes en France et dans le monde n’ont pas droit à ce que justice leur soit rendue.
    Que vous disiez « le dossier devait être vide » montre que vous n’avez rien lu sur cette affaire ni ne savez rien sur la façon dont se déroulent les enquêtes et les procès pour viol en France. Je vous suggère donc de lire mon prochain article qui vous donnera des références.

  11. @Omar
    Quand un dossier n’a pas été constitué… il est peut-être moins plein qu’il ne devrait, et la justice est en question pour faute grave à l’origine.
    Mais des violées ne portent pas plainte après de tels actes de barbarie que sont les viols collectifs, sans raison : leur vie est devenue un enfer dont elles doivent sortir (ou essaient de sortir) avec l’aide des moyens d’un Etat de droit.
    Il ne faut pas déplacer le problème en faisant du misérabilisme qui porte sur d’autres sujets ou problèmes liés à des conditions différentes.
    Il s’agit ici de viols. Les auteurs qu’ils soient riches ou pauvres, blancs, jaunes, gris ou noirs ont commis des crimes .

    @ les autres
    Une manifestation en brandissant des manches à balai , variante de la manière des femmes de l’Uttar Pradesh ?

  12. Que les choses soient claires ,je ne chercher en aucune façon à justifier l’intolérable ni à jouer les « misérabilistes » (même si je récuse la teneur péjorative de cet adjectif visant à déligitimer mon propos).

    Vous ne répondez qu’ en terme sociologique : vous n’abordez en aucune façon des éléments précis et tangibles de l’affaire qui justifieraient à eux-seuls non seulement votre-juste- indignation face un jugement inique et scandaleux mais qui appuierait alors vos données sociologiques. C’est par l’inverse que vous agissez.

    Vous vous emparez de cette affaire et vous décidez, sans vous appuyez sur le dossier , de la faire correspondre à vos analyses déjà préconçues sur « le système de l’impunité des violeurs  » .C’est cela que je vous reproche.

    Soit vous avez des éléments qui vous permettent d’écrire que ces jeunes gens sont en effet des violeurs et bénéficient de la complicité ou de l’indulgence de la justice française alors décrivez-nous ces mécanismes qui lient ces jeunes gens avec cette justice française.

    Soit par idéologie vous les diffamez sans ambages et seriez alors passible d’injures publiques ,mais soyez tranquille personne jamais ne songeraient à défendre l’honorabilité de ces exclus de tout.

    Dans l’attente de vous lire ( quand j’ai exposé cette suite d’interrogation madame Le Doaré n ‘a pas voulu me répondre et m’a censuré)

    Omar

    1. Je vous recommande juste la lecture de cet extrait de Libération.
      qui ne brille pas par son féminisme :
      Cela paraît peu pour un crime – le viol en réunion – passible de vingt ans de prison. Cela paraît dérisoire lorsque l’on a écouté les récits de Nina et Stéphanie (1). Lorsqu’on les a entendu raconter ces hommes qui «faisaient la queue», parfois à cinq, parfois à dix, parfois à quinze ou vingt, attendant «leur tour» dans des cages d’escalier glauques ou des caves immondes, leur imposant fellation, viol anal, viol vaginal, à la chaîne. Cela paraît rien pour qui a pu lire certaines déclarations des accusés lors de l’enquête où, se dénonçant les uns les autres, ils avaient donné de nombreux détails qui avaient permis de valider leur implication et les déclarations de Nina et Stéphanie.

      Que s’est-il passé pendant ces quatre semaines de huis clos ? Les accusés ont nié, revenant sur l’intégralité de leur témoignage aux policiers. Certains ont affirmé qu’ils n’avaient rien fait. D’autres qu’ils avaient eu avec les deux jeunes filles, alors âgées de 16 ans, des relations «consenties». «Consentie», une sodomie dans une cage d’escalier avec un garçon croisé pour la première fois deux minutes avant. «Consenties», même spontanément «proposées», des fellations à des garçons rencontrés juste après avoir subi un viol collectif par des dizaines d’autres garçons. Nina et Stéphanie, a expliqué un des accusés à la cour d’assises, étaient «les plus grosses putes de Fontenay». Malgré les coups, malgré les brûlures de cigarettes, elles étaient «volontaires», elles «aimaient ça». «C’est ce type de défense, répétée durant tout le procès, qui a précédé ce verdict», soupire Laure Heinich. Qui non, décidément, ne trouve pas moyen d’«expliquer».

      Et lisez donc mon nouvel article, qui vous explique très clairement ce qui pose problème. Rien ne vous empêche par ailleurs de vous renseigner et d’essayer de nous montrer que vous n’êtes pas idéologue en disant que la justice forcément, parce qu’il s’agit d’hommes des ghettos, serait juste.

  13. Un des accusés déjà coupables d’un féminicide conjugal… Cela est des plus significatifs !

    Tous les moyens de droit ne sont pas encore en place. Les féminicides ne sont nullement vus et interdits ! Le féminicide du gynocide indien est appelé « female genocide » et attend lui aussi d’être reconnu.

    Tant que le tabou social ne sera pas, au moins, annoncé à la face de tous… à divers degrés, partout, les féminicides resteront tolérés.

    http://susaufeminicides.blogspot.fr/2012/01/definitions-feminicides.html

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