Pauvres hommes chinois !

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NB, si jamais ce n’était pas clair : ce texte n’attaque pas particulièrement la réalisatrice qui a fait un gros travail de reportage et espère certainement dénoncer une situation, ce que les dix dernières minutes font en partie. Mais c’est la « recette » de ce que, pour rendre un docu visible en patriarcat, il faut surtout qu’il présente le monde à l’envers. C’est le point de vue qu’il faut adopter pour faire accepter qu’on en parle  ou être « original ».

Vous voulez la recette d’un « bon documentaire » ?

Regardez : « la peine des hommes », en replay sur Arte. 

Un sujet vous intéresse : le déficit de femmes en Chine. Un bon sujet direz-vous ? Faire une vraie enquête de terrain, mettre à jour les violences faites aux femmes que cela entraîne (ce qui existe en vrai dans le film) ? Mais non, cela ne suffit pas. Comment le traiter pour que cela ne soit pas trop tarte à la crème, ni trop féministe, c’est-à-dire vraiment pas fun ? Il vous faut réfléchir encore un peu.

Réfléchissons donc. Ce « déficit » de femmes est dû, bien sûr, à l’avortement sélectif pratiqué au moment de la politique de l’enfant unique (1979-2015). Cette politique + la tradition qui veut qu’une famille ait un héritier mâle qui puisse aussi nourrir les parents pour les vieux jours, voici un cocktail détonant pour éliminer les femmes (1).

Donc, en bonne logique (mais apparemment, personne n’y avait pensé au départ !!!), au moment où 25 ans plus tard, les jeunes garçons nés de ces familles, arrivent en âge de se marier, oh choc : il manque de femmes ! Or, vous le savez, les hommes ont des besoins irrépressibles. Ils ont besoin de posséder une femme. Cela fait partie de leur virilité.

Je vous imagine, vous auriez pu penser que cela allait « donner plus de valeur ou de respect » aux femmes, qu’il faudrait conquérir. Mais dans ce cas, c’est que vous seriez très naïf ou naïve, ou vous croiriez que la domination masculine et le patriarcat n’existent pas…Donc, la vraie conséquence, que ce soit en Inde ou en Chine (1), est bien la suivante : on vole, viole ou achète des femmes en développant un trafic international. Des millions de femmes qui ne naissent pas, des millions de femmes violentées, exploitées, marchandisées, qui souffrent. C’est tellement banal. Rien de nouveau sous le ciel patriarcal. Pas de quoi faire un film !

Continuez à chercher une bonne idée.  Ah, ça y est ? vous avez trouvé ? Il suffit de mettre le monde à l’envers. S’il manque de femmes, alors, on l’a dit, les hommes sont seuls. Mais c’est terrible ! Que n’y avions-nous pensé plus tôt? On les a laissé naître, mais on ne leur donne pas leur dû ! Une femme à posséder ! Alors forcément, ces pauvres hommes sont bien malheureux ! Désespérés, même, nous explique en ouverture spectaculaire de ce film exceptionnel, un industriel bien malin qui a décidé d’apaiser les souffrances de ces pauvres célibataires chinois en leur fabriquant des poupées grandeur nature.

Car il faut faire quelque chose. Ce désespoir des hommes est, dit-il, à l’origine d’une crise qui menace la stabilité du pays. Et le commentaire de nous dire : « les chiffres donnent raison à l’industriel ».

Comprenez bien. C’est la surenchère. Nos pauvres hommes, qui ont de la peine, donc. Oui le documentaire s’appelle très justement « la peine des hommes » c’est quand même beaucoup plus intéressant que l’élimination systématique des femmes, qui ne serait pas fun. Peine des hommes – male tears, c’est ça ? -les féministes comprendront(1).

Ecoutez les :

« à force de ne pas trouver de femme, je sens mon coeur…vide ».

A propos de ses co-villageois qui ont acheté une femme à l’étranger : « Ils ont mon âge. Eux vivent, et moi, je cherche toujours une femme ». 

Et le commentaire : ces hommes sans femmes, les Chinois les appellent les branches mortes, qui ne porteront jamais de fruits.

J’espère que vous pleurez, là.

Donc, nos pauvres hommes montrés ici, doivent travailler dur, et même quitter leur village, pour espérer un jour gagner assez d’argent pour qu’une femme les accepte. Les PAUVRES !!!

Mais ce n’est pas fini : ils doivent donc travailler à l’usine, et pensez-vous qu’ils sont plus heureux ? Mais non, car les femmes ne veulent pas toujours d’eux, s’ils n’ont pas assez d’argent. Bien sûr, cela doit être pour cela que le nombre d’agressions sexuelles augmente sur les lieux de travail,  La violence des hommes contre les femmes n’y est pour rien…

Et la direction de regretter que les femmes y soient moins majoritaires (à l’usine, pour bosser comme des bêtes), qu’avant.« les hommes sont moins précis, ils apprennent moins vite. on a de plus en plus de problèmes de discipline. ils se battent tout le temps » (sic)

Ce n’est pas parce qu’on est dans un système qui encourage les hommes à ne pas se sentir mâles si ils ne possèdent pas une femme, mais non, c’est parce que leur coeur est vide, nous vous l’avons dit.

« Leur frustration et leur solitude, il les comblent avec leurs téléphones portables ». 

Et pas qu’avec les téléphones portables (en regardant de la pornographie, summum des violences contre les femmes ?). D’autres hommes pleurent, eux, parce qu’une femme, ils en avaient une. Mais on leur a volée. Il y a des trafics de femmes de plus en  plus importants. La police chinoise s’emploie, bien sûr, à empêcher cela, nous montrent des images. On nous montre même que parfois ils arrêtent des trafiquants. Ou peut être des maris voleurs ? Des hommes criminels ? Mais non, ce ne serait pas une bonne recette. On nous montre deux femmes, intermédiaires trafiquantes arrêtées, c’est beaucoup plus intéressant (là, le docu n’est pas en cause ce sont peut être les seules images données par la police chinoise mais ça revient au même).

Mais j’exagère : le documentaire dénonce incontestablement le trafic, il faut le reconnaître. Il est même un peu trop direct je trouve. On pourrait croire que les femmes sont les victimes. En tout cas, c’est ce que ceux qui ont rédigé le résumé qu’on trouve sur le replay ont du penser, car il est tout de même un peu plus proche de la réalité :

« De désespoir, certains kidnappent des femmes. »

Vous comprenez, c’est pas de leur faute, c’est le désespoir…

« Je me sens moins seul. Ca y est, je suis heureux »

Dernière partie du documentaire, la « love story », le « happy end ». Un jeune homme,  qui était donc désespéré de ne pouvoir donner d’héritier à sa famille, car il habite dans un village de célibataires, a économisé avec sa famille pendant plusieurs années. Enfin, il a amassé assez d’argent pour s’acheter une femme en Indonésie. Cette jeune fille, c’est Lai. Aux grand maux les grands remèdes, et vous n’allez pas nous embêter avec des idées comme « les humains ne s’achètent pas » . C’est beau de voir son regard amoureux. A lui. Son émerveillement, quand, alors qu’il allait la chercher et avait promis de l’argent aux trafiquants et au père de Lai, « elle a dit oui ». Quel formidable preuve de consentement et d’amour qui met fin à son calvaire ! Il conclut donc : « je me sens moins seul. Ca y est, je suis heureux ».

Et elle ? Encore une question mal placée. Même si, là, le documentaire ne l’esquive pas. Elle, nous dit-on, on l’a convaincue que ce serait une vie moins dure qu’en Indonésie. Et puis, comme ça, son père a reçu de l’argent, alors en plus, elle fait une double bonne action:  mettre fin au désespoir du célibataire, et nourrir son père.

Evidemment, elle n’a jamais quitté son pays, elle parle un peu chinois mais pas le patois local, et on ne la laissera certainement jamais revoir sa famille, nous dit-on, alors qu’on la voit, le regard perdu. On verrait presque à cet instant la perle d’une larme dans ses yeux.Le commentaire alors, laisse poindre une critique vaguement féministe :

« combien de femmes achetées, de vies volées, avant que ces campagnes mettent fin à la tradition, laissent vivre les filles » ? (…) et de finir , pour commenter la fin de la politique de l’enfant unique :

« peut-être se souviendront-ils alors de cet autre proverbe chinois : les femmes portent la moitié du ciel »

Ah mais non, vous allez gâcher le happy end ! Ca ne va pas du tout cette fin… c’est le féminisme qui envahit nos écrans, là ! Non mais pas grave. De toutes façons, le résumé (3) et le titre sont là pour bien vous rappeler ce que vous devez retenir d’une bonne propagande patriarcale. Ne pas développer de l’empathie pour la souffrance des femmes, mais bien se soucier de  « la peine des hommes ». N’oubliez pas !

S.G

(1) NB c’est la même chose « à l’envers en Inde » : en Chine, on ne fait pas de filles car on a besoin d’un garçon pour ses vieux jours. En Inde, on ne fait pas de filles car il faudra payer la dot pour qu’elle aille à la famille d’un autre…

(2) male tears est une expression qu’on utilise pour souligner quand les hommes (sans par ailleurs se préoccuper de plaindre les femmes) se plaignent d’être eux mêmes des pauvres victimes, du patriarcat, des féministes, etc…

(3) » Des millions de jeunes célibataires affluent vers le sud du pays, et travaillent nuit et jour dans les usines du Delta des Perles, l’atelier du monde, tout en tentant de trouver l’âme soeur. Mais, là aussi, les filles se font de plus en plus rares. De désespoir, certains kidnappent des femmes. D’autres partent s’en acheter une à l’étranger. Des Birmanes, des Vietnamiennes, des Indonésiennes « importées » en Chine. Alors que la Chine vient de mettre fin officiellement à 35 ans de politique de l’enfant unique — grandement responsable de ce déséquilibre entre les sexes — des célibataires, broyés par cette impossibilité mathématique de trouver une femme, témoignent et nous emmènent au coeur du trafic, prêts à tout pour ne pas rejoindre les rangs des célibataires endurcis. Ceux que les Chinois appellent « guang gun », les branches mortes, qui ne porteront jamais de fruits ».

Arrêtez de nous tuer ! #8mars

Capture d’écran 2016-03-08 à 11.07.38Aujourd’hui, je publie le cri et l’appel d’une femme, Pauline Arrighi, militante féministe, à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes,. Un cri contre les violences commises tous les jours à notre encontre à travers le monde. Un massacre, dont les auteurs sont toujours des hommes. Merci à elle.

 

« C’est le 8 mars aujourd’hui, et comme je suis une femme, on va me proposer des roses et des réductions sur le maquillage et les strings. On va me souhaiter bonne fête.

Non, je ne passerai pas une bonne fête, pas cette année non plus.

2016 n’a que deux mois et une semaine, et je voudrais faire un bilan. Il est trop tôt pour un bilan de l’année? Pourtant, on peut déjà parler de massacre.

5 femmes tuées par balles, 6 femmes poignardées (pour l’une d’elles, de 120 coups de couteau dans le corps, une autre a été tuée sous les yeux de sa fille de 6 ans), 3 femmes égorgées ainsi que les 2 enfants de l’une d’elles, âgés de 6 ans et 10 mois, 2 femmes violées puis étranglées, une autre étouffée.
Par un mari ou un “compagnon jaloux”, ou par un ex qui “ne supporte pas la rupture”.

Messieurs les tueurs, Ingrid, Géraldine, Marina, Elvira, Chantal, Sylviane, Fabienne, Sonia, Tatiana, Nathalie, Jocelyne, Carine et cinq autres femmes anonymes ne méritaient pas la mort.

Selon vos propres dires, vous les avez tuées parce qu’elles ont voulu vous quitter,

vous étiez jaloux, colérique… violent ?

Dans la majorité des cas, les femmes tuées par leur conjoint ou ex avaient porté plainte pour des violences conjugales. Elles étaient en danger de mort et elles le savaient. Leurs enfants aussi étaient en danger. Humiliées, menacées, frappées, violées, terrorisées. Si elles restent, c’est la mort. Si elle partent, c’est la mort.

A partir de combien de femmes tuées pourra-t-on parler de massacre ? Une par jour, dix par jour ? Chaque victime a son bourreau, chacune est isolée, enfermée dans un foyer qui était pour elle une prison et une chambre de torture. Ignorée par la police qui n’y voit que des chamailleries de couple, puis dénigrée par la Justice qui conclura à un “crime passionnel”. Chacune n’aura droit qu’à un article dans la presse locale.

Chaque victime est isolée, et pourtant chacune est tuée par la même rage de possession, la même hargne à faire d’une femme sa chose. Non, quand un homme tue sa femme après l’avoir torturée pendant des années, ce n’est pas un “drame conjugal dans un contexte de séparation”.

Comment appelle-t-on, dans le langage courant, un homme qui

-pense que sa femme peut être traitée comme sa bonne, son objet sexuel ou son punching ball ?
-pense que si elle le trompe, il doit “laver son honneur”, éventuellement dans le sang ? On appelle ça un macho.

Et un homme qui tue une femme par rage de la posséder est un criminel machiste, comme il y a des criminels racistes, antisémites ou homophobes. La haine des femmes, de celles qu’ils considèrent comme “leur” femme, est meurtrière.

Le massacre des femmes en France peut être empêché. Si les femmes victimes de violences masculines sont prises en charge et protégées avant qu’elles ne soient tuées. Si la police, la Justice, mais aussi le voisinage, c’est-à-dire nous-mêmes, se rendent compte, enfin, que la violence d’un homme contre sa compagne ou son ex n’est pas de l’amour, mais de la haine, et que cette haine tue.

Pour le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, prenons la décision de mettre fin à un massacre. Prenons la décision de conquérir notre droit à vivre réellement libres
Chaque femme a le droit de quitter son compagnon, d’en changer tant qu’elle veut, aucune n’est la propriété d’un homme, quelle que soit la relation qui a pu les lier dans leur passé.

Aujourd’hui, en France, une femme qui dit à un homme : “je ne t’appartiens pas” risque la mort. Au nom des mortes et des vivantes, au nom de nos filles, de nos sœurs et de nous-mêmes, j’ai envie de crier : laissez-nous accepter ou refuser, rester ou partir, et surtout : arrêtez de nous tuer !

Pauline Arrighi

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Photo en haut: panneau « inser » dans Maso et miso vont en bateau, de Delphine Seyrig, Carole Roussopoulos, Ioana Wieder et Nadja Ringart.

Photo en bas : pastel « pas de justice pas de paix », ©Sandrine Goldschmidt

Mon corps a-t-il un sexe ?

 

Pioneer_plaque_humans.svg_Ma carte d’identité me le dit : je suis de sexe féminin. Une « femelle de l’homme ». C’est la définition de femme dans le dictionnaire. J’ai les cheveux longs, une poitrine, un visage fin. Pas de doute, ça se voit, je suis une femme ! Si je me mets nue, vous verrez que j’ai un large bassin, je n’ai pas les épaules larges. Et une vulve poilue. Je suis plus petite que les hommes. J’ouvre la bouche, au téléphone, vous me dites « bonjour madame ». Aucun doute, je suis une femme. je m’exprime, j’agis : je suis douce, fine, je ne m’agite pas dans tous les sens. Je suis donc une femme. Ah bon ? Vraiment ? Vous êtes sûrEs ?

Reprenons les éléments ci-dessus. Oui, sur ma carte d’identité, c’est marqué. Je suis une femme. J’y reviendrai.

Les cheveux courts : l’anti-nature

J’ai les cheveux longs. Voilà que Samson, personnage biblique mythique ne verrait rien de genré à cela. Il s’agit seulement de bon sens : les cheveux longs, ça donne de la force. Ou pas. En tout cas, j’ai aujourd’hui les cheveux longs, c’est féminin. Cela l’est d’autant plus que les hommes n’ont plus les cheveux longs. Comme si la remise en cause du genre leur faisait craindre qu’on ne les confonde. Alors ils recourent à cette pratique tout à fait anti-naturelle (mais le masculin, n’est-ce pas ce qui rompt avec la nature…) qui consiste à se couper les cheveux pour qu’on voie bien qu’ils sont des hommes.

J’ai une poitrine. Certes. Mais je pourrais aussi ne pas en avoir. Les femmes qui n’en ont pas ou presque sont légion. Et les hommes qui en ont ne sont pas si rares.

Mon visage est fin. Bien. Mais regardez bien. Si on m’y met des cheveux courts, excluez-vous vraiment de vous tromper ? Combien sont les personnes pour qui, si on enlève la barbe et qu’on fait la même coupe de cheveux, on reconnaîtra si c’est un hommes ou une femme ?

J’ai un large bassin. Ah bon ? Nous entrons là dans le pur fantasme. En effet, vous avez déjà conclu des critères précédents que je suis une femme. Vous en avez donc certainement conclu que j’avais un bassin large. Celui-ci s’est bel et bien élargi quand j’ai été enceinte. Mais depuis, il a repris sa « largeur habituelle ». Mon bassin n’est pas très large. Pourtant, vous l’avez toujours entendu : les femmes ont un bassin plus large. Savez-vous d’où vient cette observation, si « consensuelle » ? Du 19e siècle. Quand on a reproduit pour la première fois deux squelettes mâle et femelle, dessinés dans un ouvrage, l’un à partir d’un modèle homme, l’autre à partir d’un modèle femme. Il semble à les voir que la femme a le bassin plus large. Mais figurez-vous que les deux bassins sont identiques ! Ce qui donne cette impression, c’est que le thorax de la femme est plus étroit. Et savez-vous pourquoi le thorax de la femme est plus étroit ? Parce que le modèle est une femme de catégorie sociale élevée, qui dès sa formation physique, a été contrainte de porter un corset… qui a empêché sont thorax de se développer. En réalité, le bassin n’est en rien plus large.

Un squelette mâle, un squelette femelle ?

Revenons sur le squelette. Il doit bien, donc, y avoir une différence entre le squelette des hommes et des femmes ? Demandons à une spécialiste : Evelyne Peyre, qui a dirigé avec Joëlle Wiels l’ouvrage « Mon corps a-t-il un sexe » qui vient de paraître aux éditions La Découverte et qui met fin « une bonne fois pour toutes » (mais non, je sais bien que dans un siècle, on débattra toujours de la binarité sexuelle) aux idées fausses sur l’existence de deux sexes biologiques.

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J’aime la mention : « ideal proportions » used…proportions idéales utilisées

Eh bien, Evelyne Peyre a étudié de très nombreux squelettes d’habitants d’un village au premier millénaire de notre ère et s’est retrouvée devant un problème scientifique qui allait rendre possible la réflexion que nous avons ici aujourd’hui : 70% des squelettes qu’elle observait ne présentaient pas de caractères typiques qui permettent de déterminer avec certitude leur sexe (1).

70% où ce n’était pas clair du tout. En revanche, aux deux « extrêmes d’une courbe en cloche », on avait des squelettes avec des os « faibles », légers, et des squelettes avec des os « lourds », forts. Les premiers sont à coup sûr des squelettes de femmes et les autres d’hommes. Mais pourquoi une telle conclusion, puisqu’une majorité des autres ne présentent pas une différence de « force des os » qui permette de différencier le masculin du féminin ? C’est là que la connaissance des habitudes sociales des individus de l’époque permet de comprendre : ce n’est pas le sexe biologique qui apparaît ici, mais comme pour le corset cité plus haut, les effets de la croissance différenciée et hiérarchisée des enfants filles et garçons. La nourriture donne la force aux os. Les protéines sont nécessaires pou cela. Le village était constitué de nombreuses personnes pauvres, c’est à dire miséreuses. Souvent donc, il ne devait pas y avoir la possibilité de donner de la viande à tout le monde parfois pendant plusieurs années. Qui en bénéficiait alors ? Pas chacunE à tour de rôle, mais les hommes en priorité. Les fillettes pauvres pouvaient ainsi avoir des carences alimentaires fortes entraînant une fragilité osseuse. On peut donc déterminer ici le sexe du squelette, uniquement sur des critères environnementaux et de connaissances historiques des modes de vie et de l’idéologie qui décide que les hommes doivent être mieux nourris.(2)

Ca veut dire quoi être une femme biologique ?

Continuons. j’ai dit donc, que ma vulve poilue permettait d’affirmer que j’étais une femme. Bien. Une mauvaise femme toutefois. Puisqu’il semblerait que pour être une femme aujourd’hui « appréciée » par notre monde à l’envers, il faille l’épiler. Mais passons. Revenons à nos sexes biologiques.

Ca veut dire quoi être une femme ? Ah oui, avoir deux paires de chromosomes XX et non pas, comme les hommes, deux paires de chromosomes XY, ces différenciateurs qui permettent la procréation sexuée, celle qui prend les gènes de deux être distincts pour en faire un troisième (quand la reproduction est simplement à l’identique, et empêche donc toute variabilité, et dans une certaine mesure donc, la résistance à la variabilité de l’environnement (3)). Donc, nos organes génitaux permettent-ils de dire que je serais sans aucun doute une femelle ? En vérité, je le suis, car ayant mis au monde un enfant, je sais que je ne suis pas stérile. Mais ce n’est pas la vue de mes organes génitaux qui permet de l’établir. Je pourrais en effet parfaitement avoir des seins typiquement « féminins » et une vulve etc…et avoir une formule chromosomique XY. Ou XXY. Ou XXX. En effet, si XX et XY ont été découverts en 1956, dès 1958 environ, on sles scientifiques se sont rendus compte qu’il n’y avait aucun systématisme ni obligation à avoir ces chromosomes pour exister. Des XXX, n’ont aucun signe extérieur de différence, peuvent donc passer totalement inaperçus. S’agit-il d’exceptions, d’anomalies qui n’ont pas d’impact sur la « majorité’ ?

Des différences normales et non pathologiques

70717358_000_CV_1_000Le problème, c’est le nombre de personnes concernées (difficile à déterminer, puisque la plupart du temps on n’enquête pas dessus). Or, les estimations, dont les dernières, pour la première fois publiées par la très institutionnelle revue scientifique « Nature », donnent un chiffre 1% de personnes qui ne seraient ni XX ni XY. Une autre étude reconnue parle de 2%. Une étude enfin menée sur des vaches en Allemagne a permis de relever 4% de non XX ou XY. Or, scientifiquement, un tel taux ne peut être qualifié « d’anomalie ». cela pousse au contraire à considérer qu’il n’y a pas deux sexes, mais une grande variabilité, un continuum. Les écrits de Joëlle Wiels biologiste moléculaire, nous éclairent là-dessus.

Ainsi, ce continuum chromosomique est pourtant considéré par la société qui tient tant à la binarité comme des « anomalies », qui somme toute (et de façon totalement non-scientifique), n’infirmeraient pas la règle. Les personnes qui les portent, lorsque cela se voit à la naissance, sont celles qu’on appelle les « Intersexes ». Le drame qui les touche, c’est qu’aujourd’hui encore, le corps médical (quelle expression !) décide d’opérer -quand ils sont repérés- ces enfants à la naissance pour les assigner à un sexe ou un autre, car ce qui n’est pas « normal » est considéré par la médecine comme « pathologique ». Des opérations sont réalisées sur des enfants sans leur demander leur avis (avec il faut le dire, peut-être la meilleure intention du monde : leur « faciliter » la vie dans un monde binaire). Ici, la reconnaissance scientifique qu’il ne s’agit pas d’anomalies pourrait favoriser une acceptation sociale qui permettrait de mettre fin définitivement à ces mutilations sexuelles médicalisées (4)

De désillusion en désillusion pour « Dame Nature » féminine

Je continue ma description. Ma voix est celle d’une femme. On ne m’a jamais prise pour un homme au téléphone. En revanche, autour de moi, je connais de très nombreuses femmes à qui on dit systématiquement « bonjour Monsieur ». Qu’elles soient souvent des femmes fortes et affirmées aurait-il quelque chose à y voir ? La voix n’aurait-elle pas, elle non plus, de sexe (de désillusion en désillusion pour les tenants de « Dame nature » féminine). Je ne sais pas. Ce que je sais, c’est que la voix est -là encore- extrêmement variable, et dépend beaucoup de la croissance et de la posture. Comme l’explique Mireille Ruppli, linguiste, chacunE d’entre nous a deux voix possibles : une de tête, l’autre de poitrine. L’une étant beaucoup plus aigüe que l’autre. Le thorax des hommes est plus développé que celui des femmes, par l’exercice. Bien. Voilà donc qui peut mener à une voix qui porte mieux…les cours de placement de sa voix, liés à la posture du corps et à l’occupation de l’espace transforment la voix de certaines femmes, de fluette à bien entendable. C’est souvent lié à des formations qui encouragent et aident à la confiance en soi.

Aujourd’hui, à la radio ou la télé, on n’accepterait plus des voix de femmes hyper aigües comme autrefois. Au contraire, le nombre d’hommes contre-ténors explose : alors que leur voix au quotidien n’est pas forcément du tout suraigüe (point besoin d’avoir été « émasculé » pour être contre-ténor, en clair).
Mais l’argument le plus intéressant, c’est celui des personnes qui veulent changer de sexe. Lorsqu’un homme veut devenir une femme, il se soumet souvent à des opérations sur ses organes génitaux. Souvent aussi, il veut que sa voix ne permette pas de l’identifier en tant qu’homme. Mais là, l’opération est risquée et peu efficace (réduction des cordes vocales). Ainsi, il est plus judicieux de choisir un travail sur la posture du squelette pour obtenir une voix plus aigüe. On fabrique ainsi des voix féminines…

Une femme douce et sage

Ensuite, si je parle, si vous observez mon comportement, vous allez donc reconnaître que je suis une femme parce que je serai plus douce sage, non ? Que mon caractère est féminin ? Là-dessus, c’est le cerveau qui aurait donc un sexe. Je ne vais pas m’étendre là-dessus très longtemps, Catherine Vidal ayant depuis longtemps tordu le cou à cette idée trop bien reçue (5) je vous renvoie donc à ses travaux sur le cerveau, très plastique, où la variabilité est là encore la règle, et rien ne permet de deviner le sexe du cerveau, en dehors des effets de l’environnement, et encore…

Heureusement, il y a la testostérone ?

Voilà. Aucune des caractéristiques qui font de moi une femme ne sont donc probantes. Mince alors. Cela voudrait-il dire que si je veux construire ce monde sur une binarité sexuelle qui permette à un sexe d’être plus fort que l’autre, donc d’occuper toutes les positions de pouvoir et de garder le contrôle sur l’autre, jusqu’à le posséder, il faut donc y mettre de l’idéologie ?

Ah non, j’oubliais ! Il y a les hormones. Je suis sûre que les hormones vont nous sauver. Les hommes, produisent de la testostérone, et quand une femme veut devenir un homme, elle prend de la testostérone. On le sait d’ailleurs, les femmes et les hommes sont gouvernés par leurs hormones. Et si ce n’est pas le cerveau qui rend ces derniers agressifs et violents, et les femmes douces et instables d’humeur, ce doivent bien être les hormones ?

IMG_0751Mince, encore raté ! Ainsi, explique Evelyne Peyre, la testostérone, ce n’est pas une hormone mâle, apprend-on en cours de biologie. C’est une hormone produite par l’effort. Donc, les bébés puis enfants puis hommes qui sont perpétuellement poussés par l’environnement à « faire plus d’efforts » physiques, ont forcément des taux de testostérone plus élevés. Ainsi, des travailleuses soviétiques, qui portaient les rails sibériens, pouvaient très bien avoir des taux d’hormones nettement plus élevés que la moyenne des femmes. Et donc des « caractères sexués secondaires » apparents les rendant d’apparence plus « masculines ». Mais pas forcément ayant à voir avec une binarité biologique (6).

En conclusion, voilà qui est désormais clair, grâce à ce livre qui s’annonce fondamental puisqu’il réunit en un seul lieu et en quatre parties les articles de biologiques et de spécialistes en sciences humaines: il n’y a pas deux sexes biologiques. On ne devrait plus pouvoir se servir de cet argument-là pour asseoir la domination d’une partie des individus sur une autre.

En revanche, il y a bien deux sexes. Et je suis bien une femme. Politiquement parlant. Car sur ma carte d’identité, s’il est marque « Sexe : F » ce n’est pas parce que je suis une « femelle de l’homme ». Mais bien parce que la société s’est organisée sur une binarité hiérarchisée entre les sexes. C’est bien parce qu’il faut que déjà, sur mes papiers, à la Sécurité sociale, on puisse savoir si je suis citoyenne de première ou de seconde classe (n° 1 ou 2). Et cela, même si la science nous aide à démontrer que cela n’a rien à voir avec la nature, nous ne pouvons pas pour autant l’effacer en disant simplement : supprimons les catégories sexuelles. Il faut encore -malheureusement-peut-être pour longtemps, les reconnaître, pour ce qu’elles sont : le signe d’un patriarcat -d’un idéologie- qu’il faut combattre. 

Sandrine GOLDSCHMIDT

(1) Rappelons au passage que nous ne savons absolument pas avec certitude si Lucy notre « ancêtre » était une femme ou un homme, et qu’elle doit son nom à la célèbre chanson des Beatles « Lucy in The Sky with Diamonds » que les anthropologues écoutaient au moment de sa découverte.

(2) aujourd’hui les filles dans de nombreux pays sont mieux nourries. Mais ne voilà-t-il pas que le système a trouvé un autre moyen pour les maintenir en infériorité physique ? La violence sexuelle + les injonctions de beauté qui poussent tant de jeunes femmes à devenir anorexiques et boulimiques arrive au même résultat que la misère des premiers siècles et le corset d’autrefois : rendre les femmes moins fortes physiquement. Et dans un système de plus en plus pervers, plus il est difficile de défendre une binarité sexuelle naturelle pour fonder la hiérarchie, on a trouvé des alliées  les femmes elles-mêmes, qui aujourd’hui arguent de leur liberté et de leur choix. Mais quel choix, au regard de cette histoire ?

(3) Evelyne Peire a expliqué de façon édifiante ce que nous apprenaient les découvertes de la science moins idéologiquement sexuellement hiérarchisée.  Ainsi, une espèce de boa a été découverte en Amérique, qui a la particularité d’alterner les types de reproduction. Tantôt le recours à la parthénogénèse, reproduction du même, tantôt recours à la procréation. Voilà quelque chose de révolutionnaire. Et comme maintenant on va pouvoir rechercher ce type de choses, on risque d’en trouver bien d’autres…
La variabilité permise par la procréation, qui permet de créer un être unique et différent à partir de deux être uniques (et non du même à partir d’un), permet d’être plus fortEs face aux accidents de l’environnement. Ainsi, face à un cataclysme, beaucoup d’individus vont mourir, mais certains pourront y échapper. Et la survie de l’espèce ne sera pas menacée. D’où la possibilité -quand l’espèce n’est pas menacée, de recourir à la parthénogénèse, et la possibilité de recourir à la procréation à d’autres moments. La nature n’est-elle pas géniale ?

(4) le dernier chapitre du livre mentionné ici laisse place à des témoignages de personnes intersexes et transsexuelles

(5) venue je le rappelle d’une étude sur 20 cerveaux, très rapidement démentie, mais dont le démenti n’a lui, jamais été « bien reçu »

(6) les effets principaux de l’environnement sur la biologie du corps, sont : l’alimentation, l’activité ou la contrainte physique.

BABY vs Babysitting ou la propagande des affiches de cinéma

Cela fait quinze jours qu’à chaque fois que je passe l’entrée de la gare RER où j’habite, je me fais la même réflexion en me retrouvant nez à nez avec deux affiches de cinéma qui se font face : le parallèle est saisissant, et nous montre ce que sont les images des femmes et des hommes vues par la propagande cinématographique.

Je tourne la tête à droite, et voici une affiche du film « Baby » : on y voit une femme, en plongée, les yeux révulsés, possédée par un démon, par la terreur en réalité, agenouillée bien sûr, presque dénudée, la tête levée vers ce ou celui qui la terrorise ou l’a rendue folle.

Je tourne la tête à gauche, affiche du film « Babysitting », un homme avec un enfant, il a des pansements partout sur le visage, est débraillé, dépassé par les événements, mais il est debout.

Que nous disent ces deux affiches ?
Un mot en commun : Baby. Deux façons de voir l’homme et la femme qui y sont confrontés diamétralement opposées.

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1er cas : Baby

-L’affiche qui montre une femme, donc à genoux, écrasée sous l’angle de la plongée de la caméra, est montrée terrorisée par un danger de mort. Elle ne peut qu’être possédée, folle pour qui regarde sans faire lecture féministe. Mais possédée, pour une femme, cela veut dire terrorisée par les violences subies. Car les femmes ne sont pas folles, mais victimes de violences traumatisantes. Voilà une image typique de la représentation des femmes dans la fiction, qui nous parle très vite : car s’identifier au personnage n’est pas difficile : cette terreur, tant de femmes l’ont connue, pour avoir vécu la violence, parfois depuis l’enfance, et passent pour folles ensuite lorsqu’elles ont des conséquences traumatiques. En outre, cette terreur, la société de culture du viol passe son temps à leur montrer et remontrer (c’est pourquoi je ne peux pas publier la photo de trop près pour éviter de reproduire). En revanche, à bien y réfléchir, on n’imagine pas une seconde possible qu’un homme soit dans cette position avec ce regard sur une affiche d’un film de ce genre (l’horreur). On imagine donc bien que regarder cette image ne peut pas leur faire peur de la même manière : on ne les montre jamais ainsi..

Les hommes, pour eux, et je pense que c’est plutôt eux la cible, et qu’ils emmènent leurs compagnes voir le film…pour eux donc, c’est de l' »entertainment » . Ca n’a pas de raison de leur faire peur non plus, parce que cela ne correspond pas à leur vécu quotidien. Au pire, même, cela peut être excitant, tant ils sont de plus en plus nombreux à regarder de la pornographie qui rend excitante la terreur infligée aux femmes.

-L’affiche qui montre un homme, Babysitting, le présente donc debout, l’air d’avoir passé une nuit difficile, mais plutôt « bonenfant », avec de vagues pansements sur le visage, mais pas de peur.  Plutôt style affiche de film destiné à un public féminin. Il ne s’agit bien évidemment pas de les montrer terrorisés, mais dépassés par l’événement : car « baby sitter », cela n’est pas pour eux ! Ils seront maladroits, pas à leur place, voire un peu ridicules, ou se retrouveront emportés par un tourbillon d’événements.
Et les femmes, en voyant cela, seront confortées dans leur bon sens patriarcal : quand même, pour faire du babysitting, il vaut mieux être une femme, plus maternelle et responsable !

Ainsi, en deux regards, symétriques, toute la propagande cinématographique qui sert le maintien du système (violence contre les femmes pour pouvoir les exploiter) est ainsi résumée. Les publicitaires savent si bien s’y  prendre d’ailleurs, qu’ils mettent ces grandes affiches toutes en largeur au niveau des yeux des enfants, qu’on voit tourner la tête vers ces affiches…

S.G

PS : je précise que cette analyse vient uniquement des ressentis à la vue des ces affiches et non des histoires des films que je ne connais pas et ne juge donc  pas ici. Cela se justifie par le fait que les enfants qui passent devant ces affiches, n’ont eux non plus aucune raison de savoir les histoires. Ils ne reçoivent donc que les messages bruts exposés ici.

 

Dénoncer la violence conjugale et masculine, avec quels chiffres ?

DSCF6205Aujourd’hui ont été publiés en France les chiffres de violences entre conjoints ou ex-conjoints. Au total en 2013, 121 femmes sont mortes tuées par un homme et 25 hommes par une femme. C’est moins (un petit peu) qu’en 2012 et pareil qu’en 2011. Ces chiffres, qui sont traduits en général dans toutes les bouches par « une femme meurt tous les deux jours et demie sous les coups de son conjoint », m’ont toujours dérangée. Toujours, je me demande : mais qu’est-ce-que ça veut dire ? Et j’ai le sentiment désagréable que la réponse, c’est « rien, en soi ». Et tous les ans, je me demande à quoi sert la communication autour de ces chiffres. Parvient-elle à faire bouger les choses ? Pose-t-elle les bonnes questions ?

Mais cette année, j’ai envie d’en parler, car on a un peu dépassé les bornes. En effet, comme c’est « moins qu’en 2012 », 121 au lieu de 148. Et le gouvernement s’est empressé de s’en féliciter. Ainsi sur twitter, Laurence Rossignol, secrétaire d’Etat à la famille, et féministe s’est félicitée que les efforts payaient, la ministre des droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem a écrit : « la parole se libère, il faut continuer les efforts ».

Donc, 121 mortes au lieu de 148, ce serait « mieux », et ce serait le résultat de la politique du gouvernement qui permettrait de libérer la parole ?

Cela me paraît une conclusion plus qu’hâtive. Je ne veux pas dire ici que les politiques mises en place ne servent à rien, je ne veux pas contester que « la parole se libère ». Je veux au contraire croire qu’à force de travail des associations de lutte contre les violences faites aux femmes et même du gouvernement, il commence à y avoir une prise de conscience de la société. Mais de là à en conclure que c’est pour cette raison qu’il y a eu 21 femmes de moins de tuées, cela me paraît pour le moins exagéré.

En outre, une morte de violence conjugale, c’est une morte de trop, et le problème de fond vient-il du nombre de victimes ? Le problème, c’est la violence masculine ! Celle-ci s’exerce dans des proportions pharamineuses dans la sphère familiale à l’échelle  mondiale, et touche les femmes et les enfants en masse, par centaine de millions, même lorsqu’il n’y a pas mort immédiate qui s’ensuit!

Du coup, j’ai envie de partager avec vous mes réflexions à ce sujet

1-Ces chiffres ne sont donc pas significatifs en soi . On pourrait dire que ce n’est « pas beaucoup », par exemple. Si l’on comparait à la Colombie, ou aux Etats-Unis. On pourrait dire aussi que peu de femmes meurent par rapport aux hommes : 30% sur l’ensemble des homicides commis chaque année en France .

On pourrait aussi constater que le nombre d’homicides en France est bas en comparaison de nombreux autres pays et en constante baisse. En 10 ans on est passé de 1.500 homicides en France à moins de 1.000. Ce qui donne un taux pour 100.000 habitants de 1, alors que la Colombie -encore elle- a le triste record de 60. Donc cela voudrait dire que peu de femmes meurent. Mais pas que la violence masculine à l’encontre des femmes est faible.

Mais on pourrait dire aussi autre chose. En Colombie me disait une amie colombienne spécialiste de ces questions, s’il y a  beaucoup plus de femmes qui meurent sous les coups de leurs conjoints qu’en France, elles représentent moins de 5% des homicides. Alors qu’ici c’est 30%. On constaterait alors qu’en France si, comme je le disais plus haut, le nombre d’homicides est en baisse, le fait que celui des meurtres de femmes par leur conjoint diminue à peine, on pourrait en déduire que si la violence globale diminue, la violence des hommes envers les femmes elle, ne diminue pas. Et ce serait déjà une vraie piste de réflexion pour envisager de faire changer les choses.

Donc, il me semble que donner des chiffres de façon simpliste, hors contexte, sans analyse, et les livrer ainsi aux médias, ne fait pas beaucoup avancer les choses.

2-Les meurtres ne sont pas significatifs en soi

Prendre comme étalon du « comptage » de la violence masculine envers les femmes le nombre de femmes tuées a-t-il un sens ? Est-ce un bon indicateur ?

Certes, la violence appelant la violence, le meurtre peut être considéré comme son aboutissement. Mais en l’occurrence, on oublie d’analyser ou de s’interroger sur le pourquoi de la violence masculine. Je m’explique : si demain on est à zéro meurtre, cela voudrait-t-il dire qu’il n’y a plus de violences masculines ?

Faudrait-il sauter de joie ? Non. Ou pas forcément. Car à mon avis la violence masculine envers les femmes et les enfants n’a pas forcément pour finalité la mort mais le contrôle et le maintien du pouvoir. Ainsi, des femmes -et des enfants- sous menaces de mort et vivant dans la terreur sont bien plus utiles vivantes que mortes, parce que mieux « utilisables ».  Et une dictature qui marche bien est une dictature qui n’a plus besoin de tuer. Il suffit que la terreur soit suffisante, la violence calculée pour maintenir l’opprimée à sa place. Car s’il y avait trop de morts, le système finirait par s’autodétruire (voir les risque à cet égard dans les pays d’Asie qui commencent à s’affoler de ne plus avoir assez de filles).

3-De toutes façons, ces chiffres sont forcément sous-estimés

Donc, les violences sont là pour maintenir le pouvoir, et peuvent aboutir à la mort d’une autre façon. Ou aboutir simplement à la dépression, la mauvaise santé, à une vie qui est un terrible parcours du conbattant. En effet, toutes les violences qui aboutissent à la mort dues aux violences masculines ou paternelles n’apparaissent pas dans les statistiques si la mort n’est pas immédiate. Les suicides, les maladies, les comportements dangereux, les troubles post-traumatiques dûs à des violences masculines sont bien plus nombreux que ces chiffres là. Par exemple, on dit que cette année 13 enfants sont morts de violences volontaires de leurs parents alors que l’on estime en général à plutôt 700 qui mourraient des suites de maltraitance (Salmona). En revanche, si on regardait les faits dénoncés de violences conjugales, qui se comptent par centaines de milliers et sont encore massivement le fait des hommes, alors on aurait une meilleure idée de l’ampleur de ces violences.

4-Ce qui compte, c’est le sexe des auteurs de violences : ce sont des hommes

Donc, la seule chose qui est un tant soit peu significative dans ces seuls chiffres avancés médiatiquement chaque année, c’est la proportion entre meurtres commis par des femmes et par des hommes. 25 hommes tués par des femmes pour 121 femmes tués par des hommes. Si l’on rajoute à cela que souvent les femmes qui tuent leur conjoint le font après des années de violences subies, on peut encore relativiser la proportion.

Ainsi, et c’est là que je veux en venir, la seule chose qui est vraiment significative, c’est que quel que soit le type de violence exercée à l’échelle mondiale, ce sont les hommes qui en sont les auteurs. Pour vous en assurer, je vous propose la lecture de ce texte :

« le problème, c’est l’homme », de Luc Brenner, paru dans Le Monde

Comme il le dit : « Mais il est un facteur qui n’apparaît jamais. Un facteur tellement évident que tout le monde fait semblant de ne pas le voir : la délinquance, avant d’être le fait de mineurs, d’étrangers ou de pauvres, est d’abord une affaire de sexe, l’affaire des hommes en l’occurrence ».

Résumé des chiffres qu’il avance :

Les femmes représentent 15% des mises en cause toutes infractions confondues (donc y compris chèques en blanc)

«  Pour les actes les plus graves, les crimes, les hommes représentent 95 % des condamnations en 2005 (87,9 % des homicides, 98,5 % des viols et attentats à la pudeur). Pour les délits, les mâles représentent 90,4 % des personnes condamnées.

Rappelons ici que presque 100% des clients-prostitueurs sont des hommes.

Pour les crimes commis par les mineurs, qui sont en augmentation, même constat : + de 90% par des garçons.

Il n’y a donc pas d’ambiguité possible : la violence et la délinquance ont dans les faits un sexe. Et si on veut commencer à lutter efficacement contre cela, ne vaudrait-il pas mieux prendre sérieusement ce fait en compte et se poser les bonnes questions : que doit faire la société pour ne plus transformer ses garçons en futurs hommes violents ?

Sandrine Goldschmidt

Du balai et des hommes !

Il y a quelques temps, je me demandais ici même comment il se faisait que les bébés filles ne naissaient pas un balai à la main…tant les représentations des femmes, que ce soient les mièvres princesses ou les méchantes sorcières, sont toujours munies de cet attribut de ménage, qui les remet à la place que les hommes leur ont assignée : nettoyer leur maison, effectuer de nombreuses tâches et ne pas faire (de) tache.

Il faut dire -et rappeler que c’est une juste représentation, tant les femmes, malgré les progrès accomplis vers l’égalité en droits -droits de vote, accès au travail hors de la maison par le biais de filières entières qui leur sont quasi réservées (au service de , en tant que secrétaires, dans les métiers de soins, d’éducation ou de « care », dans les métiers du nettoyage enfin) et qui sont peu valorisées, accès à l’éducation où elles excellent, n’en restent pas moins les gardiennes du ménage. Ou plutôt les concierges. Car cheffes de familles elles ne sont pas selon les administrations, mais bonnes ménagères, oui !

Elles font toujours 80% des tâches ménagères et cela n’évolue qu’à tous petits pas. En moyenne, quelques minutes gagnées chaque jour, cela signifie pourtant en réalité de vrais écarts selon les milieux sociaux.

Ainsi, avant qu’il soit question d’externaliser, expliquent François-Xavier Devetter et Sandrine Rousseau dans « Du balai », c’est dans les ménages les plus « égalitaires » à tous points de vue que la répartition serait la moins au désavantage de la femme -en tout cas dans les représentations. Lorsque la femme a le même niveau d’étude que l’homme ou un niveau supérieur , si elle est au même niveau de carrière (en moyenne les femmes ayant 3 ans de moins que les hommes à la mise en couple, cela continue d’être l’exception, même en dehors des inégalités salariales), elle serait moins encline à tout nettoyer, récurer. Mais c’est surtout lorsqu’elle contribue financièrement autant que l’homme au foyer, qu’elle ne se sent pas obligée de tout faire elle-même (info très importante que je reprendrai plus bas) : « D’ailleurs, toutes les enquêtes le rappellent : plus la contribution monétaire de la femme au revenu du ménage est élevée, plus la propension à externaliser une partie des tâches domestiques est grande ». 

Y a-t-il meilleure répartition des tâches pour autant ?

Eh bien non !  Car ce qui caractérise la question de la répartition des tâches ménagères au sein du couple, c’est qu’elle est ingrate. Ou plutôt, que plus elle est ingrate, plus il est difficile qu’elle soit également partagée entre les deux membres du couple hétérosexuel (selon les deux économistes, les rares études existant sur les couples homosexuels montreraient une meilleure répartition, en particulier chez les lesbiennes). Ainsi, il y a progrès, avec ces fameux « nouveaux pères » : ils jouent plus avec leurs enfants. Mais pour tout ce qui concerne les tâches qui font tache, le nettoyage, (et en particulier des toilettes) le linge,  alors c’est là que la résistance est la plus grande.

« même au sein des couples relativement égalitaires sur le plan professionnel -et ils sont de plus en plus nombreux-, la gestion des tâches domestiques demeure un sujet conflictuel. Ainsi, selon une enquête menée en 2009 dans 4 pays européens, un couple sur deux se disputerait au sujet du partage des tâches ménagères, en particulier les couples les plus jeunes (…) Parmi les tâches les plus courantes, les hommes reconnaissent qu’ils essaient d’éviter de faire plus de la moitié de ces tâches, voire qu’ils ne les font jamais.(..) En tête des tâches qu’ils esquivent, on trouve le repassage, le nettoyage des saniraires, l’entretien du linge, le changement des draps et le lavage des sols (Hontarrede, 2009).

Source de conflit donc, la répartition inégale devrait l’être encore beaucoup plus. Car si les petites filles ne naissent pas un balai à la main, si elles ne sont pas des serpillères (mais des guérillères), alors qu’est-ce qui justifierait qu’elles fassent plus que les garçons les taches les moins agréables sinon la perpétuation d’un état de fait où les femmes, propriétés des hommes sans âmes et sans droits, seraient là pour servir leurs besoins -de propreté, d’enfants, de sexe…

Mais comme le soulignent les économistes : « En conséquence, « le refus des hommes de prendre leur part des travaux ménagers constitue un véritable mur auquel de nombreuses femmes ne peuvent ou ne veulent pas s’attaquer ».

Rien ne devrait justifier ce mur sinon que les femmes ne sont pas prêtes à entrer en conflit pour que le partage soit égal. On pourrait s’étendre sur les raisons qui les empêchent de le faire : violence conjugale*, dépendance affective et sociale, attitude maternisante (« ils n’y arrivent pas de toutes façons il faut bien les aider, et ils ne savent pas faire »).

Pacification des ménages et renouvellement du patriarcat

Mais ce qui m’intéresse, c’est de montrer la conséquence de cet état de fait : la pacification du ménage devient le premier motif d’emploi d’une femme de ménage :

« Face à ce mur, les couples qui en ont les moyens sont parfois amenés à contourner le sujet de discorde en recourant à une tierce personne. C’est le recours à une femme de ménage afin d’éviter la scène de ménage (Molinier, 2009) ».

Qui externalise et quel résultat pour les femmes ? Et l’homme dans tout ça ?

« En quelque sorte, dans les classes aisées, a fortiori quand la femme travaille, on achète la parité, ou plutôt ce qui s’en approche : la double journée féminine masque le plus souvent deux femmes ou plus, pour qu’une seule, la « patronne » s’en sorte ».

Donc, une petite frange de la population féminine semble avoir réussi à se « sortir » de ces tâches tout en évitant le conflit en les déléguant…à une autre femme. Et pourtant, dans la réalité, sont-elles bénéficiaires ? Dans la réalité, ce sont elles qui paient, et ce sont toujours des femmes qui font le ménage !

En effet, pour l’homme, ce n’est pas une question d’argent. De la proposition citée plus haut : « les femmes n’envisagent une femme de ménage que lorsqu’elles contribuent autant financièrement », on peut déduire que : si elles contribuent moins, elles font le ménage, si elles contribuent plus, elles ne le font pas (ou moins) => ce sont elles qui paient  !

Mais le comble, c’est qu’en analysant les couples ayant recours à une tierce femme, on se rend compte qu’elles paient non pas principalement pour elles mêmes, mais pour l’homme !

En effet pour lui l’externalisation a un double avantage supplémentaire :

-la pacification : ce n’est pas l’employée qui va l’ennuyer pour les chaussettes sales qu’il laisse traîner…et s’il y a problème, c’est la femme qui gère la plupart du temps la relation employeure.

-Le maintien de l’ordre établi : un déchargement du double poids et de sa mauvaise conscience d’homme qui aime l’égalité ET de toute forme de devoir de tâche ménagère. Il reste le maître chez lui et n’a pas à culpabiliser…

En effet, selon Devetter et Rousseau, lorsqu’il y a femme de ménage, la femme du ménage gagne bien un peu de répit sur ses propres tâches. Mais l’homme, lui, n’a plus du tout à s’en soucier, et ne fait plus rien -ou presque ! Ce qui nous mène à ce paradoxe merveilleux : c’est justement dans les couples où l’on professe le plus l’égalité (et qui ont accès à l’externalisation) que les taches ménagères sont les plus mal réparties !

« Grossièrement, trois heures payées permettent d' »économiser 1h30 de travaux domestiques dans la semaine (Insee). Selon l’enquête Erfi de l’Ined, il apparaît que les couples employant une femme de ménage expriment des valeurs plus égalitaires, mais que la répartition des tâches domestiques non externalisées y est encore plus inégale qu’au sein des autres ménages ! La part des ménages où l’homme participe majoritairement ou équitablement au passage de l’aspirateur avoisine 40% lorsqu’il n’y a pas recours à une femme de ménage, mais seulement 18% dans le cas contraire ». (…)

« Le temps gagné pour une femme aisée grâce à « sa » femme de ménage est, au moins, partiellement, accaparé par la réduction de l’investissement du conjoint. Pour le dire autrement : l’existence d’une personne rémunérée réduit fortement la proportion de ménages partageant équitablement les tâches domestiques, et il semblerait même que l’économie en temps faite par l’homme soit proportionnellement plus importante que celle des femmes (Ruijter,2005) ».

Les femmes sont donc en fait très peu bénéficiaires en tant qu’individues. Et de façon sociétale, elles ne le sont pas du tout, puisque ce sont toujours des femmes qui sont cantonnées au ménage. Les hommes eux, sont amplement bénéficiaires à tous les niveaux…ce qui laisse rêveuse sur la façon dont le patriarcat excelle à se renouveler !

Les non-représentations d’hommes à balai (sauf ceux qui en font un sport -voir ci-dessus ou pour en faire des objets sexuels -voir ci-contre) risquent donc d’avoir la vie dure…

Sandrine Goldschmidt

*Simple hypothèse mais assez vraisemblable : les hommes se sont appropriés les femmes et leurs services, en les soumettant -il a bien fallu que la force intervienne. Ainsi, tout conflit qui viendrait remettre en cause cet ordre établi, menacerait la paix sociale et rappelerait à l’opprimée le risque qu’elle prend à contester son oppresseur : celui de disparaître.

R.Schembri : l’injustice française

pdjpdpx.pngJe ne vais pas écrire long alors que d’autres l’ont déjà fait et mieux. Je n’arrive juste pas à comprendre intellectuellement et humainement ce monde.
Même s’il est patriarcal et donc au service du dominant et privé d’empathie par un dressage à la violence faite aux femmes, je n’arrive pas à comprendre l’équation.
30 ans de tortures dont viols (non qualifiés par la justice comme tels mais reconnus pendant le procès) = 10 ans de prison.

Comment après ne pas dire que c’est parce que c’est « juste une femme » ?

Comment ne pas y reconnaître ce que toutes les victimes vivent et ressentent face à l’injustice française (et patriarcale) ?

Comment espérer qu’un jour les victimes puissent « briser le silence » qu’on leur enjoint perpétuellement à briser ?

Comment espérer qu’elles portent plainte ?

Comment ne pas soupçonner la justice de minimiser systématiquement les violences des hommes contre les femmes et ainsi d’encourager à ce qu’elles perdurent ?

Mais je vous laisse à la lecture du communiqué de l’AVFT, qui a été partie civile au procès, et dit tout cela beaucoup mieux et précisément que moi :

R. Schembri : 10 années de réclusion théoriques pour 32 ans de tortures réelles
Et avec la lecture du dernier article de Muriel Salmona, avec le désespoir qu’elle, nous soyons encore obligé d’expliquer que la victime n’est pas consentante mais sous emprise…

Colette, torturée pendant 30 ans par son mari, arrêtons de culpabiliser les victimes

http://www.humanite.fr/societe/muriel-salmona-des-femmes-dans-un-mode-de-survie-e-558734

 

Pas de justice, pas de paix !

Je, je, je, le jeu monarchique de François Hollande

Je n’aurais jamais imaginé vous parler de ça…mais la phrase du Président de la République est trop sidérante…

« Je fais savoir que j’ai mis fin à la vie commune que je partageais avec Valérie Trierweiler »

C’est avec cette phrase que l’homme qui occupe la plus haute fonction de l’Etat a annoncé sa rupture avec sa compagne, alors que déjà, la presse à ragots avait annoncé partout que celle-ci était trompée par lui, dans la grande lignée des « femmes bafouées » par les monarques de l’histoire. Après l’avoir bafouée, il la répudie.

Il aurait pu dire :  Valérie Trierweiller et moi avons décidé de mettre fin à notre vie commune. Même si c’était lui et lui seul qui l’avait décidé, c’était plus décent. Il précise en l’annonçant que ce n’est pas le Président de la République qui parle…le je n’étais donc pas de circonstance. En employant le « je », il fait comme si c’était une décision qui lui revenait de par ses pouvoirs présidentiels. En employant le je trois fois, il insiste sur un fait. C’est MOI qui décide, elle n’est rien. Je peux tout. Monarque machiste.

Au moins aux temps monarchiques, le souverain employait le « nous ». Aujourd’hui, avec François Hollande, après Nicolas Sarkozy, on a l’impression d’avoir des petits garçons trop gâtés à la tête de l’Etat.

Mais comment est-ce possible ? Regardons du côté de notre constitution, et de l’apathie « consentante » du peuple souverain.

L’élection du PR au suffrage universel direct a été décidée par De Gaulle et votée par les Français par referendum en 1962. Ce n’était pas tout à fait le même contexte. Le général, (qui ne manquait pas d’hypertrophie du moi) avait sans aucun doute comme raison profonde de son engagement ce qu’il voyait comme l’intérêt de la France.

Mais la conjonction de cette constitution monarchique (dans la plupart des pays démocratiques du monde, c’est le ou la chefFE du gouvernement, qui est la plus importante personnalité de l’Etat et la notion d’équipe et de responsabilité devant les représentants du peuple est centrale) et d’une société qui favorise la liberté individuelle au mépris de la notion d’intérêt collectif, cela donne ça : pour pouvoir vouloir et avoir l’obsession nécessaire à occuper le poste de « monarque » républicain, il faut avoir un égo totalement démesuré. Car le monarque de sang, lui, même s’il ne manquait pas d’ego, savait dès la naissance que « c’était son destin » d’une part, d’autre part on le « dressait » à la fonction, c’est-à-dire à être destiné à s’occuper du sort du peuple. Hollande lui, passe son temps à dire « c’est MA vie privée », on doit ME respecter. Sans se préoccuper une seconde de savoir si lui respecte celle des femmes avec qui il vit. Sans se préoccuper une seconde du fait que « le privé est politique ».

Aujourd’hui, pour vouloir une fonction pareille, il faut avoir un « je » qui a plus que tout envie de « jouer au Président de la République ». Et puis, en plus, comme il n’est pas « sexiste », pourquoi ne pas en profiter pour jouer à la poupée… Et quand la seconde aura pris le même chemin que la première, il épanouira son je avec la troisième…

 

 

Quand la violence se dit ouvertement

Ce matin, je suis tombée sur cet article. Hallucinant ! Un homme sur quatre en Asie reconnaît avoir déjà commis (au moins) un viol, en général sur sa partenaire, plus d’un sur deux reconnaît être violent avec les femmes (jusqu’à 80% en Papouasie Nouvelle Guinée). C’est une étude effectuée par l’ONU auprès de 10.000 hommes.

Mais je vous arrête tout de suite. Il ne s’agit pas ici de montrer du doigt un continent en particulier. Dans les pays choisis, il y a des raisons de conjoncture très certainement (comme des guerres récentes) qui peuvent expliquer les taux hallucinants constatés (cf Papouasie-Nouvelle-Guinée). Il ne s’agit pas non plus de dire que là-bas, la violence est plus décomplexée. Je ne sais pas si c’est vrai. Mais de dire que cette étude nous livre des clés pour comprendre l’ampleur des violences masculines contre les femmes et celle du déni. Partout dans le monde.

En effet, je crois c’est que parce que l’ONU s’est donné les moyens de faire un vrai travail d’étude et de recherche dans cette partie du monde, qu’on parvient à de vrais résultats sur la réalité, opposables au déni généralisé.

A ce propos je voudrais livrer une courte réflexion sur le déni et le mensonge. Nous, féministes parfois jugées extrémistes, disons que l’immense majorité des violences est cachée derrière le déni. Et ce ici même en France. (A lire à ce propos la remarquable interview de Muriel Salmona dans L’Humanité). Ce déni, qui consiste à laisser penser que les violences sexuelles sont commises de façon marginale par une minorité d’hommes « mal dégrossis » ou « psychopathes ». Ce déni,  surtout, qui consiste, pour l’agresseur, (l’individu homme en majorité et la société patriarcale), à assurer son impunité. Pour cela, deux méthodes simples : il retourne la culpabilité (« la victime, c’est la coupable ») et nie être violent. (Mais ça, c’est quand il a besoin de le faire, parce qu’en apparence, la société serait « contre le viol »).

C’est une caractéristique des sociétés qui en adjoignant la « démocratie capitaliste » au patriarcat assurent leur impunité par la culture du mensonge (la « publicité »).

« L’être et la marchandise », de Kajsa Ekis Ekman, décrit bien comment le capitalisme (je cite de mémoire) a perpétuellement besoin de nouveaux espaces de marchandisation pour se perpétuer) et surtout comment, pour que cela passe sans contestation, il a besoin d’un discours de propagande fondé sur la promotion du mensonge idéologique selon lequel la liberté et la justice guideraient ses actes (je développerai une autre fois si vous le souhaitez). La société est égalitaire dans ses lois (c’est vrai mais pas appliquées), les hommes sont gentils, il n’y a pas de violence, ce sont les féministes qui victimisent les victimes qui ne sont pas des victimes mais des héroïnes et qui aiment ça (référence entre autres à la prostitution et à la pornographie où l’on montre des femmes torturées et violées en disant qu’elles aiment ça).

La caractéristique de cette propagande est de ne jamais se fonder sur la réalité mais sur le fantasme de la réalité. Laquelle réalité il faut à tout prix cacher et donc surtout ne pas chercher à la connaître.

Alors ce que nous montre cette étude, ce n’est donc pas que les hommes d’Asie sont violents (ils le sont, mais à eux on leur a demandé contrairement aux autres), mais que lorsque les masques tombent, la réalité des violences est effarante. Et vient confirmer ce que disent les féministes radicales.

Quand on se donne les moyens de poser les questions aux agresseurs, selon une méthodologie* destinée à éviter le déni, la réalité des violences sexuelles apparaît au grand jour (tout comme quand, dans la prostitution, on veut bien regarder la réalité et pas rester dans le fantasme) et les chiffres sont effrayants.

Et en particulier ces derniers, qui sont la réponse des hommes à qui on a posé la question : pourquoi ? (ont-ils violé)

59% pour s’amuser (« entertainment ») ! 75% pour des visions sexuelles objectifiées (« je la voulais ou j’avais envie de faire l’amour » -l’autre n’est donc qu’un instrument/objet). Et 38% de réponses, les plus parlantes : pour la punir. (et donc la maintenir dans l’état d’opprimée).

Je propose donc que l’ONU ne se contente pas de choisir un continent « plus facile » à faire passer pour « culturellement rétrograde » et fasse pareil avec le reste du monde et l’Europe par exemple. En se donnant les moyens de poser et d’avoir des réponses à ces questions. Même si les réponses doivent faire peur.

S.G

 
*Je vous laisse lire l’article entier pour connaître la méthodologie précise de l’étude (en gros, 10.000 hommes avec garantie d’anonymat, interrogés par des hommes formés spécifiquement et ne posant pas directement la question « avez-vous violé » mais avez-vous déjà forcé une femme ou était elle trop soule etc.)

Pourquoi on dit que les femmes aiment les hommes drôles…

…à cause d’une étude stupide ou au moins sa recension : celle-ci, c’est le pompon. On titre, que les femmes seraient programmées génétiquement pour aimer les hommes drôles. Ah ! Ah ! Ah!

Bon, je n’ai pas vu l’étude d’origine, donc ma critique porte sur l’article (précision pas intuile) qui nous explique le pot aux roses.

Donc, des chercheurs américains ont pris un échantillon (publié dans Neuroscience)  :

1- 22 enfants, garçons et filles ! (il y a 40 ans déjà, on avait déterminé que les femmes et les hommes avaient des cerveaux différents sur un échantillon de cet ordre, la suite avait prouvé que c’était totalement faux dès qu’on prenait un échantillon plus grand). On ne tire pas de conclusions sur l’humanité sexuée sur 22 individus…

déjà donc, c’est bidon.

2- Des enfants âgés de 6 à 13 ans. Ah bon, parce que la construction sociale du genre, c’est bien connu, ne commence pas dès la naissance. Donc, si on observe des choses à 6 ans, c’est génétique ? pfff…

3- Ils leur ont montré différentes vidéos et ont observé leurs réactions. je cite l’article : Et l’imagerie médicale montre nettement que le cerveau « émotionnel » des jeunes filles associé à la récompense connaît un pic d’activité devant les vidéos comiques. Les garçons préfèrent de leur côté ce qui est « positif ». « Nos données, pour la première fois, révèlent que les différences sexuelles dans l’appréciation de l’humour existent déjà chez les jeunes enfants »,

Ok il y a des différences sexuelles sur 22 enfants, déjà conditionnés depuis 6 ans à 13 ans aux rôles sociaux de sexe !

4-Le pompon, c’est la conclusion :

« précise l’étude, qui en conclut que les femmes choisiraient de préférence un partenaire qui les fasse rire ».

Oui, forcément, c’est logique. Les femmes préfèrent les vidéos drôles donc elles préfèrent des hommes drôles comme partenaire.

Cet été, on fait un concours de bêtise ? Ou alors, on retourne lire des choses sérieuses sur le cerveau qui est à la fois ultra-plastique, sensible à l’environnement, et qui ne permet pas de déceler de différences sexuées d’ordre biologique. Et on essaie de se poser la question aussi : pourquoi les journaux sont tellement friands de rapporter ces âneries (cf photo)…


S.G