Wild : la vie au bout du chemin

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Surmonter ses traumatismes et donner un sens à sa vie dans la nature et en s’infligeant une épreuve personnelle, c’est presqu’une tarte à la crème du cinéma américain. Après « Into The Wild », qui racontait une histoire vraie, « Wild » s’attaque à cette thématique. L’originalité, c’est que c’est une femme qui s’attaque à la Pacific Crest Trail. Une femme jeune et tourmentée qui n’a aucune expérience de la randonnée s’attaque aux 1700 km de cette marche exceptionnellement difficile, à travers déserts, neige et haute montage, de la Californie à l’Etat de Washington (à la frontière avec le Canada).

Un film inspiré des mémoires de Cheryl Strayed, incarnée par Reese Witherspoon (qui a acheté les droits pour sa maison de production), un ouvrage sorti en 2012 et rapidement considéré par le New York Times comme un classique de la « littérature sauvage et du féminisme moderne ».

Car Strayed n’hésite pas à le dire, elle est féministe. Et ce n’est pas que le deuil de sa mère adorée, morte d’un cancer à 45 ans qu’elle tente d’oublier sur les 1700 km de sa route, ce sont aussi les embûches de notre société patriarcale qu’elle doit surmonter, embûches qui sont autant de traumatismes graves. Violences conjugales subies par sa mère et la terreur que cela inflige à la petite fille qu’elle était et son frère, et ses conséquences après le choc du deuil : addictions dissociantes que sont pour elles l’héroïne et « de coucher avec n’importe qui ». Seule façon de dépasser ça, couper avec ce monde et se retrouver seule face à l’adversité et la nature.

Elle fait sur sa route des rencontres, dont une mauvaise -heureusement elle échappe de justesse à l’homme qui incarne le prédateur sexuel. Mais la plupart des hommes qu’elle rencontre sur sa route du Pacific Crest Trail lui rendent service, tant et si bien qu’elle parvient à laisser sa légende derrière elle, surnommée par trois jeunes gens « que personne n’aide », la « Reine du PCT. Et lorsqu’elle « tombe » enfin sur une femme, c’est un grand cri de joie et d’enfin possibilité de réel partage qui se présente à elle. Dernière rencontre essentielle, celle d’un petit garçon et sa grand-mère, petit garçon avec qui elle a un échange émouvant, et en chantant, lui permet de libérer son émotion.

Tout au long de la route, le film décrit bien les flashes qui la parcourent, les souvenirs qui l’assaillent, 1.700 kilomètres qui lui permettent d’explorer et faire l’aspect avec tous les recoins de son cerveau, et finissent par lui permettre  de se séparer enfin de sa culpabilité intériorisée de femme victime. La marche n’est plus seulement rédemptrice, mais tout simplement libératrice. Au bout de son chemin, elle peut enfin espérer vivre sa vie, et faire ce que sa mère avait tant voulu pour elle. Profiter de chaque lever et chaque coucher du soleil.

Car il n’est pas inutile de nous le répéter chaque jour : s’il n’y a qu’une chose sacrée dans ce monde, c’est bien la vie.

S.G

 

Ce week-end, on résiste à l’obscurantisme avec Femmes en résistance

Voici venue la dernière ligne droite avant le festival féministe de documentaires que nous organisons à Arcueil,

avec cette année pour thème la résistance à l’obscurantisme. Voici le communiqué qui présente le programme, nous vous attendons nombreusEs, pour un week-end de films, d’échanges et de résistance !

N’hésitez pas à diffuser le programme autour de vous ou à rebloguer cet article !

Cette année, nous résistons à l’obscurantisme sous forme de 8 commandements féministes.
De « tu ne seras la côte de personne à « Tu chanteras ta liberté » en passant par « Tu ne seras ni achetée, ni vendue, ni violée »,
le festival proposera, en présence de plusieurs réalisatrices, de nombreux documentaires féministes souvent inédits en France.
Going up The Stairs
Ainsi, « Going up the stairs de l’Iranienne Roksareh Ghaem Maghami qui nous montre comment cette dame de 50 ans, mariée à 9 ans, , trouve enfin un moyen de s’épanouir et ne plus être tout à fait la « côte » de son mari, par la découverte de la peinture.
Ou encore « Grrrl Love and Revolution », de Abby Moser qui revient, avec des témoignages de l’époque, sur l’émergence des « Riot Girrls », groupes punk rock féministe, mais également mouvement de société et de lutte contre les violences masculines, et comment elles ont du résister à être happées par les médias et maisons de disque.
Le 28 septembre journée internationale pour la dépénalisation de l’Avortement nous discuterons autour du droit à l’avortement en France et aux états unis avec Arlette Zilberg du Collectif Tenon et Stacey Benoit réalisatrice de « Une question de choix »,  un regard sur les escortes de bénévoles qui défendent les femmes désirant avorter et le personnel médical des cliniques attaqué par les fous de Dieu : un petit aperçu des États-Unis dans le Wisconsin.
Nous verrons aussi « No Burqas behind bars », ou comment des femmes afghanes condamnées pour des crimes moraux vivent à l’intérieur d’une prison.
Le dimanche 29 septembre nous discuterons autour de la question de la marchandisation des femmes, de la prostitution, de la maternité de substitution (appelée aussi GPA) et de l’adoption, dans une séance intitulée « tu ne seras ni achetée, ni vendue, ni violée ».
Avec des témoignages de survivantes de la prostitution, avec la CLF, Coordination Lesbienne en France qui parlera de la maternité de substitution en France après la projection d’un film sur le business des mères porteuses en Inde « Mother Anonymous » et avec la réalisatrice Sabreen Bint Loula sur l’adoption, qui signe un portrait poignant et politique (cf photo film ci dessous- sabreenbintloula@gmail.com) : « Celle qui meurt ».
PhotoVisuelCelleKiMeurt
Toujours le dimanche Noémi Aubry, une des réalisatrices de Dix Cauris nous présentera son documentaire qui décrypte la lutte contre l’excision au Mali. Nous ferons ensuite un point sur la France.
Enfin, en partenariat avec Teledebout, webtv féministe, nous projetterons les deux films primés par le festival au deuxième concours « buzzons contre le sexisme » et présenterons sa 3e édition.
Grrrl Love & Revolution, Abby Moser, dimanche 29 à 18h30
Nous n’oublions pas nos Utopies avec « la Radio des bonnes nouvelles » une création théâtrale de Gerty Dambury  à ne pas manquer ! La radio des bonnes nouvelles annonce que le monde a changé les femmes sont désormais libres et traités à l’égal des hommes.
Pendant deux jours, il y a aura aussi sur place la librairie féministe « Violette and Co » avec des dédicaces (Delphine Beauvois pour « Nous ne sommes pas des poupées » et Muriel Salmona pour « Le livre noir des violences sexuelles »),
et toujours, la cantine « Kali Power ». Car pour résister à l’obscurantisme, il faut des nourritures intellectuelles, mais aussi terrestres !

4 septembre : Les AmiEs de Femmes en résistance invitent Muriel Salmona à Violette and Co

4 septembre 2013 à 19h à la Librairie Violette and Co

Rencontre avec Muriel Salmona organisée par Les AmiEs de Femmes en résistance

Voilà c’est la rentrée. Après le Panthéon hier, cap sur le festival féministe de documentaires que je co-organise depuis 8 ans maintenant et dont c’est la 11e édition, Femmes en résistance à l’obscurantisme !  Vous pouvez découvrir le programme ici et je vous en reparlerai bien sûr.

Mais cette année, nous innovons en créant le groupe « Les AmiEs de Femmes en résistance », auquel vous pouvez adhérer (voir modalités ici) et ainsi nous aider à enrichir notre programmation (rémunération des artistes, financement de déplacements de personnalités). Pour animer le groupe, nous organiserons des rencontres réservées aux membres pour discuter de la programmation passée et future du festival.

Et pour inaugurer sa création, nous avons, avec notre partenaire depuis 11 ans, la librairie Violette and Co, décidé d’organiser une « rencontre du mercredi » à la librairie féministe de la rue de Charonne, et avons invité Muriel Salmona, psychiatre psychotraumatologue, meilleures spécialiste de la mémoire traumatique en France, Présidente de l’association Mémoire traumatique et Victimologie. Elle viendra parler de l’indispensable livre qu’elle a écrit et est sorti au printemps:  « le livre noir des violences sexuelles », paru aux Editions Dunod.

La rencontre se déroulera en 2 temps : présentation du groupe « les AmiEs de Femmes en résistance » et présentation du programme (la plaquette de la 11e édition sera disponible) puis discussion avec Muriel autour de son livre.

Elle le dédicacera ensuite et vous pourrez adhérer également adhérer sur place aux AmiEs de Femmes en résistance !

Voici deux liens à propos du travail de Muriel Salmona d’articles parus sur mon blog :

Redonner au monde sa cohérence pour éliminer les violences

Evénement : sortie du Livre noir des violences sexuelles

 

Lisons, avec Violette and co, pour une année résistante et solidaire

Un petit mot en passant, et pas seulement pour les franciliennes et franciliens : ce n’est pas parce que Noël est passé qu’il faut cesser d’offrir des livres…surtout dans les bonnes librairies où l’on trouve, et où on peut  commander tout, par téléphone et sur Internet, et se faire expédier les ouvrages. Tout, et surtout ce qu’on ne trouve pas ailleurs, les ouvrages féministes, anciens et nouveaux…il s’agit bien sur de la librairie Violette and co,

102, rue de Charonne,Paris 11è (metro Charonne), http://www.violetteandco.com

Catherine et Christine, les deux libraires, maintiennent le cap malgré les difficultés dans un pays qui n’encourage pas la diffusion de la culture, sont présentes dans tous les événements féministes ou lesbiens (cineffable, Femmes en résistance, Festival de films de femmes de Créteil), et ont un espace d’exposition et de rencontres, où on peut entendre les auteures les plus variées, de Christine Delphy à Chahla Chafiq, de Tristane Banon à Françoise Leclère ou Claudine Lebègue. Elles définissent ce lieu chaleureux comme « une librairie de 80 m2 consacrée aux textes et aux images qui mettent en valeur les femmes et les homosexualités sous toutes leurs formes ». En ce début d’année, elles nous souhaitent une année résistante et solidaire, avec une première rencontre mercredi à 19h (voir photo ci-contre), des ateliers d’écriture et de lecture. Souhaitons leur également une excellente année, résistante, solidaire et féministe !

S.G

 

Ce week-end, Femmes en résistance à la violence institutionnelle !

La 9ème édition du festival femmes en résistance, c’est ce week-end, samedi et dimanche à l’espace municipal Jean Vilar d’Arcueil !

L’occasion de remercier la mairie et le directeur de la salle, Dominique Moussard, qui nous donnent toujours cet espace de liberté et de résistance.

La violence institutionnelle est particulièrement d’actualité ces derniers mois, elle l’est malheureusement de toujours…on a cependant tellement l’impression parfois ces derniers temps que tout est, toujours, à recommencer…que nous avons décidé que nous serions infatigables…

Le week-end sera donc l’occasion de mêler la réflexion et la solidarité féministe, dans ce beau lieu qui permet à la fois convivialité et découverte cinématrographique engagée.

Au total une dizaine de documentaires, une séance débat avec la Fédération nationale solidarité femmes, la première européenne de l’Imposture d’Eve Lamont en partenariat avec le mouvement du nid et avec le soutien de l’amicale du nid, une séance sur le radicalisme, la première en France de « I am », de Sonali Gulati, les 1 an de Teledebout qui viendra nous présenter le chemin parcouru par cette première et superbe webtélé féministe. Mais donc, ce sera aussi un moment de convivialité avec la cuisine de Moruni, Kâlî Power cantine indienne qui nous régalera tout le week end (voir les menus ici), un concert pour clore le festival, avec Système D et un duo Cae/Kadja N’Se. Et bien sûr, une expo, 40 ans de slogans féministes, et la table tenue par la librairie Violette and co !

Et en plus il fera beau, nous vous attendons donc avec beaucoup d’impatience et de plaisir, dès samedi à l’ouverture, à 13h30 !

POUR VOIR L’INTÉGRALITE DU PROGRAMME ET LE TELECHARGER :

INFOS PRATIQUES :  Espace Jean Vilar, 1, rue Paul Signac, Arcueil RER B Laplace (2 zones), ou Arcueil-Cachan (3 zones), voir plan au dos du programme.

TARIFS / 5,20 euros la séance ou 10,95 pour la journée, 4,75/7, 50 en TR

Une coordination féministe ? Contribution aux rencontres d’été

J’ai une proposition de discussion à mettre sur la table pour les rencontres féministes des 2 et 3 juillet (occasion pour moi de vous en parler si vous n’êtes pas au courant). 35 associations organisent des débats, des ateliers, des moments festifs pour sortir avec une déclaration commune. Cela sera à Evry, et on peut s’inscrire ici.

La profusion d’actions féministes depuis les 40 ans du mouvement, la prise en main d’internet par les mouvements féministes, avec l’explosion médiatique d’Osez le féminisme et suite aux remous de l’affaire DSK, est en soi une bonne nouvelle, certes. Mais c’est aussi symptômatique de notre société qui va trop vite, réagit de façon instantanée (et je parle aussi pour moi), et ne prend pas toujours le recul nécessaire.

Ainsi, ces dernières semaines, voire ces derniers jours, on a eu beaucoup de mobilisations, toutes aussi importantes les unes que les autres.
Manif contre le sexisme (par définition imprévisible), le lancement de Vie de meuf, le livre, la campagne « osez le clito« . Ca, ce n’est que pour OLF.

Mais aussi, la campagne du Lobby européen des femmes pour l’abolition de la prostitution, la campagne du CFCV contre le viol conjugal, la campagne -qui du coup passe malheureusement un peu inaperçue- pour qu’on parle des femmes dans le sport à la télé, les mobilisations pour l’égalité salariale, le suivi du comité de vigilance.

Tout ça, c’est super, mais n’y perd-on pas un peu en ne coordonnant pas nos actions ? Pour aller vite, on fait, on réagit, et on ne sait pas ce que sont en train de faire les autres ?

Du coup on se télescope, et même les féministes ne peuvent se tenir au courant de tout ? Alors imaginez la confusion dans la tête de celles et ceux qui ne s’y intéressent pas tous les jours ? Et c’est l’image qui prime et qui reste, l’image ou sa contestation, et le fond du message qui risque de passer inaperçu…

En résumé, je pense qu’il sera fondamental à Evry de discuter, ensemble, des moyens de mieux coordonner nos actions, d’avoir un agenda féministe. Il serait bien que toutes les associations représentant des courants du féminisme puissent y être, qu’on discute de savoir s’il faut utiliser les groupes collectifs existant pour le faire ou inventer de nouvelles façons… Cela sera particulièrement crucial si on veut porter nos revendications sur le devant de la scène d’une façon efficace à l’horizon de l’élection présidentielle !

Sandrine GOLDSCHMIDT

L’égalité maintenant ! le manifeste des 343, 40 ans après

Le garderons-nous dans la petite histoire comme le deuxième volet d’un film ? « le retour des 343 salopes » ? Ou comme un moment important dans la « troisième vague » du féminisme ? Difficile à dire…

Tout est bien dans le contenu du nouveau manifeste des 343 lancé par Osez le féminisme, inspiré par les « anciennes », des 40 ans du MLF…

Il se trouve que j’ai été témoin quand l’idée est venue, c’était il y a moins d’un mois à l’issue d’une très belle manif, dans un café parisien, et je dois dire que je suis toujours très impressionnée de l’efficacité « d’Osez le féminisme ». Moins d’un mois après, le nouveau manifeste des 343 fait la Une de Libération.

4 femmes témoignent des inégalités que nous subissons toujours. 343 disent qu’elles veulent l’égalité ici, et maintenant. C’est mis en avant comme un sujet politique. Alors certes, ce n’est pas tout à fait le seul sujet de la Une, il y a la Côte d’Ivoire qui en prend une moitié longitudinale.

Certes encore, le titre n’a pas été choisi par les militantes, et il reprend, sans guillemets le terme de « salope », un terme qui n’est pas celui du manifeste d’origine. Un titre choc dont on peut s’inquiéter de l’impression qu’il laissera. Si à l’époque, l’invention, par Charlie Hebdo, de l’appellation, pour reprendre l’info, pouvait avoir un sens transgressif, on peut peut-être regretter qu’il soit repris tel quel avec un effet « à double tranchant » (comme celui de la « double une »). Le 5 avril 1971, Le Nouvel Observateur publiait en effet le manifeste des 343. 343 femmes qui osaient, alors que l’avortement était illégal, prendre le risque de dire publiquement qu’elles faisaient partie du million de femmes avortant chaque année, en France. Un acte de bravoure, fait entre autres par Simone de Beauvoir, Catherine Deneuve, Marguerite Duras, Françoise Sagan…

Aujourd’hui, il s’agit bien plus d’un acte de communication que de courage…dire « nous ne demandons pas la Lune, juste l’égalité, maintenant, » c’est juste dire  que nous demandons l’application de la loi. Et pourtant, c’est toujours viser la lune. Parce que pour faire exister médiatiquement une revendication juste et encore bien trop souvent mise hors du champ du politique, il semblerait qu’on soit obligées d’en passer par la sacro-sainte communication, ce « Storytelling » qui nous oblige à nous inscrire dans une histoire pour être entendue… on ne peut donc pas faire la fine bouche et seulement espérer qu’il en restera quelque chose…

Je reprends donc ici les phrases essentielles du manifeste, auxquelles je m’associe pleinement :

« Nous voulons atteindre l’égalité femmes – hommes dans les têtes et dans les faits. Nous exigeons aujourd’hui que nos droits fondamentaux deviennent réalité. Des mesures doivent être prises rapidement pour garantir l’égalité dans l’emploi, en faisant reculer la précarité du travail des femmes et en imposant l’égalité salariale. Il est temps de prévoir une éducation dès le plus jeune âge pour comprendre et remettre en cause les mécanismes de domination. Nous demandons que chaque femme puisse accéder à une contraception libre et gratuite, puisse avorter dans de bonnes conditions, être mère si elle en fait le choix. Il faut en finir avec les violences sexistes qui pèsent sur chacune d’entre nous. »



Féministes, pour quoi faire à La Flèche d’or le 6 juin

Le 6 juin prochain à la Flèche d’Or, l’association des 40 ans du Mouvement de libération des femmes organise une grande fête féministe. Débats, projections, ateliers-vidéos, rencontres, musiques et restauration, de 14 heures à 2 heures du matin, ce sera le grand moment festif de la célébration des 40 ans.

Une occasion idéale pour enfin faire la jonction entre toutes les féministes, celles de l’époque, celles d’aujourd’hui, et celles de demain ? Le projet de documentaire que j’anime avec les éducatrices du FIT, « Féministes, pour quoi faire », sera présent à la Flèche d’or. Certaines résidentes, qui sont un peu « féministes sans le savoir », viendront écouter ce que les féministes militantes ont à dire, et partager aussi, avec avec elles, ce qu’elles ont elles-mêmes à dire et que nous souhaitons faire entendre. Parce que trop souvent la voix de ces jeunes femmes n’est pas entendue. Et que si elles ne se clament pas haut et fort féministes, on ne prend pas toujours la mesure du chemin qu’elles doivent parcourir, et de la force de vie qu’elles développent  pour y arriver.

Féministes sans le savoir, elles le sont, parce que si elles sont au FIT, c’est  qu’elles ont posé des actes fort de refus du système patriarcal. Elles ont (pour certaines) fui leurs familles pour éviter des mariages forcés, fui la violence conjugale parfois, et souvent, elles commencent par se retrouver dans une situation où les obstacles se multiplient.

Car en échappant à sa famille par exemple pour éviter d’être mariée, une jeune femme non seulement se retrouve à la rue, coupée de ses liens affectifs, seule, mais aussi doit  travailler. Elle n’a pas eu le temps et/ou la possibilité de faire des études, elle est donc sans diplôme. En gagnant la liberté, on perd aussi parfois des éléments de socialisation qui aident à trouver du travail. Et à la rue, de se retrouver exposée à de nouvelles violences. Si en plus elle est d’origine étrangère, elle encourt la multiple peine. Femme, sans diplôme et d’origine étrangère, coupée de sa famille,  quel est le champ des possible ?

En travaillant avec certaines résidentes,  je découvre la force qu’elles ont, cette volonté d’être toujours debout, et c’est moi qui reçoit largement autant que je donne. Elles seront à la Flèche d’or pour notre documentaire, et aussi parce que ce qu’elles ont à transmettre, et que vous découvrirez dans le film, est bien aussi important que ce qu’elles ont à apprendre. Ce sera l’occasion de les rencontrer, j’espère pour de beaux échanges.

S.G

La projection du film documentaire « Féministes, pour quoi faire, est prévue le 25 septembre à Arcueil, lors de la 8ème édition du festival « Femmes en résistance ».

Féministe, pour quoi faire ? Ne pas tomber dans le panneau, peut-être

Court coup de gueule du matin. Avec les résidentes du FIT (ou plutôt, du C.H.R.S « Les UniversElles) », nous sommes en train de faire un film : « féministes, pour quoi faire ? »

Et forcément, vu l’actualité, et que plusieurs des participantes sont musulmanes, on peut difficilement éviter le sujet de l’interdiction du voile intégral.

Aujourd’hui, le gouvernement nous présente la loi d’interdiction au nom du droit des femmes. Ce serait en fait pour les musulmanes, opprimées par leur mari qu’on le ferait. Ce serait, même, féministe. Or, comment réagissent les musulmanes de mon groupe ? Pour elle, c’est très clair, on leur interdit de s’habiller comme elles veulent (et ça, même si elles-mêmes ne portent jamais de voile et sont contre la burqa), parce qu’elles ne sont pas « françaises » (parce que musulmane).

Pour moi aussi, c’est très clair. Ce que fait le gouvernement, ce n’est pas féministe. C’est anti-féministe. Ce n’est pas pour les femmes musulmanes. C’est contre l’islam. Sauf que pour faire passer cette politique discriminatoire, encore une fois, comme toujours dans l’histoire, on se sert de qui ?
Des femmes.

Désolée, mais sans moi. Je préfère continuer à avancer avec des jeunes femmes musulmanes vers une prise de conscience, ensemble, de la nécessité pour les femmes de lutter contre les verrous spécifiques qui les empêchent de faire ce qu’elles veulent (et en plus, de ce qu’elles peuvent apporter à la société, si elles y prennent part, comme elles m’apportent en atelier) plutôt que de m’associer à un gouvernement dont le but est de monter les uns contre les autres, les unes contre les autres, pour assurer son maintien au pouvoir. Je préfère cet échange, positif, entre nos deux mondes. Femmes, libres ou bientôt libres, musulmanes, elles ont beaucoup, énormément à apporter à la société française. Il serait temps qu’elles y aient leur place. Telles qu’elles la définissent, elles-mêmes.

Sandrine Goldschmidt

Après son agression, Rayhana s’exprime : « Non, je n’ai pas peur »

L’association Ni Putes ni Soumises appelle à un rassemblement samedi 16 janvier à Paris pour soutenir l’auteur et comédienne franco-algérienne, Rayhana, agressée le 12 janvier. Cette manifestation débutera à finalement à 14h30 devant la maison des Métallos rue Jean-Pierre Timbaud (Metro Couronnes).
Rayhana va bien. Cette magnifique artiste, auteure, actrice et militante algérienne n’est pas du genre à se laisser impressionner par l’agression dont elle a été victime, mardi soir.

« Je n’ai pas peur », dit-elle, « pourquoi j’aurais peur ?« . Je vis dans un pays libre, et j’ai écrit une pièce sur la liberté. J’ai pris mes responsabilités. Et la vie continue. On ne va pas s’arrêter pour ça. En Algérie, quand un metteur en scène était assassiné, on continuait ».

Mardi soir, elle a été attaquée par deux hommes, l’un la retenant en arrière pendant que l’autre lui aspergeait de l’essence sur la figure.« Je ne les ais pas vus, je marche toujours la tête baissée. Ca a giclé sur mon visage, j’ai été aveuglée. Puis j’ai vu une cigarette lancée sur moi qui a touché mon bonnet, j’ai couru chercher du secours ». Elle a entendu ses agresseurs lui dire :  » on t’avait prévenue ».

C’est arrivé aux environs de Belleville, à deux pas de la Maison des métallos où elle joue tous les soirs dans la pièce qu’elle a écrite, « A mon âge, je me cache encore pour fumer » (voir ci-dessous), qui est mise en scène par Fabian Chappuis. La dernière représentation du spectacle, complet depuis quinze jours, aura lieu samedi soir.

Sa pièce est donc une oeuvre sur la liberté, elle y dénonce « l’oppression des femmes », de toutes les femmes. Et si la scène se déroule dans un hammam d’Alger, elle a vocation à être universelle . « Je voulais parler des femmes, cela se situe à Alger parce que c’est là que j’ai vécu. Mais j’ai essayé d’aller vers l’universel ». D’ailleurs, une des plus belles remarques sur le spectacle lui a été faite par une spectactrice âgée « française de souche ». « Elle m’a dit : je m’attendais à voir des femmes arabes et je me suis vue ». Même si les personnages s’appellent Fatima, ou Zaya, elles pourraient s’appeler Françoise… »

Rayhana, qui heureusement n’a eu aucune séquelle de l’agression, a déposé plainte, pour la deuxième fois. Le 5 janvier, elle avait déja été agressée verbalement. Cette fois-ci, elle a choisi de parler à la presse. Libération en a parlé ce matin dans une double page, et l’info a fait le tour du web avant que le théatre n’organise cet après-midi une conférence de presse. Et bien sûr, le théatre se trouvant dans un quartier sensible près de Belleville, et la pièce parlant de la liberté des femmes et se situant en Algérie, les questions n’ont pas manqué pour savoir si elle liait son agression à l’intégrisme musulman.

Elle a insisté  sur le fait que cela n’était en rien sûr, que cela pouvait aussi bien être le fait de deux « salopards »,  et qu’il ne fallait pas en tirer de conclusions politiques. La pièce, militante, ne se veut d’ailleurs pas polémique.

Si Rayhana a voulu parler de son agression, c’est, après réflexion, pour ne pas faire « comme les femmes battues qui cachent ce qui leur arrive ». Et bien montrer à ceux qui, par deux fois, ont lâchement tenté de l’intimider, pour qu’elle ne puisse plus continuer à clamer son esprit de liberté, qu’ils n’y parviendraient pas. C’est toute la force de cette militante de savoir garder la tête froide malgré ce qui lui est arrivé, et d’oser dénoncer la violence sans se perdre dans la colère. Le succès d »A mon âge, je me cache encore pour fumer », qui a bénéficié d’un excellent bouche à oreille, est là pour l’attester.

Sandrine Goldschmidt (photos S.G)

voire les détails de la pièce dans l’article précédent. Et je vous rappelle que je n’ai malheureusement pas pu voir la pièce, que tous vos témoignages sont les bienvenus.