Redonner au monde sa cohérence pour éliminer les violences

nc2b017-diable_coqDepuis que j’ai moi même un enfant -une fille- j’ai toujours pensé que nous avions en face de nous avec les enfants non seulement des personnes humaines dont les droits doivent être d’autant plus défendus qu’ils et elles sont plus vulnérables, mais aussi des perles d’humanité : des enfants nous avons tout à apprendre, avec les enfants nous avons tout à construire, plutôt que de continuer à les détruire, comme le fait l’institution familiale autoritaire qui prédomine, particulièrement dans le cadre des violences qu’ils et elles -beaucoup trop nombreux d’entre eux- subissent.

Ce sentiment est renforcé par la lecture, l’écoute et l’expérience de ce qui concerne les troubles post-traumatiques, en particulier au travers du travail de la docteure Muriel Salmona, psychiatre psychotraumatologue et Présidente de l’association mémoire traumatique et victimologie, qui a fait de son combat pour les victimes une ligne de vie.

Au centre de son combat, et cela a été un des aspects les plus intéressants de l’émission « Pas de quartier » sur Radio Libertaire hier (elle y présentait son livre indispensable « le livre noir des violences sexuelles » et vous pouvez réécouter l’émission ici : http://media.radio-libertaire.org/backup/24/mardi/mardi_1800/mardi_1800.mp3)

la nécessité de redonner une cohérence au monde qui, du fait des systèmes de pouvoir et de domination, en premier lieu patriarcale, parentale et économique, devient le lieu d’un système absurde, incohérent, et dont l’incohérence même est la garantie de sa perpétuation.

Je m’explique (en essayant d’être aussi claire que Muriel) : l’enfant naît avec des neurones miroirs qui l’aident à se construire. Et si le monde tourne à l’endroit, ces neurones miroirs lui permettent de connaître l’empathie. Ainsi, lorsqu’une violence est commise, et qu’elle provoque une souffrance, alors ces neurones font que l’enfant ressent la souffrance et éprouve alors de l’empathie. Cette empathie fait normalement que si il impose une souffrance -volontaire ou involontaire à la personne en face de lui, alors il s’arrête.

Le problème, c’est que si le petit garçon ou la petite fille subit des violences, et que l’adulte qui les commet ne fait pas preuve de cette empathie, ne réagit pas à sa souffrance, alors cela crée un stress intolérable pour son cerveau. Si en plus, la personne qui commet ces actes est une personne qui devrait d’autant plus éprouver de l’empathie qu’elle est censée être celle qui vous protège et vous aime -père, mère, famille…alors le stress est encore pire. Et le cerveau devient incapable de gérer ce stress, et de réguler les « drogues » de l’hyper-vigilance qu’il génère. Celles-ci le mettent en danger vital, et ça seule façon de s’en sortir, est de disjoncter, provocant la dissociation, une anesthésie émotionnelle.

Cette anesthésie émotionnelle, si elle se double d’un enfermement du souvenir émotionnel dans la mémoire traumatique, fait que le stress vécu pourra réapparaître à l’identique au moindre rappel, stimulus, faute d’avoir pu, dans la mémoire autobiographique, devenir un souvenir dont on arrive peu à peu à se distancier émotionnellement.

Tout ceci, provoque donc une souffrance intolérable, fait vivre aux victimes un enfer, alors qu’en même temps il n’y a pas de symptômes à l’identique d’un bras cassé pour lequel il faut à l’évidence un plâtre. En outre, la poursuite du « tout est normal », l’indifférence des autres adultes, surtout lorsqu’il y a révélation des faits, vient « achever » les victimes dans leur recherche de cohérence. Elles souffrent de symptômes qui ne sont pas reliées aux violences : les conduites dissociantes, qui sont interprétées par les autres comme de la faiblesse de leur part, alors qu’elles sont le fruit de l’incohérence et de la violence.

Pire : ce processus est en outre le garant de la reproduction de la violence. En effet, lorsqu’un enfant a été victime ou témoin de cette violence absurde et non nommée, niée, et alors qu’on fait de lui le responsable (1), il développe une anesthésie et une dissociation et est victime de crises de mémoires traumatique. Dans ces cas-là, il a plusieurs moyens pour réagir : s’anesthésier par des conduites dissociantes : prise de drogues, alcool, mais aussi de comportements qui vont le pousser vers la création d’un nouveau stress qui permettra la disjonction. Ainsi, il peut arriver qu’à ce moment là, envahies par le scénario de l’agresseur, elles reproduisent la violence : contre elles-mêmes ou contre les autres. Car le scénario de recherche de l’anesthésie de la personne qui les a violenté-e-s les a envahies au point qu’ils/elles savent inconsciemment que ce scénario est anesthésisant pour les bourreaux. Et donc que de le reproduire va leur permettre de s’anesthésier.

C’est là qu’intervient un facteur fondamental : celui du choix. Et ce choix n’est pas le même selon qu’on est un homme ou une femme. Ou plutôt, il n’est pas le même selon qu’on a été -au-delà- des violences, construits comme un dominant et valorisé en tant que tel. Donc, les hommes ont une plus forte probabilité de devenir violents envers les femmes parce que c’est ce que l’on attend d’eux et qu’ils en bénéficient. C’est socialement valorisé, sous les termes de « virils », de « capable d’autorité ». Et, comme l’expliquait Muriel, c’est même valorisé socialement dans l’entreprise : ce sont des gens qui savent ne pas se laisser envahir par leurs émotions (forcément, ils n’en ont pas avec l’anesthésie). Donc licencier des collaborateurs en détresse, laisser mourir des personnes dans la rue, regarder martyriser des enfants ou ne pas s’émouvoir de voir violer ou battre des femmes, ne les trouble pas plus que ça. Dans ce système, les dominants, même s’ils ont été victimes, sont donc les bénéficiaires : ils ont les moyens de s’anesthésier très efficacement en reproduisant la violence sur d’autres. Ce qui n’enlève rien à leur culpabilité : ce sont des crimes qu’ils commettent, et c’est un choix qu’ils font de persévérer dans cette violence.

Tandis que celles qui ont des comportements de retournement de la violence sur elles mêmes, et ne font jamais de mal à personne, sont considérées comme anormales. La preuve, c’est que les jeunes agresseurs/violeurs qu’a suivi Muriel et qui, par un long travail incessant de remise à l’endroit du monde, qui se retrouvent à leur tour conscients que ce qu’ils ont fait est très grave, sont d’un coup moins valorisés qu’avant pour peu qu’ils aient des idées suicidaires ou retournent la violence contre eux-mêmes (2) et sont plus rejetés par leurs familles que s’ils violaient/violentaient d’autres personnes. Et ce non seulement parce que cela se verrait moins (1% de condamnation pour les viols), mais aussi parce que la tolérance de la société à l’égard des violences masculines est immense.

roses
Si la rose existe, le monde peut être à l’endroit

Pour en revenir aux victimes, et finalement à tous les êtres humains, nous avons besoin de redonner de la cohérence au monde. Et de revenir à ce que les enfants savent, ont toujours su au fond:qu’avoir de l’empathie c’est normal. Que de ne pas supporter de voir souffrir des personnes, a fortiori qu’on est sensées aimer (mais dans un monde idéal on pourrait aimer tout le monde), c’est normal. De tout faire pour que ces souffrances s’arrêtent, c’est normal. De ne pas arriver à être dans l’anesthésie inhumaine des dominants, c’est normal.  Il faut aussi dire que depuis le départ ce sont les enfants en nous qui ont raison : vouloir des relations douces et gentilles avec les autres, c’est normal. Que trouver la pornographie inhumaine et criminelle, qui consiste à filmer des tortures sexuelles et physiques à des femmes (certes actrices, mais ça ne change rien) c’est normal. Que de dire que la prostitution c’est du viol et que le viol, c’est la destruction des femmes, ce n’est pas moraliste ni liberticide, c’est juste normal. Que d’avoir envie d’une sexualité libérée de toute forme de violence et de domination, ce n’est pas bisounours, c’est normal. Et que d’aider les personnes qui en ont besoin, c’est normal.

Enfin, il faut encore remettre le monde à l’endroit en confirmant aux victimes ce qu’elles savent et nous disent, si on les écoute :  que même si un jour elles ont été victimes, ce n’est pas une honte, ce n’est pas à elles d’avoir honte. Elles resteront toujours les victimes de ces actes, de ces hommes violents, de cette société qui marche sur la tête, mais elles ne sont pas des victimes en soi. Elles sont des êtres humaines qui ont le droit de vivre selon leur désir et leurs rêves d’enfants, dans un monde remis à l’endroit. Et elles ont le droit qu’on soit contentes pour elles.

C’est ce que fait depuis plus de 10 ans Muriel Salmona, une oeuvre d’humanité et hymne à la vie malgré les crimes contre l’humanité. Mieux, elle commence à être un tout petit peu entendue. C’est ce dont tous les enfants rêvent : un monde à l’endroit, ou aimer c’est partager douceur et attention à l’autre, ou vivre c’est aimer dans l’empathie. Et tant pis si cela semble simpliste à ceux qui tentent de survivre dans un monde à l’envers.

C’est le monde à l’endroit des enfants, celui qui fait dire à une enfant de 8 ans (la mienne) : « l’amour, forcément c’est gratuit, ça ne peut pas s’acheter ».  C’est le monde des enfants, des vivant-e-s, et il serait temps qu’on les regarde, et qu’on les écoute.

Sandrine GOLDSCHMIDT

(1)je m’explique : imaginez un enfant de 2 ans battu par un adulte. C’est découvert, on rompt avec l’adulte. L’enfant ne se souvient pas des sévices. Et puis, un jour, comme il est de la famille, on renoue. Tout à l’air de bien se passer jusqu’à ce qu’on découvre que le garçon s’est mis à son tour à infliger des sévices à un autre, sans que lui-même d’ailleurs y comprenne quoi que ce soit).

(2) Muriel explique que quand elle traite des jeunes agresseurs elle ne les « lâche pas » jusqu’à ce qu’ils remettent le monde à l’endroit et comprennent qu’ils ont fait quelque chose d’inadmissible. « Tu as subi des violences mais tu n’avais pas le droit de faire ça et on va analyser pourquoi tu as pu faire ça : parce que depuis ta naissance le monde est à l’envers, remettons le à l’endroit. Et il n’y a que quand ils dénoncent inlassablement ce monde et leurs actes en ce monde qu’ils peuvent « guérir ».

NON au saucissonage visant à favoriser la thèse du « travail sexuel »

manifslateLe collectif abolition 2012 a envoyé hier au Sénat et à la presse un communiqué de presse expliquant notre position face au travail législatif concernant le système prostitueur.
Le voici, et à télécharger, la note de position du collectif, si vous souhaitez en savoir plus, ici

Proposition de loi « Benbassa » visant l’abrogation seule du délit de racolage
53 associations se prononcent :
CONTRE la stratégie du saucissonnage favorisant la thèse du « travail sexuel » !
POUR une refonte globale, cohérente et transpartisane des politiques publiques en matière de prostitution incluant l’abrogation du délit de racolage !
Paris, le 22 mars 2013
Nos 53 associations de soutien aux personnes prostituées, de lutte contre les violences faites aux femmes et de promotion de l’égalité femmes-hommes sont toutes favorables à l’abrogation du délit de racolage. Elles dénoncent cependant la logique d’abrogation seule du délit de racolage proposée par la proposition de loi examinée au Sénat le 28 mars.
En effet, l’abrogation seule du délit de racolage ne règlera aucunement la question de la précarisation des personnes prostituées. Par ailleurs, elle fragilise quatre années d’efforts associatifs et de travail transpartisan au niveau parlementaire et gouvernemental visant à reconnaître enfin la violence que constitue la prostitution et la nécessité d’adopter des politiques publiques globales et cohérentes en la matière.
Dans ce contexte, et alors que plusieurs travaux parlementaires sont encore en cours à l’Assemblée nationale (délégation aux droits des femmes) et au Sénat (commission Affaires sociales et Délégation aux droits des femmes), la stratégie d’adoption précipitée d’une loi d’abrogation seule du délit de racolage révèle la volonté de mettre à mal la construction d’une politique globale et abolitionniste en France.
La sénatrice Esther Benbassa (EELV) à l’origine de la proposition de loi ne cache d’ailleurs nullement son engagement pour la reconnaissance du « travail sexuel » et contre la pénalisation des clients,  ni son soutien financier, sur sa réserve parlementaire, au STRASS, lobby pro-prostitution qui milite notamment pour la « décriminalisation du travail sexuel » mais aussi contre la reconnaissance de la prostitution comme une violence, contre l’interdiction de tout achat d’un acte sexuel mais aussi pour l’abrogation des lois de lutte contre le proxénétisme[1].
Nos associations rappellent que :
– La prostitution s’inscrit dans une longue tradition patriarcale de mise à disposition du corps des femmes au profit des hommes (droit de cuissage, viol, viol conjugal, harcèlement sexuel) et constitue, en soi, un obstacle à l’égalité.
– La répétition d’actes sexuels jamais désirés car imposés par l’argent et la précarité est, en soi, une violence.
– La marchandisation de l’accès au corps et à la sexualité de l’autre est incompatible avec le respect de la dignité de la personne humaine.
C’est pourquoi, nos associations, tout comme le Rapport d’information parlementaire sur la prostitution en France (2011), insistent sur la nécessité d’adopter enfin une politique globale et respectueuse de l’engagement international abolitionniste de la France. Cette politique devrait s’articuler autour de quatre axes :
I- De véritables alternatives à la prostitution, y compris pour les personnes étrangères.
II- L’ inversion de la charge pénale : une exigence de justice et de protection des femmes !
III- Le renforcement de la politique pénale de lutte contre le proxénétisme.
IV- Une politique ambitieuse d’éducation à l’égalité et à la sexualité, de prévention et d’information.
[1] Positions publiques du STRASS en matière de proxénétisme :
« Cela inclut donc d’abroger les lois sur le racolage et le proxénétisme qui nous empêchent d‘organiser notre travail »
« La pénalisation du proxénétisme est surabondante et ne sert qu’à stigmatiser les travailleurSEs du sexe. L’application du droit commun permettrait le rétablissement des travailleurSEs du sexe dans leurs droits fondamentaux. »
Mouvement du Nid, Fondation Scelles, Amicale du Nid, EluEs Contre les Violences faites aux Femmes, regards de femmes, Assemblée des Femmes, Coordination française pour le Lobby Européen des Femmes, Osez Le Féminisme, Femmes pour le Dire Femmes pour Agir, Conseil National des Femmes Françaises, Choisir la cause des femmes, L’égalité c’est pas sorcier, Femmes solidaires, Clara Magazine, CATW Europe, Réseau féministe «Ruptures», Mémoire traumatique et victimologie, Femmes en résistance, Commission genre et mondialisation d’ATTAC, Solidarité femmes, Le monde à travers un regard, CRIFIP, Association française des Femmes de Carrières Juridiques, Les Trois Quarts Du Monde, Lobby européen des femmes, Espace Simone de Beauvoir, Équipes d’action contre le proxénétisme, Collectif alouette, Collectif Féministe Contre le Viol, L’escale, Mouvement des Jeunes Femmes, Association Contre la Prostitution des Enfants, Collectif National Droits des Femmes, Coordination des Associations pour le Droit à l’Avortement et à la Contraception, Collectif Fièr-e-s et révolutionnaires du PCF, SOS les mamans, CNIDFF, Mouvement national le CRI, Comité permanent de liaison des associations abolitionnistes du proxénétisme, ZéroMacho, Marche Mondiale des Femmes, Zonta Club de France, Association Femmes Libres, Collectif lesbiennes-féministes-ba-ham, Chiennes de garde, CLF, SOS Sexisme, Association FIT une femme un toit, Collectif les moutons noirs, Collectif Encore féministes !, Les efFRONTé-e-s, Réseau Rajfire, AVFT, Fédération National GAMS, MUE, Maison des femmes.

Le 13 avril, ensemble, construisons un monde sans prostitution !

afficheLe 13 avril, le collectif Abolition 2012 organise un événement pour prononcer l’Abolition citoyenne du système prostitueur.
Parce que la prostitution et son corollaire la pornographie sont des violences indigne d’une société de droits humains et un verrou de la violence des hommes contre les femmes.
Des personnalités publiques, viendront exprimer devant les politiques pourquoi elles nous soutiennent dans notre demande d’une loi globale d’abolition du système prostitueur. Une loi qui commence par demander la suppression de toute mesure de pénalisation des personnes prostituées (donc abrogation du délit de racolage), qui prévoie des mesures d’accompagnement à la sortie de la prostitution pour elles, qui lutte efficacement contre le proxénétisme et inverse la charge pénale vers ceux  qui tirent profit de l’achat d’un acte sexuel : les clients-prostitueurs.

Pour tout savoir sur cet événement qui se déroulera dans la salle de concert « La Machine du Moulin Rouge », 90 boulevard de Clichy à Paris, le 13 avril de 13h30 à 18h, et pour vous inscrire, rendez-vous sur le blog créé pour l’occasion : abolition13avril.wordpress.com

Par ailleurs, vous pouvez suivre abolition2012 sur twitter : @abolition2012 et sur Facebook : http://www.facebook.com/abolition2012?ref=ts&fref=ts

Si vous souhaitez vous inscrire directement : http://www.emailmeform.com/builder/form/ff6Hg04w82bU8y72Q

On vous attend nombreuses et nombreux !

Et pour faire suite à mon dernier article, une bonne nouvelle ! Le Comité consultatif national d’éthique a rendu un avis négatif sur la question de l’assistance sexuelle des personnes handicapées, qu’on pourrait résumer ainsi : « La société ne doit pas réparation aux frustrations sexuelles des hommes. Personne n’a le droit d’utiliser sexuellement un-e autre ».

Voici sa conclusion :

« Si la sexualité peut être source de plaisir, elle peut être aussi le champ de toutes les violences y compris lorsqu’elle ne peut se vivre. Force est de constater qu’il n’y a pas une norme qui serait celle de l’harmonie et de l’équilibre, mais une réalité plurielle dont nous devons prendre conscience, plus ou moins brutalement, plus ou moins crûment. La complexité de ce qui y est mis en jeu nous oblige à entendre les questions dérangeantes sur la dignité, la vulnérabilité, et les limites de ce qui est éthiquement acceptable.

En conséquence en matière de sexualité des personnes handicapées, le CCNE ne peut discerner quelque devoir et obligation de la part de la collectivité ou des individus en dehors de la facilitation des rencontres et de la vie sociale, facilitation bien détaillée dans la Loi qui s’applique à tous. Il semble difficile d’admettre que l’aide sexuelle relève d’un droit-créance assuré comme une obligation de la part de la société et qu’elle dépende d’autres initiatives qu’individuelles ».

La morte la plus sexy du 21e siècle

DSCF6237Ce serait presque sans commentaire…avec une capture d’écran… Mais je ne veux pas contribuer à la voir « fleurir sur les murs de mes amis »; Alors je vous mets juste la partie texte. Et vous dit qu’au dessus, on voit la n°1, la chanteuse Beyoncé, en tenue de spectacle pour homme, du dessus des genoux au bas du cou. Sans tête, donc morte, sans pieds, donc inerte et immobile.

Capture d’écran 2013-01-19 à 13.20.55

On va m’objecter : ce n’est pas qu’on lui a coupé la tête, mais qu’on la garde pour la page d’après…oui, sauf que le titre est là, la photo est là, le mal(^e) est là…

Et de toutes façons, le principe même du classement bien sûr est non seulement débile, mais sexiste et mortifiant pour les femmes, qui ne sont plus des êtres humaines, mais des objets sexys. Et du coup, j’ai envie de vous livrer cette réflexion…

Les normes sexistes ont toujours existé, le patriarcat aussi, mais ils me semblent qu’elles changent de forme avec les périodes et lieux de l’histoire… Ainsi, depuis  1900, elles se font de plus en plus mutilantes et mortifiantes dans les images. Cet article du Monde qui cette semaine disait qui était « la femme parfaite » en 1912 montre comment les normes étaient alors bien différentes…

Bien sûr, déjà, le thème était débile, sexiste, androcentré…mais la représentation des femmes étaient moins violente (et avec tête sur le dessin qui accompagne l’article). Je ne veux bien sûr pas par là exonérer les précédents patriarcats de toute domination et oppression. Mais je me dis qu’ alors, les normes légales étaient plus pesantes pour les femmes, et qu’aujourd’hui, la loi, même souvent très mal appliquée, est relativement égalitaire. Il a donc bien fallu que le patriarcat renouvelle ses méthodes, en imposant un bombardement systématique de normes en images de femmes mortes ou mutilées, en les poussant à revendiquer elles-mêmes la « liberté » de le faire, pour pouvoir assurer sa pérennité…

S.G

 

Galerie photos : femmes en soldes

Et oui, en soldes !
Et oui, en soldes !

C’est les soldes. Les femmes, en solde ? Bon, celle ci a une tête, mais…oui, pas besoin d’être en Allemagne où les effets de la légalisation du proxénétisme font qu’il y a des soldes de femmes et des packages réduits avec des femmes. Ici aussi, les femmes sont, au choix, en solde, ou sans tête, ou aux fourneaux…à travers tous ces objets que j’ai photographié dans le même magasin,  de Bercy-Village, censé vendre des « objets design ». Un magasin qui vend des objets chers qui ne servent à rien. Il paraît qu’on est en crise…mais non, la misogynie, la pornification et le sexisme ne sont pas en crise. Juste parfois en soldes.

 

Rétro (5) : abolition de la prostitution !

25 novembre : Abolition !
25 novembre : Abolition !

EN 2011, le rapport Bousquet-Geoffroy remis le 13 avril, la convention abolitionniste du 29 novembre à l’Assemblée nationale qui a lancé le collectif Abolition 2012, la réaffirmation unanime par les députés de la position abolitionniste de la France le 6 décembre (et ici, je réponds d’avance à l’argument : il n’y avait personne dans l’hémicycle…oui, c’est toujours ainsi quand il n’y a pas de doute sur le vote, on délègue au responsables de groupe de voter, et cela se passe très souvent comme ça…enfin, rarement à l’unanimité, comme ici !).

En 2012, la position abolitionniste de la prostitution, qui est là Pour les personnes prostituées, et contre le système prostitueur, a encore marqué des points. Avec la prise de position de la ministre du droit des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, et la visibilisation progresive (mais il y a encore du chemin), de notre combat, qui fait qu’il y  a aujourd’hui plus de 50 associations dans le collectif.
Chacune, chacun peut d’ailleurs se solidariser en signant ici l’appel Abolition 2012 : http://www.abolition2012.fr

En 2013, nous continuerons à nous mobiliser, à essayer d’élargir l’espace public d’une position bien plus partagée que les médias ne voudraient le faire croire, et à lutter contre des mensonges et de la propagande qui voudraient faire croire que la réalité de la prostitution est autre que ceci : Les témoignages qui disent la réalité de la prostitution, sans strass (1)

Et nous le ferons, toujours, AU nom du rêve de Rebecca Mott

abolition20121-La  réalité de la prostitution : 

Les anti-abolitionnistes voudraient faire croire que la prostitution, et le règlementarisme, c’est glamour. Ou que la Suède, c’est l’enfer pour les personnes prostituées. La réalité, c’est ceci :

A voir ou revoir, le film qui, en 26′, dit tout (par Marie Vermeiren) :

Pas à vendre

Les survivantes de la prostitution, savent de quoi elles parlent. Malgré les menaces dont elles sont l’objet, les campagnes de dénigrement, elles ont le courage de continuer à dire :

Survivers connect network

Le règlementarisme, ça donne ça :

Grèce : les dérives du réglementarisme

Alors que quand les femmes ne sont pas à vendre, c’est toute la société qui change :

En Suède les femmes et les hommes ne sont pas à vendre

Et la réalité de la prostitution, est très éloignée de ce qu’en fait l’imposture médiatique :

Le front abolitionniste en 2012 comme en 2011

Et vouloir le règlementarisme, c’est aussi vouloir ça :

Paul emploie des seins nus

La réalité, jusqu’au bout :

Jusqu’au bout de l’horreur

logo-abo20123.jpg2-Pourquoi l’abolition, c’est la seule solution : une question de droits humains

Voici quelques textes qui exposent les fondements éthiques de nos positionnements. Il ne s’agit rien moins que de défendre qu’enfin les femmes soient des êtres humains avec des droits humains. Il s’agit aussi de défendre la liberté, la vraie. Et de repérer la propagande.

Abolir le système prostitueur pour réaffirmer les droits humains

Abolir la violence qu’est le système prostitueur

Pourquoi l’abolition ? Pour la liberté

Abolition 2012 : dernière violences des hommes contre les femmes que la loi ne condamne pas

Dénoncer l’oppression sans la reproduire

Apocalypse NO

Pour ou contre l’abolition de la prostitution (rue 89)

Année des femmes sans tête

3- L’imposture médiatique

Le discours sur la prostitution, principalement dans les médias, c’est beaucoup de mensonge. Et c’est une place démesurée donnée à la parole des anti-abolitionnistes. Pour peu qu’ils soient des hommes, et contre la pénalisation du client, on leur donne la parole.  Heureusement, à force d’explication, de persévérance, nos arguments commencent à être entendus. Mais il y a encore des murs à faire tomber. Comme l’a montré récemment l’affaire « Ce soir plus jamais » (voir ci-dessous)

L’imposture médiatique

Pas cher Patrick Bruel

Ce soir plus jamais

Ecrivons à France Télévisions

Réponse aux intellectuels anti-abolitionnistes : un peu de sérieux

Une femme sans tête c’est une morte

Benzema et Ribery en correctionnelle

Hasta la vista la sexualité des hommes en situation de handicap

4-Les événements abolitionnistes de l’année

Nous nous sommes intensément mobilisées, avec le collectif Abolition 2012, de la manifestation du 8 mars à l’appel de Bruxelles en 704650_10151316381924743_215429974_opassant par le Divan du monde et le 25 novembre. Voici.

L’appel de Bruxelles :

Videos de l’appel de Bruxelles,

SIgnez l’appel de Bruxelles

Victor Hugo aurait signé, et vous ?

Après les déclarations de Najat Vallaud-Belkacem

Abolition 2012 : féministes et donc pour une politique cohérente et entière en matière de prostitution

Les personnes prostituées soutenues au niveau de l’Etat

Fêterons-nous l’abolition du système prostitueur aux 3e rencontre FEM ?

Abolir le système prostitueur, l’engagement qui changera la vie des femmes

Le 13 avril au Divan du monde, conférence de presse, avec en particulier l’intervention en sketch de Typhaine Duch

Abolitionnistes et fièr-es de l’être, suite des videos

Abolitionnistes et fièr-es de l’être

Abolition 2012 au Divan du monde : vidéos de Typhaine Duch

Le 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes

8 mars : pas d’égalité sans abolition de la prostitution

Le 25 novembre, journée de lutte pour l’élimination des violences faites aux femmes

Manif du 25 novembre
Manif du 25 novembre

Vidéo abolitionniste du 25 novembre

25 novembre : une belle journée en photos

8 mars : les femmes ne sont pas des marchandises

5-Ressources

Enfin, quelques articles qui vous donnent des liens indispensables vers d’autres articles que les miens, et en particulier le scoop.it de Fée ministe

Revue de presse d’indispensables

Scoop.it Abolition 2012

Abolition 2012 : sommaire et ressources pour comprendre

Ressources indispensables sur la prostitution

Je rêve qu’un amour sans tyrannie soit possible

Voilà, n’hésitez pas à vous servir de tout ça pour convaincre, et à diffuser à vos contacts !

S.G

Revue de presse d’indispensables

Photo Hélène Epaud

C’est  bien aussi de se faire plaisir : on dénonce parfois les horreurs qui sont écrites ici ou là (Badinter and co…) et puis on lit des écrits ou des résumés passionnants.Et on peut dir que ces jours-ci, nous n’en manquons pas. Avec des articles féministes et féministes radicaux, qui touchent notre intelligence par leur pertinence. Revue de presse

Ce soir, sur le blog d’Antisexisme : Sexisme et sciences humaines, féminisme « Un blog féministe pour déceler les mécanismes sexistes qui maintiennent les inégalités entre hommes et femmes », un article sur l’ouvrage de la féministe radicale Andrea Dworkin sur les femmes de droite.

http://antisexisme.wordpress.com/

A lire, en attendant si vous souhaitez de le commander il vient de paraître et s’envole déjà dans les librairies québécoises, selon un de ses traducteurs, Martin Dufresne, et arrivera en Europe en mars. Libraires et individus peuvent le commander à la Librairie du Québec 30 Rue Gay-Lussac 75005 Paris, France +33 1 43 54 49 02 :

Tout y est particulièrement lumineux dans l’optique de l’actualité. Je citerai ce passage, sur la violence reproductive :

Dworkin fait ensuite une comparaison entre le modèle de la ferme et le modèle du bordel.
Selon elle, le modèle de la ferme, qui sert au sexe et à la reproduction, est peu efficace. Il implique une relation particulière entre le fermier et sa terre. Le fermier peut ressentir certains sentiments, une certaine tendresse et compassion pour sa terre, même s’il l’exploite. De plus, il y a une certaine valorisation de la maternité.
A l’inverse, le modèle du bordel, qui sert seulement au sexe, est très efficace. Le joug est trop lourd. Les femmes n’arrivent pas à se rebeller collectivement.
Le modèle de la ferme a connu quelques rebellions. Le fait qu’il y ait eu les luttes féministes, formées par des femmes issues de ce modèle, démontrent son inefficacité.

Dworkin pense que les technologies reproductives vont permettre l’application du modèle du bordel à la reproduction. La reproduction va devenir une marchandise comme l’est déjà le sexe.

Ainsi, pour celles et ceux qui aujourd’hui défendent la prostitution utérine, autrement appelée GPA, dont je parlais en début d’année dernière :

https://sandrine70.wordpress.com/2010/12/14/la-gpa-pour-ou-contre/

 

dénoncée à nouveau aujourd’hui par Christine Le Doaré :

http://christineld75.wordpress.com/2012/12/20/elisabeth-badinter-et-irene-thery-ou-la-caution-intellectuelle-du-systeme-patriarcal

 

et par Osez le féminisme ici : http://www.osezlefeminisme.fr/article/gestation-a-tout-prix

Par ailleurs, toujours pas de réaction à nos réactions au tapis rouge déroulé à un proxénète lors de l’émission de Taddeï Ce soir ou jamais. Et ce malgré les multiples protestations envoyées à la chaîne :

Avec la remarquable réponse de Sophie Péchaud : http://avft.org/article.php?id_article=685

Cet article de Christine à nouveau sur la question de la prostitution toujours : http://christineld75.wordpress.com/2012/12/18/au-fond-qui-estime-vraiment-les-personnes-prostitue-e-s/

Elle y cite un réseau à connaître absolument, pour répondre à l’idée que des associations comme le Strass seraient représentatives des personnes prostituées -ce qui ne résiste pas à l’anayse : http://christineld75.wordpress.com/2012/12/18/au-fond-qui-estime-vraiment-les-personnes-prostitue-e-s/

Un article intéressant de Mona Chollte dans Le Monde diplomatique : la maman et la putain, le retour, qu’elle conclut ainsi :

Exercer un métier qui vous plaît, exister socialement par des compétences autres que maternelles ou de séduction, et en retirer l’indépendance financière qui permet de coucher avec qui on désire : quand on est une femme, surtout si on n’est pas née avec une cuillère en argent dans la bouche, ça n’a jamais été vraiment gagné. Désormais, il semblerait que ce ne soit même plus un objectif.

Enfin, une émission à écouter, sur Radio Libertaire, avec Justine Rocherieux, coordinatrice Ile-de-France du Mouvement du Nid, qui parle du travail de terrain de l’association auprès des personnes en situation de prostitution, et de la mobilisation abolition2012

http://media.radio-libertaire.org/backup/51/mercredi/mercredi_1830/mercredi_1830.mp3

 

Ce soir plus jamais ! par Sophie Péchaud de l’Avft !

Ce soir je remercie Sophie Péchaud, présidente de l’AVFT, pour bien vouloir que je publie sa réponse à Frédéric Taddeï. Elle a attentivement regardé l’émission et y répond très clairement.

logo-abo20123.jpg(…) Et quelque fois, je dois le faire une deuxième fois, de préférence une sodomie, 

 alors on me caresse pour me préparer, du bout des doigts ou avec la langue, et je ne peux que céder car ni la perspective de la douleur ni celle du dégoût ne saurait renverser chez eux la certitude du plaisir que j’y trouve, et je dis non et ils disent j’y vais doucement, tu verras, ça fait du bien, mais oui c’est vrai, ça fait du bien, ça fait mal doucement, et que vaut cette douleur à coté de leur joie, qu’est ce qu’avoir mal lorsqu’on est moi, qu’est ce que vouloir, penser ou décider lorsqu’on est pendue à tous les coups, à toutes les queues, les pieds dans le vide, le corps emporté par cette force qui me fais vivre et qui me tue à la fois (…)« Putain », Nelly Arcan[1] 

 

« Filles de joie » 

 

On y croirait presque ce 11 décembre, à regarder « Ce soir ou jamais », cette émission toute rose comme un bonbon. L’animateur Frédéric Taddéï à invité le proxénète Dominique Alderweireld (qu’il appelle « Dodo la saumure »), à une petite causerie intime en face à face, entre amis.

 

Avant, on a pu entendre -entre autres- Jacques Attali vanter le « bonheur de penser », Corine Maier faire la publicité de son dernier livre, « le manuel du parfait arriviste », et Mathieu Laine présenter le « Dictionnaire du libéralisme ». Cerveaux lavés, essorés, oxymorés, préparés, n’en jetez plus, place à une autre entreprise de propagande : la réhabilitation du proxénétisme et de l’esclavagisme sexuel des femmes par les hommes. La valorisation du viol organisé. La préparation du retour sur la scène politique de Dominique Strauss Khan un jour prochain, soyons-en sûres.

 

« Filles de joies », « Maison du plaisir »… alors s’ils le disent…

Et si c’était ça la liberté de penser ? Et si le proxénétisme c’était juste une activité économique libérale, comme une autre ?

Ce Dominique Alderweireld, il a l’air gentil. Et puis c’est Frédéric Taddéï qui le dit en le présentant : « Vous n’avez pas été inquiété dans cette affaire[2], vous n’êtes pas inculpé ». On dirait un papi, un peu gras et chauve. Il ne fait pas peur « Dodo », on voit même des cadrages de caméra montrant ses grosses mains pataudes et la sueur sur son front.

 

Mais de quoi parlent-ils tous les deux, assis à ce bar avec leurs coupes de champagne ?

 

« Oui la vie m’a traversé, je n’ai pas rêvé, ces hommes, des milliers, dans ma bouche, je n’ai rien inventé de leur sperme sur moi, sur ma figure, dans mes yeux, j’ai tout vu et ça continue encore, tous les jours ou presque, des bouts d’homme, leur queue seulement, des bouts de queue qui s’émeuvent pour je ne sais quoi car ce n’est pas de moi qu’ils bandent, ça n’a jamais été de moi, c’est de ma putasserie, du fait que je suis là pour les sucer, les sucer encore, ces queues qui s’enfilent les unes aux autres comme si j’allais les vider sans retour (…) tandis qu’ils s’affolent dans les draps en faisant apparaître ça et là un visage grimaçant, des mamelons durcis, une fente trempée et agitée de spasmes, tandis qu’ils tentent de croire que ces bouts de femme leur sont destinés et qu’ils sont les seuls à savoir les faire parler, les seuls à pouvoir les faire plier sous le désir qu’ils ont de les voir plier ». P.19

 

« On a l’impression que c’est un métier comme les autres, de commerçants, c’est comme si vous teniez un salon de coiffure »F.Taddéï. 

 

Et oui, un « salon de coiffure ». Et si Frédéric Taddéï peut comparer le fait de tirer des bénéfices de la location d’un sexe au profit d’un tiers, à un salon de coiffure, c’est qu’il n’a jamais mis les pieds dans un salon de coiffure ou… qu’il ment effrontément. Forcément.

Mais ce soir, le négatif est le positif. Le blanc c’est le noir, la guerre c’est la paix. Ce qu’il s’est passé ce mardi soir est d’une gravité sans nom. Plus qu’un mensonge ou une litanie de stéréotypes dont les médias nous habituent, ce moment télévisuel était un simulacre de discussion, une théorie, organisée et construite exclusivement autour de la promotion, de la banalisation du viol et de la domination masculine. On a assisté à une véritable inversion des repères, un brouillage méthodique de la raison.

Jugez plutôt.

1- Masquer le réel

Pas une seule fois, l’animateur ne précise en quoi consiste le fait de prostituer une personne. Cela n’est jamais expliqué. « En Belgique c’est autorisé », en France « c’est interdit ». « C’est » c’est quoi ?

L’animateur -qu’il faut s’interdire d’appeler journaliste- fait siens des mots du proxénète : « dans un établissement comme le vôtre », « Maison de joie », « votre métier », « votre profession », « activité économique », « call-girl de luxe », « bon proxénète », « salon de coiffure », « commerce », « agent de mannequin » «  maison de tolérance » etc. Succession indécente d’euphémismes frisant la folie.

Ne pas expliquer ce qu’est la prostitution, ne pas utiliser une seule fois les mots fellation, pénétration, sodomie, sexe, sperme, poils, peau, douleur, vagin, anus, bouche, sang, violence, c’est laisser chacun-e avec sa propre représentation, voire son fantasme personnel de ce qu’est la prostitution. Ce déni de réalité permet aux agent-es de la propagande règlementariste dont font partie – Alderweireld et Taddéï- de pouvoir affirmer qu’il est préférable de se prostituer que de travailler à la chaine. Quelle différence puisque justement on n’explique pas la différence ?

À travers cette assertion bien rodée et récurrente (avec quelques variantes comme charpentier, œnologue (si si), caissière), les personnes militant pour la réglementation (et donc la légitimation ) de la prostitution la présentent comme un banal métier certes douloureux et pénible, mais ça arrive à tout le monde, regardez les travailleurs à la chaine. Alors c’est bien, c’est normal. C’est comme ça.

D’ailleurs, le public lui non plus il ne dit rien. Régulièrement, on voit des gros plans d’hommes et de femmes dans le public, des gens comme nous, qui écoutent bien sérieusement « Dodo ». Ils n’ont pas l’air offusqués non. Il y a même une femme qui sourit un peu. Une femme en plus !. C’est donc que tout est normal, pas de raison de s’énerver.

« Et il suffit de (…) deux ou trois clients pour comprendre que voilà, c’est fini, que la vie ne sera plus jamais ce qu’elle était, il a suffit d’une seule fois pour me trouver prise dans la répétition de la queue dressée sur laquelle je butte encore, ici dans cette chambre, le petit soldat mécanique qui n’a pas la notion des murs, qui continue sa marche vers la mort même tombé de côté, (…) les larmes sans tristesse qui glissent sur les queues qui fouillent ma gorge, dans l’attente de l’orgasme et même après, dans l’âpreté du sperme ». P .22

2- Inverser la réalité

« Les filles sont des électrons-libres »D. Alderweireld 

 La liberté d’être violée. Elles sont responsables puisqu’elles sont libres de se prostituer ou non. Voilà ce que sous-entendent Taddéï et Alderweireld.

« Ce sont les femmes qui initient le souteneur » dit le proxénète.

« Si on vous entend, on a l’impression que chez vous, c’est elles qui commandent, elles viennent quand elles veulent, elles font ce qu’elles veulent », explique l’animateur qui préfère les « impressions » aux questions.

«J’en dépends économiquement, je suis obligé de me soumettre » dit le proxénète.

« Vous dépendez plus d’elles, qu’elles ne dépendent de vous » dit l’animateur

«Ha certainement !» dit le proxénète.

Le «patron» soumis et dépendant de ses «salariées» qui font ce qu’elles veulent, c’est bien la seule fois qu’on nous fait ce coup là ! Ainsi faudrait-il voir la prostitution non seulement comme un travail, mais aussi comme un domaine où tous les rapports sociaux et hiérarchiques sont inversés !

« De toute façon, la fille vient chez nous, elle essaye (quoi ? des vêtements ?) et si ça convient pas, elle repart » dit le proxénète. Magique ! La période d’essai est aussi à l’avantage de la prostituée !

3- Troubler les repères

« Je préfère le terme de souteneur, car je soutiens les femmes. Elles ont besoin de soutien moral, c’est un métier marginal, il y a beaucoup de contraintes, donc elles ont besoin d’alter égo, qui puisse les comprendre, les aider (…) il faut quelqu’un qui les fasse un peu rêver » dit le proxénète gras, chauve et suant.

Ainsi le proxénète qui met à disposition des autres, le vagin, l’anus et la bouche des femmes et qui en tire profit, est un ami, un confident, un charmeur. Non, non, pas un proxénète, un charmeur on vous dit.

« Dodo » est un charmeur de serpent qui, avec son acolyte Frédo essaie de nous endormir avec sa petite musique patriarcale.

4- Essentialiser/justifier la violence à l’encontre des femmes

« Et de raconter ces une, deux, trois mille fois où des hommes m’ont prise ne peut se faire que dans la perte et non l’accumulation, d’ailleurs vous les connaissez déjà, les cent vingt jours de Sodome, vous les avez lus sans avoir pu tenir jusqu’à la fin, et sachez que moi j’en suis à la cent vingt et unième journée, tout à été fait dans les règles et ça continue toujours, cent vingt-deux, cent vingt-trois (…). P .26

« C’est une profession naturelle, il y a un besoin » dit le proxénète féru de Grèce antique, puisqu’il se plait même à évoquer l’épouse de Périclès afin de nous prouver que la prostitution existe depuis le 5ème siècle avant JC.

 

On la connaît la chanson. Elle est si fatigante qu’il est éreintant de répéter inlassablement les mêmes choses, toujours… Le fait que la prostitution existe depuis trop longtemps, n’est pas une raison pour l’accepter. Le lien de cause à effet n’existe pas. Les meurtres existent depuis toujours, pourtant ils sont interdits. Il n’y a pas d’immanence de la violence, les femmes ne doivent pas être à jamais assujetties à la violence des hommes. On peut décréter et lutter pour le contraire. C’est même une condition de survie et de santé mentale.

5- Libéraliser la domination masculine

« Je touche 50% du brut, ça me laisse 20%, je paye l’électricité, la TVA, enfin tout ça… (…)  À l’époque, il existait des placeurs, des impresarios qui plaçaient les filles en France et à l’outremer » dit le proxénète.

« ah, des souteneurs, mais à l’exportation » dit l’animateur

«  Non pas à l’exportation, à l’importation ».

Import, export, TVA, frais fixes…

puisqu’on vous dit que le proxénétisme est un métier comme les autres !

« Et puis baiser, moi sur le dessus et enfin en petit chien, voilà ce que je préfère car il n’y a que les sexes qui se touchent, je peux grimacer comme je l’entends, pleurer un peu aussi et même jouir sans que ça se sache, et tout doit être fait, six, sept, huit fois de suite avec six, sept, huit clients différents et après c’est entendu, je peux m’en aller et m’en aller où pensez-vous, chez moi, eh bien non car je ne veux pas rentrer chez moi, je veux seulement mourir au plus vite ». P.27

6- Faire peur avec un état sécuritaire

À la fin, Taddéï commence à s’inquiéter :

« N’importe qui organise une cérémonie d’enterrement de vie de garçon peut devenir proxénète ? (…) même celui qui ne sait pas qu’il a à faire à des prostituées ? (…)  « Tous ceux qui enterrent leur vie de garçon sont des proxénètes ?»

À quoi ressemble la vie de Monsieur Taddéï, qui n’imagine pas qu’un enterrement de vie de garçon peut se passer de prostituées ? Pensez donc, tous ces innocents croyant s’amuser entre amis parce qu’il est de tradition de payer une femme pour avoir accès à son sexe et à son anus, la veille de s’unir avec une autre femme « pour toute la vie ». Une bonne excuse pour un viol entre amis.

La peur d’un état répressif et sécuritaire est perpétuellement avancé par les règlementaristes qui font même croire que la masturbation deviendrait interdite, qu’un taxi transportant une seule fois un client ou qu’un pharmacien vendant des préservatifs à un client de prostituées, pourrait être condamné à 10 ans de réclusion.

Si un état qui condamne réellement à hauteur des crimes, ne peut se concevoir sans une réelle politique d’information, de sensibilisation et d’aide aux victimes, à l’inverse : une politique d’information, de sensibilisation et d’aide aux victimes n’est opérante que si les auteurs de violences sont fermement condamnés. Ce n’est pas l’un ou l’autre, c’est les deux en même temps ou rien du tout.

Et rien du tout, c’est maintenant.

« Le supplice de la goutte d’eau qui frappe obstinément le même point au milieu du crâne, vous ne pouvez pas savoir ce que c’est que tous ces hommes qui ne veulent pas penser qu’il y a une limite à ce qu’une femme peut donner et recevoir, ils restent sourds à ce qu’elle ait une fin (…) ils ne comprennent pas que ce commerce n’est possible que grâce à un pacte sur la vérité qu’il ne faut surtout pas dire et qu’il faut croire ailleurs, quelque part dans l’illusion. » P.48

Ce pacte sur la vérité, cette illusion que dénonce Nelly Arcan dans son livre « Putain », Frédéric Taddéï et le proxénète Dominique Alderweireld, l’entretiennent consciemment avec le cynisme outrancier des gens qui ont le pouvoir et qui se protègent entre eux.

C’est une machine de guerre qui s’est déployée contre nous les femmes, ce soir là comme tous les jours, mais dans le public, personne n’a bougé.

Pourtant l’émission était en direct. Tout était possible. Il y avait de quoi soulever toute l’assemblée. Les gens auraient pu quitter le studio. Les femmes auraient pu interpeller le proxénète et l’animateur. Elles se seraient levées, accompagnées des hommes et c’est à une véritable bagarre qu’on aurait pu assister. Rokhaya Diallo présente sur le plateau -si investie dans la lutte contre le racisme et le sexisme- aurait pu se lever et les interrompre. Elle leur aurait demandé pourquoi la majorité des femmes prostituées -comme Nelly Arcan- ont subies des violences sexuelles dans leur enfance ? Elle aurait été soutenue par Paul Ariès, politologue qui venait parler de la pauvreté. Il aurait pu dire combien la pauvreté est un facteur déclenchant et déterminant chez les personnes prostituées. Tous auraient pu boycotter l’émission. Affirmer officiellement leur désaccord qu’un tel discours puisse se tenir sur une grande chaine nationale du « service » public.

Rien n’a bougé. Rokhaya s’est contentée de grimacer, Paul Ariès avait un sourire inexpressif et les gens dans le public ressemblaient à des pantins de cire, sans âme. C’était pourtant une question de dignité.

 

« Parfois lorsque je suis seule ici et que rien ne se passe, je reste immobile dans le lit en écoutant le bruit de la vie qui s’anime dans l’immeuble, des casseroles qui s’entrechoquent dans la cuisine du voisin, des chasses d’eau provenant d’un lieu indéterminé, de quelque part en bas à gauche, j’écoute le trafic et les klaxons sur Doctor Penfield en prenant conscience qu’il n’est pas possible qu’on ne m’entende pas, la voix d’une femme qui jouit peut percer tous les murs, se rendre jusqu’au lobby, ma voix doit se rendre dans la rue pour se perdre dans la cacophonie urbaine, pour mourir entre deux klaxons, et dans la certitude d’être entendue par la vie qui s’anime autour je m’exerce à parler de tout haut comme le font les gens fous, je parle de tout et de rien sans m’interrompre pour qu’il n’y ai pas de trous entre les mots, pour que ça ressemble à une prière, et il faut que les mots défilent les uns sur les autres pour ne laisser aucune place à ce qui ne viendrait pas de moi (…) je m’adresse à ce qui se tient ici en sachant que ça ne sert à rien, qu’à parler sans arrêt, ça ne sert à rien, mais il faut s’entêter pour ne pas mourir sur le coup d’un silence trop subi, tout dire plusieurs fois de suite et surtout ne pas avoir peur de se répéter, deux ou trois idées suffisent pour remplir une seule tête, pour orienter toute une vie ». P.65.

Les extraits sont tirés du livre « Putain » de Nelly Arcan, édition Points/2001. Nelly Arcan est née en 1975 au Québec. Elle a vécu à Montréal où elle a été prostituée pendant plusieurs années dans une « agence » comme celle de Dominique Alderweireld . Son livre relate les violences sexuelles incestueuses qu’elle a subies enfant ainsi que de son « expérience » en tant que prostituée. Elle s’est suicidée en septembre 2009, à 36 ans.

Dominique Alderweireld quant à lui, a été condamné en juin 2012 en Belgique à 5 ans de prison avec sursis pour ses activités de proxénétisme à la frontière franco-belge. Ce dernier a été reconnu coupable de diriger une organisation criminelle spécialisée dans la prostitution et d’avoir abusé de la vulnérabilité de deux des prostituées qu’il employait. Il a été également reconnu coupable d’avoir consommé et fourni de la cocaïne aux femmes prostituées, d’avoir commis des faux pour masquer la véritable activité de celles-ci, et d’avoir blanchi ses revenus. Source Figaro.fr Publié le 21/06/2012.

Sophie Péchaud

présidente de l’AVFT

/////////////////

 

Notes :

[1] P. 22. Tous les autres extraits sont tirés de ce même livre : « Putain » de Nelly Arcan Edition Points/septembre 2009

[2]  L’affaire dont parle Taddéi sans l’expliquer concerne la mise en examen de Dominique Strauss Khan pour viols en réunion et proxénétisme à l’hôtel du Carlton de Lille, auquel Dominique Alderweireld aurait participé en étant le proxénète des prostituées « livrées » à DSK.

Voir aussi :

http://leplus.nouvelobs.com/contribution/736763-dodo-la-saumure-invite-chez-taddei-sur-france-3-une-interview-honteuse.html

https://sandrine70.wordpress.com/2012/12/14/dodo-la-saumure-chez-taddei-ecrivons-a-france-tele-le-csa-et-la-ministre/

 ——

Et je rajoute le dernier article de Christine Le Doaré : http://christineld75.wordpress.com/2012/12/18/au-fond-qui-estime-vraiment-les-personnes-prostitue-e-s/,

Appel de Bruxelles : Victor Hugo aurait signé, et vous ?

hugo« On dit que l’esclavage a disparu de la civilisation européenne. C’est une erreur. Il existe toujours, mais il ne pèse plus que sur la femme, et il s’appelle prostitution. »
Victor Hugo a écrit ceci en 1862. Demain à Bruxelles, aura lieu un événement international exceptionnel qui pourrait permettre d’enfin avancer vers une Europe libérée de la prostitution.

Avec un colloque intitulé « 10 ans de politiques sur la prostitution : Résultats des options suédoises et néerlandaises, et perspectives », soutenu par le Mouvement du Nid ET le lancement de  « L’appel de Bruxelles », pour une Europe libérée de la prostitution. Il a d’ores et déjà été signé par de très nombreuses associations membres d’Abolition 2012, dont Femmes en résistance.

Voici le texte de l’appel

Considérant que :

La prostitution est une violence

  • Une grande majorité des personnes prostituées a subi des violences, souvent sexuelles, avant d’entrer dans la prostitution.
  • Une grande majorité des personnes prostituées subit des violences de toutes sortes dans le cadre de la prostitution (agressions physiques, verbales, sexuelles, psychologiques, etc.).
  • La répétition d’actes sexuels non désirés, car imposés par l’argent, les inégalités et la précarité, constitue en soi une violence sexuelle.

La prostitution est une exploitation des inégalités

  • La prostitution s’inscrit dans la longue tradition patriarcale de mise à disposition du corps des femmes au profit des hommes (droit de cuissage, viol, ‘devoir conjugal’…).
  • La prostitution exploite toutes les formes d’inégalités : des hommes sur les femmes, des riches sur les pauvres, du Nord sur le Sud, des groupes majoritaires sur les minorités.
  • En majorité, les personnes prostituées au sein de l’Union européenne sont issues de pays-tiers plus pauvres. Lorsqu’elles sont issues d’Etats membres de l’UE, on constate une surreprésentation des minorités ethniques.

La prostitution est une atteinte à la dignité de la personne

  • En plaçant le corps humain et la sexualité dans le champ du marché, la prostitution renforce l’objectification de toutes les femmes et de leur corps, et porte directement atteinte à l’intégrité physique et morale des personnes prostituées.
  • La prostitution renforce la domination des hommes sur les femmes et notamment le sentiment de disponibilité et d’accessibilité du corps des femmes que l’on retrouve dans le viol, le harcèlement sexuel et les violences conjugales.
  • La prostitution constitue un obstacle à une sexualité libre, respectueuse et égalitaire.
  • La prostitution alimente et perpétue la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle.

La prostitution est une violation des droits humains

  • La Convention des Nations Unies du 2 décembre 1949, adoptée par son Assemblée générale et ratifiée par 17 Etats membres de l’Union européenne, affirme dès son préambule que « la prostitution et le mal qui l’accompagne, à savoir la traite des êtres humains, sont incompatibles avec la dignité et la valeur de la personne humaine ».
  • La Convention des Nations Unies de 1979 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes demande aux Etats parties de prendre « toutes les mesures appropriées, y compris des dispositions législatives, pour réprimer, sous toutes leurs formes, le trafic des femmes et l’exploitation de la prostitution des femmes ».
  • La prostitution est incompatible avec les articles 3 et 5 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme qui affirment que « tout individu a droit à la vie, à la liberté, à la sûreté de sa personne » et que « nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ».

Nous demandons

aux etats membres de l’union européenne d’adopter des politiques garantissant :

  • La suppression des mesures répressives à l’encontre des personnes prostituées ;
  • La condamnation de toutes les formes de proxénétisme ;
  • Le développement d’alternatives réelles et de programmes de sortie de la prostitution ;
  • L’interdiction de tout achat d’un acte sexuel ;
  • La mise en en place de politiques de prévention, d’éducation à l’égalité et à la sexualité ;
  • Le développement de politiques de prévention dans les pays d’origine des personnes prostituées.

L’union européenne et ses états membres doivent revoir totalement leur politique de lutte contre la traite des êtres humains qui n’a ni sens ni chance d’aboutir tant que l’impunité des proxénètes et des clients prostitueurs demeurera la règle.

Vous pouvez retrouver le programme complet du colloque sur le site du Mouvement du Nid France ici : http://www.mouvementdunid.org/4-decembre-2012-lancement-de-l#appel

Vous pouvez également signer l’appel sur le site du Lobby européen des femmes et télécharger le programme de la conférence , 

qui réunira autour d’une dizaine d’europdéputé-e-s de tous les courants politiques, et de plusieurs ministres, près de 200 associations de lutte contre les violences faites aux femmes, issues de 25 Etats membres et 4 autres pays,  expliqueront en quoi la prostitution constitue : une violence ; un obstacle à l’égalité ; une atteinte à la dignité de la personne ; une violation des droits humains.

ewl_conference_-_programme_final_4_dec_2012

Abolir le système prostitueur pour réaffirmer les droits humains

Aujourd’hui est parue sur Slate.fr une tribune co-écrite par Muriel Salmona, Typhaine Duch, Annie Ferrand, Anne Billows et moi-même pour expliquer pourquoi selon nous il faut absolument adopter une loi d’abolition du système prostitueur.
Vous pouvez la lire ici :

http://www.slate.fr/tribune/65433/abolir-systeme-prostitueur-droits-humains

Et j’en profite pour vous recommander un autre article, écrit par Christine Le Doaré, suite à la manifestation de dimanche